Les revenus astronomiques de la soirée la plus fructueuse de sa vie ne seront pas suffisants pour la changer. La vie reprend son cours, la tentation est partout.
Et cette même question revient, encore et encore. Économiser. C'est un travail de tout instant. Une invitation à un anniversaire, une odeur de pain frais, les chaussures d'une fille dans le métro. Elle a perdu contact avec la plupart de ses amies, avec qui c'est tellement facile de sortir le week-end. Alcool, club - parfois drogue - et taxi. Elle en a facilement pour 100€ la soirée. C'est impensable aujourd'hui.
La question n'est pas tant de renoncer aux plaisirs, mais de ne pas payer pour eux. Avec un peu d'esprit, rien n'est impossible. Pour une voleuse aguerrie comme elle, le supermarché de sa rue n'a pas de secret. Seulement, il faut aussi compter sur la parcimonie, et ne pas sortir sans rien payer, de toute manière.
Non, la question est plutôt, qui contacter ? Qui pourrait lui payer une belle sortie, sans trop hésiter ? Elle hésite à re-télécharger Tinder. Le problème c'est qu'il y a tellement de choix, que les mecs se sentent pas assez désespérés pour offrir une soirée digne de ce nom à une inconnue. Non, il lui faut quelqu'un de déjà perdu.
Elle fait rapidement un tour mental de ses connaissances. Lucas, le mec d'HEC. Fatiguant. Elle n'a pas envie de passer la soirée à entendre parler de sa levée de fond. Mehdi ? L'attaché parlementaire qui se prend pour un président. Son égo n'a pas besoin d'elle. Non, il lui faut quelqu'un d'un peu malsain, qui comprendra qu'elle se sert de lui, mais qui lui payera quand même un troisième verre. Louis. La dernière fois, il s'était fait largué par sa copine. Mauvais plan. Il ne manquerait plus qu'il s'imagine quelque chose de sérieux avec elle.
Un autre nom clignote au fond de son cerveau. Melchior. Il sort toujours le samedi. Est-ce qu'elle a l'énergie pour tenir jusqu'à la fin de l'after ? Elle repense aux toilettes, à leur dernière sortie avec un frisson de dégoût. Ah ! Il lui avait présenté un mec. Gaby. Son visage lui échappe, mais elle se souvient de l'éclat dans ses yeux quand il avait parlé d'elle. Quel genre de mauvais garçon se cache derrière une pareille curiosité ? Elle a besoin de son numéro.
"C'est comme ça que j'ai gagné mon premier million.
Putain. Comme elle aimerait pouvoir dire ça. Fauve le regarde plus intensément. Il ne rate pas la façon dont ses lèvres s'accrochent à la paille noire de son French Martini.
- Dis m'en plus. Elle sourit en voyant ses yeux briller.
- Tu vois, le poker, c'est avant tout une guerre psychologique. Tout est dans la lecture de tes adversaires. Leurs bluffs, leurs intentions...
Il continue sur sa lancée, et insiste bien sur l'intérêt du jeu, comme si elle n'avait jamais touché de cartes. Fauve écoute à peine, déconcentrée par la montre Audemars Piguet au poignet de l'homme, qui scintille dans la lumière tamisée du bar.
- Alors tu n'es pas du genre à te laisser facilement impressionner ?
Elle lui parle avec une voix douce, la pulpe de son majeur glissant sur le rebord de son verre. Il réagit directement
- Je suis un professionnel, je te rappelle. Il faut avoir un sang-froid à toute épreuve. Ne jamais montrer ses émotions. Elle pose son coude sur la table pour pouvoir le regarder sous ses cils. Savoir ce que l'on veut, prendre des risques. Tu me suis ?
- Fascinant. Juste pour son plaisir personnel, et parce qu'elle connaît déjà sa réponse, elle ajoute. C'est un jeu viril, tu dirais?"
La conversation s'étend. Fauve fait signe au serveur pour commander un autre tour de boissons, ne quittant Gaby des yeux que d'une seconde. Elle s'assure de son plaisir à la voir faire chauffer sa carte. Elle se laisse acheter, en quelque sorte.
VOUS LISEZ
Caféine [Nanami x OC]
Fanfictionou : "Bunny" aime un peu trop le goût de la vengeance. Il est un banquier d'affaire assommé de travail. Elle danse dans un club pour rembourser ses dettes après les cours. On s'amuse comme on peut sur Terre, mais parfois, un gobelet en plastique...