Chapitre 4 : Jean

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— Il n'est plus là, murmurai-je.

Je scrutai chaque recoin du muret, comme si mon vélo avait pu être caché derrière une brindille ou un gravat. Peut-être l'avais-je rangé ailleurs ? Je balayai les environs sans grande conviction. Rien. Et, bien sûr, aucun des cyclistes alentour ne roulait sur un modèle identique au mien. Je devais me rendre à l'évidence : il avait été volé. Je maudis ma négligence. J'aurais dû me douter qu'une grande ville comme East City ne pouvait être aussi sûre que Shadowfen.

Je laissai échapper un soupir. Me rendre au travail allait être un calvaire et, avec mes horaires, impossible de racheter une bécane avant plusieurs jours.

— Un problème, commandant ?

Je sursautai. Havoc se tenait juste derrière moi. J'aurais juré l'avoir vu quitter les lieux deux bonnes minutes auparavant, en compagnie des autres officiers.

— Qu'est-ce que vous faites ici ? demandai-je un peu abruptement.

D'un coup d'œil, je vérifiai si d'autres collègues n'avaient pas inopinément fait leur apparition. Nous étions seuls.

— J'étais en train de démarrer ma voiture, et je vous ai vue plantée là, sous le déluge. Tout va bien ?

Il sortit un parapluie qu'il déplia au-dessus de ma tête. L'averse continuait à lui tomber dessus, plaquant ses cheveux contre son front. Touchée par son attention, je me rapprochai de lui, si bien que nous fûmes tous les deux sous l'abri provisoire. Abattue, mais au sec, je lui narrai ma mésaventure.

— Aïe, la tuile. Et rentrer à pied par un temps pareil... Vous habitez loin d'ici ?

— Rue d'Aerugo. C'est derrière le grand marché.

Il grimaça.

— Sans vélo, vous en aurez pour une heure. Je vais vous déposer, annonça-t-il.

Il accrocha mon regard en quête de confirmation. Un instant, je me perdis dans l'éclat saphir qui transperçait le voile clair de ses cils. Troublée, je hochai silencieusement la tête.

Havoc me présenta son bras. Je m'en saisis avec hésitation, puis nous partîmes.

*

Le tabac imprégnait chaque centimètre carré de l'habitacle. Le tableau de bord avait un aspect poisseux, les fauteuils en cuir clair jaunissaient à vue d'œil. Mes cuisses nues collaient désagréablement au siège. Mais tout cela n'était que de menus détails comparés à la puanteur qui régnait dans l'auto. Incommodée, j'avais entrouvert la fenêtre côté passager, espérant atténuer l'effluve qui m'agressait la gorge. Sans succès.

En dépit de l'inconfort olfactif, la conduite du sous-lieutenant se révéla très appréciable. Délicate, elle me permettait de profiter du trajet et de découvrir East City sous un autre point de vue. Havoc faisait la conversation. À chaque croisement, il pointait du doigt les endroits immanquables de la ville, selon lui ; principalement des cafés et des restaurants. Il se révélait être un guide touristique correct, quoique moins porté sur les anecdotes historiques que Fuery.

— Vous en pensez quoi, de cette histoire d'Ishbal ? me demanda-t-il à mi-chemin.

— Ce que j'en pense ?

Bonne question. Devant nous, une procession de vieilles dames traversa vaillamment la rue pavée, leurs cannes battant la mesure à chaque enjambée. Nous attendîmes patiemment.

— La menace est vraiment sérieuse, n'est-ce pas ? demandai-je finalement. La tête de Mustang lorsque Hawkeye a cité les alchimistes tués... Je parie qu'ils étaient des vétérans d'Ishbal. Moi, je n'ai même pas d'expérience au combat. Si Scar me trouve, je suis finie. Et pourtant, ajoutai-je d'une petite voix, je n'arrive pas à me sentir en danger. C'est comme si...

The Wind Alchemist | Fullmetal AlchemistOù les histoires vivent. Découvrez maintenant