Chapitre 7 : Lior

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La terre ocre aride, scarifiée de profondes craquelures et balayée en surface par des vagues de poussières, s'étendait à perte de vue. À de rares endroits, des brindilles lyophilisées par les rayons du soleil s'extirpaient à grand-peine du sol frappé de dessication. Partout où le regard atteignait l'horizon, des ondulations troubles faisaient paraître le paysage pour une illusion de l'esprit.

Le panorama inhospitalier défilait depuis plusieurs heures dans une extraordinaire monotonie. À bord d'un train de l'armée, nous traversions le désert de l'est qui bordait la frontière avec l'empire de Xing sur plusieurs centaines de kilomètres. Lasse de la cabine étriquée que partageait notre peloton, assaillie par une anxiété croissante à mesure que nous approchions de notre destination, je m'étais éclipsée pour me réfugier à l'arrière du convoi et prendre l'air sur la plateforme extérieure.

Mon dos reposait contre l'un des flancs en tôle qui encadrait l'endroit. Les assauts du sirocco faisaient vibrer les grands panneaux d'acier, générant un chuintement désagréable. Mal installée, il me fallait changer de position dès qu'une partie de mon anatomie me lançait un peu trop.

Je m'occupais l'esprit en transmutant l'air environnant. Le vent du désert était particulièrement chaud et sec par rapport à celui d'East City ou de Shadowfen ; je profitais de cet instant de calme pour m'habituer à ses propriétés.

Hypnotisée par la minuscule tornade qui charriait des grains de sable au creux de mes paumes, je n'entendis pas la porte de la cabine s'ouvrir. Une main chaude se posa sur mon épaule. Je sursautai. Ma création s'évanouit instantanément.

— Estelle ? Ça va ?

— Jean ! Tu m'as fait peur.

D'un geste, je l'invitai à prendre place à côté de moi. Épaule contre épaule, nous ballottions l'un contre l'autre, secoués par le roulis du train. Jean gardait les paupières mi-closes, ses iris clairs supportant mal la luminosité extérieure.

— Tu ne m'as pas répondu. Comment tu te sens ?

Il avait baissé son visage vers moi. Un pli soucieux barrait son front.

— Mustang vient de m'annoncer que lui et moi serions séparés pour les combats, déclarai-je. Il va diriger l'équipe qui partira sur le repaire principal. Et moi... je suis censée mener celle qui attaquera le secondaire.

Mon collègue eut un silence éloquent.

— C'est ma première mission ! m'exclamai-je brusquement. Ça n'a aucun sens !

J'enfonçai la tête entre mes bras croisés et poussai un gémissement plaintif.

À East City, nous avions subi de plein fouet la canicule estivale, mais notre situation était sans commune mesure avec le désastre qui avait frappé la ville de Lior. Plantée au milieu du désert, elle avait vu ses rares points d'eau asséchés et ses cultures brûlées par le temps mortifère.

Les villes voisines les moins touchées par le drame avaient apporté leur aide en envoyant des camions chargés de provisions. Seulement, une mafia de moyenne envergure sévissait à Lior. Elle avait réussi à détourner les barriques d'eau et les caisses de nourriture et à en contrôler la distribution. Les habitants se voyaient délestés de leurs richesses en échange de la moindre gourde d'eau croupie ; misérables, ils s'étaient résolus à leur sort, bien en peine de s'opposer à leurs tyrans.

C'est dans ce contexte que nous intervenions. Nos dirigeants nous avaient chargés, Mustang et moi, de faire une attaque éclair sur les deux repaires connus de la mafia. D'autres hommes nous attendaient dans un camp militaire aux abords de la ville : les éclaireurs qui avaient contribué à échafauder la mission, et les soldats destinés à renforcer les deux équipes d'intervention.

The Wind Alchemist | Fullmetal AlchemistOù les histoires vivent. Découvrez maintenant