Chapitre 25

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 Face au portail qui devait la mener au fil du destin qu'elle voulait tant retrouver, Mélandrie restait immobile, hésitante. Et si... Et si se rendre là-bas n'allait lui apporter que plus de souffrance ? Et si tout ceci, ce caprice, n'était qu'une autre monumentale erreur dont elle avait le secret ?

— Est-ce réellement une bonne idée ? demanda-t-elle en se tournant vers le père des dieux.

— C'est... Une idée, répondit-il en haussant les épaules. Bonne ou mauvaise, cela ne dépend que de toi. Comme je te l'ai dit, je me refuse à lire dans les pensées des autres, donc je ne sais pas si tu as une idée derrière la tête en me demandant une telle chose. Sache, cependant, que tu seras surveillée de l'autre côté pour que ton passage n'ait qu'un impact minime sur le déroulé des événements du fil que tu vas rejoindre.

— Je ne compte pas y rester. De toute façon, me connaissant, je ne vais pas me laisser me faire prendre ma place. Et même si c'était mon plan, la version de moi qui se trouve là-bas est une véritable divinité qui s'est gorgée de pouvoirs pendant quarante ans. Je ne fais pas le poids contre elle.

— Le pouvoir d'un ange du courroux vaut bien ces quarante ans de pouvoir, contredit-il.

— Quel intérêt aurais-je à dévaster un monde que je pense encore avoir protégé pendant aussi longtemps ? Non, j'y vais juste pour revoir mes terres une dernière fois et... Et faire mon deuil de cette vie que je n'aurai pas, s'étrangla l'ange de miséricorde.

— Lorsque tu seras de l'autre côté et que tu voudras repartir, tu n'auras qu'à repasser le portail dans l'autre sens. Toi seule le verras et toi seule pourras l'emprunter. Tu ne pourras pas non plus rester trop longtemps. Si mon alter-ego trouve que tu t'éternises, il te renverra de force.

En entendant cela, Mélandrie ne put s'empêcher de sourire. Pendant leur discussion, le père des dieux avait bien montré que sa perception du temps n'était absolument pas la même que celle des mortels. Pour lui, commencer à s'éterniser devait se compter en siècles ou en millénaires. Il y avait donc peu de chance qu'elle se fasse ramener dans sa temporalité de cette manière.

— Merci... Merci pour tout ce que vous faites pour moi.

— En tant que père des dieux, je me dois normalement d'être parfaitement impartial et de ne pas m'impliquer dans les problèmes des autres, mais vu que tu es une ange de miséricorde, tes problèmes sont en quelque sorte mes problèmes, sourit-il. Passe ce portail sans crainte. Lorsque tu te seras décidée à revenir de ce côté, je ferai en sorte que tu sois en présence de tes amis. Tu en auras sans doute besoin.

D'un signe de tête, Mélandrie remercia de nouveau le père des dieux. Elle avait lancé cette discussion pour se laisser du temps, mais à présent, elle était prête. D'un pas assuré, l'ancienne conscience de la terre-mère traversa le portail. À l'intérieur du passage, elle se sentit être poussée dans le dos.

La sensation était tout à fait paradoxale. D'un côté, sa traversée était calme, sans à-coup ni violence, mais d'un autre, elle sentait qu'il lui était absolument impossible de quitter ce courant qui l'emportait à la manière d'un fleuve déchaîné.

Dans cet étrange espace entre les dimensions, elle voyait littéralement les fils du destin tout autour d'elle. D'un couleur dorée étincelante, tous s'éloignaient d'un point d'origine bien trop loin pour qu'elle l'aperçoive. Elle voyait l'extrémité de certains qui lui semblaient absolument immobiles alors que d'autres grandissaient et passaient devant elle aussi vite qu'une flèche. D'autre encore avait leur extrémité déjà bien loin d'elle et semblaient infinis. Tous ne cessaient de se subdiviser en plusieurs branches qui, bien qu'indépendantes, continuaient à s'éloigner du point d'origine lointain.

Mélandrie Tome 4 : Les fils du destinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant