La sélection naturelle.

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Prompt : Sélection naturelle

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Les premiers mots d'Izuku avaient été les plus banals du monde. Papa, maman, baba (à boire), pipi, roro (héros). Mais quand son langage s'améliora, le mot qu'il prononçait le plus souvent était « Kacchan ». C'était lui qui l'avait surnommé ainsi, et ça lui était resté. La mère de Bakugo avait bien essayé de l'appeler « Kacchan » elle aussi, mais le garçon avait braillé. Kacchan, ça appartenait à Izuku, à personne d'autre.

Les deux enfants s'entendaient bien. Ils jouaient ensemble. Izuku empilait les cubes et Bakugo ricanait en cassant toutes les piles. Izuku prenait soin de la poupée, et Bakugo secouait le bébé en plastique dans tous les sens pour l'amuser. Izuku poussait gentiment ses petites voitures, Bakugo écrabouillait ses lego et playmobiles avec celles-ci. Parfois on aurait pu se dire que Bakugo avait le caractère d'un futur vilain, et Izuku serait un bon super héros. Mais les deux enfants voyaient les choses autrement. Ils seraient les meilleurs super héros, comme leur héros, All Might.

À trois ans, ils étaient sûrs de combattre le mal ensemble et de sourire à pleines dents pour s'exclamer « la cavalerie est là ».

Ils s'entendaient tellement bien, que parfois, ils mettaient les autres enfants de côté et qu'il pouvait être difficile pour leurs parents de les séparer. Malgré leur caractère très différent, ils se complétaient bien, et tout le monde pensait qu'il en serait toujours ainsi.

Jusqu'à ce que la sélection naturelle passe par là. Bakugo eut un Alter, un truc sympa, qui le rendait fort même, il n'avait pas encore quatre ans. Et à côté Izuku n'eut rien du tout, aucun pouvoir, aucune chance de réaliser son vœu.

Bakugo le consola, au début :

— Tu es quand même super fort, j'exploserai des trucs et tu aideras les gens.

Izuku lui souriait et acquiesçait.

Mais leur relation se délita peu à peu, Bakugo prenait beaucoup d'avance et Izuku ne pouvait que le regarder de loin, l'admirer, le suivre et croire en lui. Faire de Kacchan son modèle.

Deux choses mirent à mal leur amitié. La précipitation d'Izuku à vouloir l'aider en lui tendant la main quand Bakugo était tombé dans la rivière. La deuxième c'était que Bakugo réalisait que sans Alter, Izuku risquait surtout de se blesser, et il ne voulait pas qu'il lui arrive quelque chose de dangereux.

Alors, il se mit à harceler ce crétin de nerd de Deku.

Il le poussait. Il lui faisait peur. Il lui faisait comprendre qu'ils n'étaient pas égaux, qu'ils ne le seraient jamais.

Bakugo penserait que ça le ferait fuir, qu'il abandonnerait.

Il se trompait.

Il avait oublié à quel point Deku était têtu.

Bakugo n'en parla jamais à personne. Ni à ses parents ni à ses camarades, encore moins à cet imbécile de Deku. Mais quand il avait appris qu'Izuku n'aurait pas d'Alter, il avait attendu d'être seul dans le noir de sa chambre, pour se mettre à pleurer toutes les larmes de son corps de jeune enfant de quatre ans. Il l'avait fait discrètement, il avait étouffé ses gémissements dans son oreiller.

Parce que sans Alter, Izuku et lui ne seraient pas des héros ensemble, et ça... Ça faisait plus mal que tomber à vélo, que se prendre une porte dans le nez, que s'égratigner les mains sur le gravier.

Tout avait changé, et un petit morceau du cœur de Bakugo resta brisé.

La sélection naturelle c'était de la vraie merde.

Cela n'excusait pas son comportement vis-à-vis de Deku. Jamais rien ne pourrait excuser ça. Bakugo avait ses raisons, bonnes ou mauvaises, il n'était qu'un sale petit con impardonnable. Mais lui, lui contrairement aux autres, contrairement à la société, les autres camarades et même les profs, lui avait essayé de changer, de faire mieux, de dire pardon.

Il aurait dû faire ça plus tôt.

Il aurait dû envoyer chier la sélection naturelle.

Il aurait dû être du côté d'Izuku pour toujours, à la vie, à la mort, comme lorsqu'ils étaient tout petits.

Des années plus tard, Bakugo avait présenté ses excuses à Izuku, sans savoir si ça aurait un effet ou non. Il espérait que si, il pensait que non. Après avoir demandé pardon, il s'était passé trop de trucs et les deux n'avaient pas eu le temps de se reparler.

Bakugo était assis seul dans un coin tranquille, avec le besoin de réfléchir, de remettre les choses au clair dans sa tête. Izuku vint s'asseoir en silence à côté de lui. Le blond ne tourna pas les yeux vers lui, mais il dit :

— Tu peux m'exploser la tronche si tu veux, ce serait mérité.

Izuku haussa une épaule.

— Ce n'est pas mon genre, répondit-il.

— Tu devrais, ça te défoulerait.

— Kacchan...

— Tu peux m'insulter, si tu ne peux pas me frapper.

— D'accord, fit Izuku. Tu es un vrai crétin.

Mais le ton d'Izuku n'était pas vindicatif, plutôt amusé.

— Un crétin très crétin.

— Je vois que tu as de la diversité dans ton vocabulaire.

Izuku émit un petit rire.

— Qu'est-ce que tu fous à rire ? Je t'ai dit de me frapper.

— Kacchan écoute...

— J'écoute, ronchonna le blond.

— Tu t'es mal comporté c'est vrai, et il y avait des moments où j'avais peur de toi, mais de façon générale, je t'ai toujours admiré, toujours trouvé incroyable et malgré tout ce que tu as fait, et bien... Je ne t'en ai jamais réellement voulu.

— On t'a amputé de ton instinct de survie à la naissance, grommela Bakugo.

— Peut-être.

Bakugo trouva enfin le courage de regarder Izuku, ce dernier lui souriait et le cœur du blond s'emballa bêtement.

— C'est vrai ? Tu ne m'en veux pas ?

— Oui c'est vrai.

— Abruti, maugréa Bakugo.

Cela sembla beaucoup amuser Izuku.

— Ceci dit, ajouta l'adolescent aux cheveux verts, il y a une chose qui m'a manqué.

— Quoi donc ?

— Ton amitié.

Et l'air de rien, Izuku posa sa main sur celle de Bakugo. Ce dernier leva un sourcil surpris, mais laissa Izuku s'approcher de lui et embrasser sa joue.

— Est-ce que ça te suffit pour croire que je ne t'en voudrai jamais ?

Bakugo sentit ses joues chauffer de gêne, mais son cerveau se déconnecta et il lâcha un :

— Non.

Avant de poser ses lèvres sur celles d'Izuku.

Quand il se recula, il sourit malignement :

— Maintenant oui.

Izuku éclata de rire et posa sa joue contre son épaule.

— On a perdu beaucoup de temps Kacchan, réalisa Izuku.

— Et bien on va le rattraper, jura Bakugo.

Et leurs doigts s'entremêlèrent. Soudain, ce qui avait été brisé se recolla.

Fin.

L'autatrice : j'ai une amie qui a dit que le fait que Bakugo pleure en apprenant qu'Izuku n'aurait pas d'Alter était devenu son headcanon. Ça m'a fait plaisir. N'hésitez pas à me dire ce que vous pensez de cette petite fic. 

Trente baisers BakuDekuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant