dear postman

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Le grognement continu de Charles finit par sortir Chan de sa transe

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Le grognement continu de Charles finit par sortir Chan de sa transe. Cela faisait plusieurs minutes déjà que le canidé montrait les dents contre le bruit incessant de la cuillère de l'homme qu'il tapotait contre la table haute de la cuisine. À défaut de pouvoir faire lui-même cesser le bruit, l'animal tentait de se montrer menaçant envers celui-ci.

Lorsque le poète réalisa enfin, il lâcha brusquement la cuillère et provoqua cette fois-ci les aboiements de Charles. Il descendit de son tabouret et attrapa une friandise qu'il lui lança, gagnant alors le silence.

Il était bien tôt pour être debout. La rosée du matin était encore fraîchement imprégnée sur les brins d'herbe et le soleil n'était pas complètement levé.

Mais Chan allait être patient. Il tenait sincèrement à remercier cet homme, cette voix, de lui avoir rendu tous les mots qui lui avaient tant manqué ces derniers mois. C'était très important à ses yeux. Sa plume, ses écrits, c'était toute sa vie. Il noircissait pages après pages depuis son plus jeune âge, racontant tantôt tout ce qui lui passait par la tête, tantôt tout ce qu'il voyait. Ces temps-ci, il avait ressenti un réel vide, comme si plus rien n'avait d'intérêt à être retranscrit d'une belle manière, comme si aucun mot n'avait sa place sur ces tableaux quotidiens de la vie. Et ça avait créé une sensation désagréable qui lui avait collé à la peau sans cesse. Il avait perdu le goût à tout.

Alors, il était reconnaissant d'avoir retrouvé cette passion, cette flamme, ce petit morceau de vie, qui l'avait quitté.

Soudain, alors qu'il s'était encore perdu dans ses pensées, il entendit le bruit de grincement bien distinct de la fenêtre d'introduction des lettres de sa boîte aux lettres. Sans réfléchir, il se leva et se précipita vers sa grande porte en bois. Il l'ouvrit en grand, elle se cogna contre le mur dans un fracas monstre, et le postier sursauta. Il leva ses yeux confus bien qu'agacés vers le poète qui se sentit tout d'un coup idiot.

L'homme tenait un paquet de lettres dans ses mains qu'il se préparait justement à insérer dans sa boîte. Ses cheveux noirs étaient coincés sous son képi de postier bleu nuit. Son costume était impeccable, bien repassé, soigneusement boutonné, et sa sacoche en cuir était presque vide, signifiant qu'il devait probablement arriver à la fin de sa tournée.

Quelque chose clochait. Une sensation étrange battait dans le cœur du poète qui avait l'impression de se retrouver dans un endroit inconnu, un lieu où il n'avait pas sa place, où il n'était pas non plus désiré.

L'homme se redressa en soupirant et le scruta d'un regard inquisiteur.

— Puis-je vous aider ? il demanda, poliment bien qu'inquisiteur.

Chan resta bouche bée. Au son de cette voix, il comprit que ce n'était pas la personne qu'il recherchait. Il avait l'air autoritaire et agacé d'être dérangé en plein travail. Ils devaient avoir à peu près le même âge, aussi. Ses épaules étaient trop développées, il se souvint que la silhouette qu'il recherchait était fine et gracieuse. De plus, l'homme devant lui ne semblait pas très emprunt à utiliser sa voix pour créer de douces mélodies...

— J'attendais une lettre importante. répondit le poète, un peu hasardeux.

Son postier soupira et lui remit en main propre le paquet d'enveloppes qu'il tenait. Il s'en alla ensuite, secouant la tête de gauche à droite. C'est vrai qu'il en avait peut-être fait un petit peu trop, pour une raison si futile... Tant pis. Chan referma la porte et lança son paquet de lettres sur son fauteuil sans même y jeter un coup d'œil.

'chère trudie,

il s'avère en réalité que mon inconnu n'est pas postier, et que je me suis embarrassé face à mon facteur. il est temps de laisser tomber n'est-ce pas ?
ce n'est pas très grave, ce fut exaltant d'avoir une passion mystérieuse.

bien à toi, christopher.'

𝗠𝗨𝗦𝗘 ; jeongchanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant