Chapitre 6

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Après la nouvelle annoncée par Anthea, nous sommes restés silencieux durant de longues minutes. La capacité à trouver notre sommeil rapidement nous a visiblement quitté. Je fixe pour ma part un point invisible au plafond, me remémorant les dernières visites de mes frères.

Nous n'avons jamais été proches. Ayant plus de vingt ans d'écart, on ne peut pas dire que notre esprit fraternel s'est développé. Et encore, ils n'ont jamais su la « vérité ». Pour eux, je suis juste le rejeton de leurs parents, « l'enfant miracle » comme il a été dit au début. Mais l'enfant miracle qui, dès son plus jeune âge voulait amuser la galerie, ne tenait pas son rang et qui a surtout tué leur mère. James, Ian et Ethan ne me l'ont jamais pardonné. Et mon père n'a rien fait pour leur faire comprendre que je n'y étais pour rien.

A la pensée de James, mon cœur se serre légèrement. Pas tant pour lui, mais plutôt pour Lily, Henry, Lyana et le bébé à naître. Eux n'avaient rien demandé.

- Harry...

Je baisse les yeux vers Anthea, dont les sourcils sont froncés. C'est alors que je me rends compte qu'une larme vient de s'échapper de mon œil et de s'échouer sur le haut de la tête de la rouquine. La voilà désormais dressée sur son coude, son visage au dessus du mien :

- Tu veux en parler ?
- De quoi ? Je demande du ton le plus détaché possible.

C'est con parce que je sais parfaitement qu'elle lit en moi comme dans un livre ouvert. Elle en a toujours eu la capacité. Je n'ose imaginer ce que ça donnera lorsque nous serons réellement unis. Peut-être que ça me fait peur. Aujourd'hui, je peux encore lui cacher certaines choses, mais bientôt, nous n'aurons plus aucun secret l'un pour l'autre.

Oui, finalement, c'est pas plus mal qu'elle se refuse à moi.

- Harry pitié, soupire Anthea. Je sais que tu penses à James. Nous n'en parlons jamais et...
- Et pour dire quoi ? Qu'il est mort ? Que sa femme est morte avec lui ? Que ses enfants sont morts aussi ? Qu'en une seule seconde, cinq vies ont été brisées ? Et que, comme si ça ne suffisait pas, il a fallu que cette putain de marque brûle MA nuque ? Et non celles de mes abrutis de frères ?

Au fil de mes paroles, je me redresse sur mon lit. La rage, la rage de l'Alpha que j'essaie tant bien que mal de maîtriser, irradie tout sur son passage.

Pitié Anthea, imprègne moi. Ne me laisse pas devenir comme ça. Pitié.

- Être convaincu d'être plus de dixième sur l'ordre de succession durant des années pour réaliser, en une seconde que c'est des conneries ? Tu veux vraiment parler de ça ? Et ça changera quoi ! On sera toujours les putains d'héritiers de ce système de merde ! Après-demain, je vais devoir supporter les regards assassins de mes frères et me battre pour ne pas leur arracher la tête ! Tu veux en parler ?!

Je continue de parler, je ne sais même pas ce que je raconte, je laisse juste ma rage exploser. Anthea est encore assise sur le lit, patiente, à me regarder expulser toute la haine que je ressens en cet instant précis.

- Tu crois que ça me fait rêver de me dire que dans quelques mois, quelques années, je ne ressentirai plus rien ? Que tout sera dicté par mon statut de Grand Alpha ? Que ma vie tournera autour de la Meute et de toi ? Et je ne peux même pas dire nos enfants parce que tu refuses que je te touche ! Tu me refuses la paternité ! La seule chose dans ce foutu monde que je désire plus que tout avec toi et qui pourrait donner un semblant de sens à cette vie de merde que j'ai !

Je sens peu à peu une vague de bien-être m'envahir. C'est plutôt léger, à peine perceptible. Mais ça me soulage. Ma vision se fait plus nette, ma rage s'amoindrit et je finis par m'écrouler sur le fauteuil présent dans notre chambre, épuisé.

Him. [Larry] (A/B/O)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant