Chapitre 6 : Simple solitude

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Hiver 2004.

***

    Je crois que je me suis trop bien habituée à ce que Charlie soit une des premières personnes que je vois en arrivant. Trop habituée à ce qu'elle vienne me réveiller tous les jours lorsque je suis à Bigfork, parce que là je me sens un peu triste d'être si seule dans cette chambre.

Il est 14h et au final cela fait déjà deux jours que je suis arrivée chez mamie Sophie. Deux jours où j'ai eu le temps de voir Leo lorsque Franck m'a déposé ici, d'aller à l'atelier voir Idalie et même eu le temps de préparer des gâteaux avec grand-mère. Et dans tout ça, pas une fois je n'ai croisé Charlie. Je me suis privée d'aller sonner chez elle par respect pour ses parents, pour ne pas m'imposer... Je sais qu'ils sont occupés en ce moment, ma mère n'a pas eu Katy depuis deux ou trois semaines au téléphone. Mais maintenant je me tâte à y aller et à m'y imposer.

Enfin non... On ne s'impose pas chez les gens comme ça, sans prévenir. Puis bon il faudrait que je dérange papa ou mamie pour qu'ils m'y amènent. Et j'imagine alors leur tête si jamais Charlie est absente et qu'on doit simplement revenir au chalet... Mh... Peut-être que ça ne les dérangerait pas, je sais pas...

Je soupire. Je me pose beaucoup trop de questions pour si peu. Mais les vacances de Noël sont si courtes que je n'ai pas envie de perdre du temps. Enfin... Il faut que j'arrête de penser comme ça. J'aime être sur Bigfork et indépendamment de mon amie. J'aime y être pour un tout et pas juste parce que j'adore passer du temps avec elle. Oui, je dois me répéter ça, sinon je vais juste rater mes vacances.

Je me décide donc à faire quelque chose pour moi. Je me lève de mon lit, sur lequel je m'étais placée pour écouter de la musique et fouille dans ma valise pour récupérer un des livres que j'ai ramené ici.

Contes et Légendes inachevés de Tolkien. Un de mes auteurs favoris.

Et puis je descends au salon. Mamie Sophie est absente donc la maison semble vraiment bien vide, même si je pense que mon père est encore quelque part par là. Je regarde à travers les fenêtres pour le chercher, mais rien. Puis je vois que la nuit commence déjà à tomber. D'ici deux ou trois heures nous ne serons plus qu'éclairés par les lumières de Noël et celle de la lune. Les bûches dans la cheminée sont à peine brûlées ce qui me montre qu'il ne doit pas être bien loin.

Je m'installe finalement dans le fauteuil près du feu et me décide à entamer ma lecture. Je lis quelques pages passant de l'histoire des elfes à celle des orques. J'essaye de me plonger au maximum dans chaque détail que nous donne l'auteur mais... rapidement je me rends compte que je suis en train de penser à autre chose. Ça m'arrive souvent lorsque je lis ces derniers temps. Je commence et puis tout à coup je me rends compte que je tourne la page sans savoir réellement ce qu'il y avait d'écrit sur la précédente. Comme si mes yeux avaient lu sans jamais que l'information n'atteigne mon cerveau.

Alors je retourne en arrière. Une page, deux pages, trois pages. J'ai raté tout ça ? Je soupire et me décide à arrêter cette lecture chaotique. Je pose mon livre devant moi, sur la table basse en bois et me lève, décidée à trouver mon père pour qu'il m'amène en ville !

    —  Paaaapaaa ? je lance à travers la pièce en espérant qu'il me réponde rapidement. Mais rien.

    Je fais le tour du RDC, vole un cookie dans la cuisine, passe par la chambre du bas, là où il dort, puis le cellier, mais personne. Je regarde dehors et il n'est toujours pas devant le chalet, alors je regarde par derrière et je vois des traces de pas dans la neige. Trouvé !

    Rapidement, je rejoins l'entrée de la maison, là où sont mes affaires. Je suis habillée assez léger vu que nous n'avions pas vraiment prévu de sortir mais je vois que mamie Sophie m'a réinstallé mes affaires chaudes près du porte manteaux. En souriant, donc, j'attrape mon surpantalon que j'enfile puis ma veste polaire. Je mets mes boots, mon bonnet ainsi que mes gants. Je ne sais pas combien de temps je vais mettre pour rejoindre mon père, mais les températures négatives extérieures font que je préfère être prête même pour cinq minutes.

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