i

119 14 4
                                    


  quatre jours maintenant que j’encartonne chaque trace chaque griffe chaque page qui jonche le sol de ma chambre de toujours,
quinze ans que l'on s’est connu-es elle et moi,
cela ne s'oublie pas ne s’oubliera jamais
et pourtant je ne sais maintenir en forme les images que j’ai d’elle.
deux - six - neuf cartons sur le plancher de la maison de tous mes oublis mais il ne faut prendre que le stricte nécessaire se le coudre sur la peau sous les organes entre les dents l’accrocher et le laisser pendre
assis-e en tailleur par terre cela fait quelques années déjà qu’il n’y a plus de tapis au sol alors je regarde la chaise rouge bleue jaune et verte quelque part dans la pièce elle n’a pas de place fixe plus rien ne l’orne ne l’accompagne ne l’utilise alors je ne sais que faire de cette chaise sur laquelle on ne s’asseoit pas - jamais - moi qui part et qui déserte son ombre comme maintenant gréffée aux murs de ma chambre.

ma chaise
est
toutes les photographies du monde
comme - une boîte aux trésors
ma chaise me raconte des fois,
dans la nuit trop noire et endormie,
l’oubli que j’ai vécu dont je ne me souviens plus.

c’est quand les flashs cognent trop fort dans les parois du crâne
que ses fissures dessinent mes contours -
quand la nuit ne suffit plus pour que les effluves remontent à la surface,
quand le nom n’est pas assez pour se définir rien que par son existence.

l’objet me grave et me fait saigner
à grosses gouttes
le rouge
des larmes jamais pleurées.
le souvenir, comme une entaille à profondeur variable,
attaque la chair, les veines et la peau déjà tailladée par la mémoire,
celle qui porte en elle ce que l’on ne sait pas -
qu’on ne saura jamais.

marcher sur les ruines Où les histoires vivent. Découvrez maintenant