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  ma chaise est rouge alice et bleu juin
rouge larmes et bleu sang
le bleu d’une chaleur qui mange
et le rouge
le rouge aussi rouge qu’une promesse gravée dans la pierre que je croise souvent durant mes soirées d’errance.

son assise est verte de ce vert que je hais de tout mon corps
parce que c’est le vert qui essaie d’attendrir,
celui qu’on s’étale sous les paupières le soir en espérant ne plus jamais s’échapper du rêve,
le vert qui rend supportable l’idée même de tout ce qui ne peut plus se porter,
pour un jour,
peut être
respirer

elle arbore aussi ce jaune qui m’indifère
parce qu’il rayonne - rien que tapageur,
qui n’est là que pour être là,
justement.
ce jaune qui brille trop fort et qui brûle la peau -
ma peau. qu’il a brûlée en profondeur, le jaune, et cela,
le bois qu’il recouvre l’a bu avec allégresse,
l’a retenu
jusqu’au confin de ses nœuds.

ma chaise s’est teintée de la couleur que prennent les reflets dans mes yeux pendus au rebord des fenêtres du train.

la chaise,
son assise est rouge et chante les vices
et le danger
qui ont brûlés une fois en moi,
ou deux, peut être,
si ce n’est de façon continue qu’il flambent.

ses pieds sont bleus
je crois qu’ils sont bleus  -
je sais qu’ils le sont - bleus,
car cela est de ces choses qui ne s’oublient pas.
ils soutiennent l’objet,
résistent à son poids,
celui du bois des sépultures des monuments des photographies sous le verre fissuré rien de ce que mon corps ne sait faire grandir au fond de lui,
car il ne sait accepter que sur ce bois les tombes ont fleuries -

celles du moi mort,
et de celui qui n’a jamais existé, qui n’existera jamais mais qui essaie
avec hargne et courage et colère aussi,
jusqu’à nouer ses cils entre eux
celui qui surtout essaie,
de ne pas se faire oublier.
d’en faire quelque chose de beau,
d’intimement
et de précisément beau.

marcher sur les ruines Où les histoires vivent. Découvrez maintenant