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C'était tour à tour qu'ils avaient pénétré la boîte de nuit, sur leurs gardes, prêt à rebondir face au moindre imprévu. L'atmosphère pesait lourd, elle était presque suffocante, comme si chaque respiration arrachée à cet air chargé de parfum capiteux et de fumée enivrante était un défi. Les murs, parés de velours pourpre et d'éclats métalliques ternis, semblaient absorber la lumière plutôt que de la refléter, accentuant l'oppression ambiante.

Une lourde porte claqua derrière eux, scellant leur entrée comme un pacte silencieux. Ici, il n'y avait pas de fuite possible, seulement des choix aventureux, et les conséquences inévitables qui les accompagnaient.

Les basses de la musique martelaient leurs oreilles, résonnant jusque dans leurs côtes. Pourtant, ce n'était pas la mélodie qui rendait la scène si écrasante, c'était les regards. Des yeux partout, observant, jaugeant, évaluant, comme des prédateurs attendant que leurs proies s'éloignent un peu trop du troupeau. Les sourires des habitués, accrochés à leur verre de Whisky, étaient trop larges pour être sincères, trop tranchants pour ne pas dissimuler une intention malsaine.

Chaque pas qu'ils faisaient résonnait sur le sol marbré, mais ce bruit semblait bien pâle face aux murmures omniprésents, une symphonie de conversations envoûtantes et dépravées, ponctuées de rires rauques et d'éclats de voix. Ce lieu n'était pas fait pour les faibles ; il exigeait de ses visiteurs qu'ils embrassent le vice ou qu'ils se perdent dans ses ombres. Il n'était pas question de fuir sans avoir goûté aux aspects les plus sombres des ténèbres.

Plus ils progressaient dans les couloirs étroits, plus la musique gagnait en intensité, chaque vibration s'insinuant dans leurs os comme un rappel incessant qu'il n'y avait plus d'échappatoire. L'air se chargeait d'une lourdeur suffocante, saturée d'odeurs mêlant la sueur âcre, les relents d'alcool bon marché, et des effluves chimiques que Sunoo ne pouvait identifier. C'était une alchimie toxique, une signature olfactive propre à ce genre de lieu, qui s'infiltrait dans sa gorge et lui donnait la nausée.

Certains passants déambulaient, boisson alcoolisées à la main, simplement attirés par le tumulte de la musique et ses promesses de divertissement nocturne. Mais il suffisait d'un regard tourné vers les ombres des alcôves pour comprendre que d'autres poursuivaient des plaisirs bien plus sombres. Les murmures, les rires étouffés, les corps dénudés et les soupirs chargés de luxure, ne laissaient aucun doute sur les véritables intentions de la majorité des âmes présentes, toutes aussi corrompues les unes que les autres.

À chaque pas, l'éclairage devenait plus tamisé, les néons rouges projetant des reflets démoniaques sur les visages gangrénés des inconnus. L'atmosphère devenait de plus en plus suffocante, comme si le poids des péchés commis ici imprégnait les murs. Les lieux n'avaient plus rien d'un simple club ; c'était une descente dans les profondeurs des instincts humains les plus abjects.

Sunoo sentait son estomac se nouer, une sensation qui dépassait la simple répulsion. Il y avait là une familiarité effrayante, une réminiscence de son propre passé qu'il s'efforçait de noyer sous des couches de déni. Mais ici, dans cette obscurité asphyxiante où tout semblait conçu pour exposer les failles et les blessures, ses souvenirs refaisaient surface, insidieux et inoubliables.

Le blond n'était pas doué pour discerner ses émotions, mais cette fois-ci, une angoisse viscérale, tapie dans les tréfonds de son être, s'était réveillée comme une bête endormie. Cette angoisse, qu'il n'avait pas ressentie depuis plusieurs années, rampait sous sa peau et serrait son cœur d'une poigne glaciale.

Autour de lui, les visages des fêtards se tordaient, se déformaient, prenant lentement l'apparence de ses démons d'autrefois. Ces mêmes spectres qui lui avaient autrefois volé son sommeil et son innocence, des fléaux sans visage qui l'épiaient, l'étouffaient, et lui murmuraient qu'il n'aurait jamais droit au répit, ni dans la lumière, ni dans les ténèbres, de jour comme de nuit.

𝗧𝗥𝗔𝗣𝗣𝗘𝗗 | 𝗁𝖾𝖾𝗌𝗎𝗇Où les histoires vivent. Découvrez maintenant