𝗧𝗥𝗔𝗣𝗣𝗘𝗗 | 𝗁𝖾𝖾𝗌𝗎𝗇

𝟐𝟎

Nous en étions arrivés au lendemain de la soirée la plus intense de la vie de Sunoo. Les émotions se mêlaient en lui comme un tourbillon incontrôlable. L'appréhension, la peur, le dégoût. Le désir, le plaisir — il avait traversé tout cela en l'espace de quelques heures, comme un homme pris dans une tempête, incapable de se protéger des bourrasques qui le submergeaient.

Les douze coups de midi résonnèrent, mais Sunoo était toujours là, allongé dans son lit, figé. Le plafond devenait une toile blanche qu'il scrutait sans la voir. Ses yeux étaient vides, perdus dans le vide, là où rien ne semblait exister. Il avait tenté de dormir, de fuir la réalité dans les bras de Morphée, mais chaque fois qu'il fermait les yeux, les images de la veille revenaient, envahissantes, inexorables. Le contact glacial des doigts gantés de Jeongsu sur sa peau, le goût alcoolisé des lèvres de ce dernier, la brutalité de son corps l'écrasant au sol, la douleur du couteau d'Ethan planté dans sa gorge... Ces images se superposaient dans son esprit, les flashs de ce corps sans vie tombant dans une mare de sang se déroulant encore et encore, piégé dans un film d'horreur auquel il ne pouvait pas échapper.

Il ne pouvait plus supporter ces nouveaux fantômes qui le hantaient, aussi lourds que ceux de son passé, aussi insupportables que les ombres de ce qu'il avait laissé derrière lui. Chaque pensée était une déchirure, un écho douloureux dans sa poitrine, et il se sentait écrasé sous ce poids invisible, comme si l'air lui manquait. Il avait toujours eu l'habitude de fuir la douleur, de l'ignorer, de la cacher sous des couches de colère et d'indifférence. Mais cette nuit-là, tout était devenu trop réel. Trop palpable. Trop douloureux.

Et puis, il y avait cette suite de la soirée, cet enchevêtrement de contradictions qui l'avait laissé brisé et perdu. La folie qui s'était emparée de lui avec Ethan, l'oubli total dans lequel il s'était laissé tomber, croyant un instant qu'il pourrait échapper à la guerre qui faisait rage dans son âme. Leurs corps entrelacés, leurs lèvres se cherchant avec cette urgence qu'il n'avait jamais connue auparavant, comme une quête dévorante. Et puis, après tout ça... il s'était retrouvé seul. Abandonné. Ethan l'avait laissé là, dans ce silence écrasant, dans cette pièce pleine de promesses non tenues. Son cœur s'était serré, broyé sous le poids de la réalité.

Le blondinet se redressa lentement, ses bras repliés sous son corps comme pour s'offrir un soutien qu'il n'avait pas. Il passa une main dans ses cheveux éparpillés, frôlant son crâne avec la douceur d'un geste instinctif. La chaleur de ses paumes contre sa peau froide ne fit qu'accentuer la sensation de vide qu'il ressentait. Un soupir s'échappa de ses lèvres, lourd de toutes les pensées qui tourbillonnaient dans sa tête.

Il n'avait pas envie de voir qui que ce soit. Pas même lui-même à travers un miroir. Il ne voulait pas de cette vie, de ce chaos, de cette lutte intérieure qui le dévorait. Il voulait simplement se laisser aller, se fondre dans son lit, se perdre dans un sommeil sans fin, où tout serait oublié. Où tout serait effacé.

Mais le silence autour de lui semblait aussi oppressant que l'agitation de son esprit. Ses pensées, aussi enchevêtrées soient-elles, ne lui laissaient aucun répit. Il se sentait piégé dans cette cage qu'il avait lui-même forgée. L'angoisse et la confusion s'entremêlaient dans son cœur, lui refusant toute issue. Il avait l'impression d'avoir franchi un seuil dont il ne pourrait jamais revenir, d'avoir croisé une ligne qu'il ne pouvait plus effacer.

Il ferma les yeux un instant, puis les rouvrit avec peine, comme si la lumière du jour était trop crue, trop violente. Il n'était pas prêt à affronter le monde, ni à se relever. Il n'était même pas sûr de savoir comment il allait aller de l'avant après ça. Il n'avait jamais imaginé que sa vie prendrait un tournant aussi radical, aussi sombre. Il n'avait jamais voulu ça. Pourtant, il n'avait pas le choix. Chaque décision, chaque geste, semblait l'entraîner un peu plus loin dans cette spirale de laquelle il ne pouvait s'échapper.