8 - « Le HASARD fait bien les choses. Quand il les fait » J-C Carrière

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Audrey courait à petites foulées dans le parc, elle en était à son quatrième tour de piste sans pouvoir s'arrêter. MP3 à la main, écouteurs dans les oreilles, elle essayait de faire abstraction de son entorse quasiment guérie tout en maudissant silencieusement ce débile d'Aaron. La douleur qu'elle avait put ressentir à la jambe n'était qu'un mauvais souvenir. En revanche, la douleur dans son cœur, restait bel et bien là et ne semblait pas vouloir cicatriser.

Ed.

Les pensées nostalgiques s'enchevêtraient. Lui aussi était débile. La rejeter, elle, Audrey Horms. Elle se rappela alors la fois où ils avaient failli s'embrasser lors de la représentation de théâtre Roméo et Juliette. Mais très vite, la déception du moment remonta aussi ; il s'était écarté au dernier moment et lui avait donné un furtif baiser sur le front.

Elle soupira tout en reprenant le chemin d'un cinquième tour en se motivant, profitant du jogging comme une forme de catharsis.

Elle était tellement imprégnée dans ses pensées qu'elle ne vit même pas le garçon qui arrivait à toutes jambes et qui la bouscula. Elle essaya de se rattraper sur sa jambe et perdit l'équilibre. « Pas encore », pensait-elle. Mais dans sa chute, le garçon ne manqua pas de la rattraper agilement dans ses bras. Tout était allé si vite qu'elle fut simplement capable de comprendre qu'elle était assise sur la cuisse d'un jeune homme brun. Il la tenait fermement d'une main et maintenait son dos de l'autre pour qu'elle ne flanche pas.

Essoufflée, elle posa son regard émeraude sur lui et eut du mal à ne pas hoqueter.

Robuste, le jeune garçon avait les cheveux d'un noir profond noué en un chignon haut avec des prunelles sombres tirant vers une couleur comparable à du noir ou du rouge grenat.
D'une grande intensité, ils ressortaient sur une peau albâtre. La finesse de ses traits lui rappelait ceux d'Ed, mais le sourire qu'il lui adressa balaya tous les souvenirs torturés qu'elle avait de lui.

Était-elle en train de rêver ou venait-elle de rencontrer un Apollon ?

—Ça va ? lui demanda-t-il consciencieusement en la remettant sur ses deux pieds. Je ne regardais pas où j'allais. Désolé.

Elle hocha la tête faiblement sans pouvoir détacher son regard du sien, tant elle était fascinée.

— C'est ma faute, je n'ai pas fait attention, dit-elle en remettant sa queue de cheval en place. Désolé.

Connaissant la ville comme sa poche puisqu'elle avait vécu toute sa vie ici, Audrey ne put s'empêcher de penser qu'elle ne l'avait jamais vu.

— Tu es nouveau dans le coin ?

Il acquiesça.

— Je suis de passage, je m'appelle Philomenon, mais tu peux m'appeler Phil. Et toi ?

—Audrey.

« Philoménon » se répéta cette dernière silencieusement dans son esprit.

À présent, Audrey était complètement désarçonnée, et ce n'était pas chose facile. D'ordinaire, si assurée, elle ne savait pas s'il fallait qu'elle poursuive son chemin ou qu'elle poursuive cette conversation.

— J'avais fini mon jogging de toute façon, lui dit-elle, spontanément. On peut aller déjeuner si tu veux.

C'était une approche très directe et Audrey ne semblait pas sûre de son tour de force. Seulement quelque chose l'attirait chez lui et elle ne put s'empêcher de lui proposer.

— Avec plaisir, j'avais fini aussi, accepta-t-il à la grande joie d'Audrey.

Ils quittèrent le parc pour se diriger vers le restaurant du coin. Tout le monde connaissait Audrey à cause de ses parents médecins en ville.

LUCY KEITH I - Le fil rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant