15 - Pensées embrumées, sentiments malmenés

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Les bras de mon père se referment autour de moi alors que je le rejoins au niveau de l'arrêt minute de l'aéroport. Je niche mon visage dans son cou tout en tentant de retenir les larmes qui menacent de s'échapper de mes yeux tandis que la chaleur de son étreinte réchauffe un peu mon cœur gelé. J'ai laissé le reste des voyageurs sur le tarmac de la piste privée et leur présence ne me permet plus de ne pas ressasser ce séjour chaotique qui prend fin. Les quelques heures de sommeil que j'ai pu glaner dans les airs n'ont malheureusement pas suffi à endormir mon esprit embrumé et c'est la tête pleine d'un maelström d'émotions emmêlées les unes aux autres que je débarque dans mon pays natal.


- Tout va bien ma chérie ?

- Est-ce qu'on peut rentrer à la maison s'il te plait ?


Je renifle bruyamment tout en lui disant cela et je vois à son regard préoccupé qu'il brûle de me poser des questions sur ce qu'il m'est arrivé durant ce séjour. Il a cependant conscience de l'importance de ma requête puisqu'il se contente de passer un bras autour de mes épaules et d'attraper ma valise de son autre main pour nous diriger vers sa voiture. Je m'installe sur le siège passager tandis qu'il range mon bagage dans le coffre et il se saisit de ma main en se positionnant derrière le volant alors que mon regard reste obstinément fixé vers l'extérieur. Nous ne prononçons pas un mot de tout le trajet et je reste murée dans le silence jusqu'à ce que nous atteignions l'appartement niçois de mon père. Je l'entends s'affairer dans la cuisine alors que je m'installe en tailleur dans le canapé, les yeux rivés sur la vue qu'offre les fenêtres du cinquième étage. L'immeuble est assez bien situé le long de la côte, me permettant d'admirer les lueurs de la ville qui se reflètent sur les eaux sombres de la Méditerranée. Le contraste entre le calme extérieur et la bataille qui fait rage dans mes pensées est assez saisissant. Les voix qui peuplent mon esprit sont si fortes qu'elles me donnent des sensations de paracousie, brouillant un peu plus les limites de cette réalité que je ne parviens toujours pas à accepter. Je suis sortie de mes songes par le poids de mon papa qui s'enfonce dans le sofa à mes côtés et qui me tend une tasse de thé chaud. Je me saisi du mug qui réchauffe légèrement les extrémités de mes doigts gelés, contaminés par le froid qui enserre mon cœur depuis plusieurs heures.


- Livia ma puce, tu sais que tu peux me parler n'est-ce pas ? Qu'est-ce qu'il s'est passé au Japon ? Ne me dit pas rien s'il te plaît, je te connais, je vois bien que quelque chose ne va pas...


J'inspire brutalement avant de tousser, cette brusque arrivée d'oxygène dans mes poumons étant trop violente pour mes organes qui semblent s'être mis en mode survie depuis que mon âme a perdu une partie d'elle-même. Je tourne ensuite mes yeux pleins de larmes vers celui qui a toujours été là depuis ma naissance et me lance dans le récit des derniers mois. Je ne mentionne pas le baiser échangé avec Lando, ni la proportion qu'on pris les menaces des fans avec l'agression en Grèce mais me livre sur tous les autres éléments des dernières semaines. Mon père connait Lando aussi bien qu'il me connait et il a assisté à la naissance de ce lien entre nous. Je sais donc qu'il ne feint pas la surprise quand je lui parle de la dégradation de notre relation jusqu'à sa déchéance finale qui s'est jouée dans l'Empire du soleil levant. Sa main dessine des arabesques sur la mienne, me réconfortant de sa simple présence tout au long de mon discours mais il ne m'interrompt pas, laissant le flot décousu de mes paroles s'échapper de mes lèvres dans une tentative désespérée de rédemption. Je termine mon récit au creux de ses bras, bercée par la chaleur de son étreinte qui ne suffit pourtant pas à chasser les frissons qui bourdonnent sous ma peau.


- Je suis perdue papa. Je ne sais pas quoi faire sans Lando dans ma vie. Je viens d'obtenir mon ticket d'or pour le doctorat de mes rêves grâce à ce contrat mais je ne parviens même pas à me réjouir car il est la première personne avec qui j'aurais voulu partager cette euphorie. J'ai l'impression que mon cœur s'est brisé en un million de petits morceaux que je ne pourrais jamais recoller.


Comme une étincelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant