Chapitre 13 - Alessia

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J'ouvre les yeux sur le torse tatoué de Marshall et mes lèvres s'étirent. Je viens de passer une nuit merveilleuse et reposante, comme je n'en n'ai pas eue depuis un mois. 

- Tu es réveillée petit Démon? je l'entends murmurer de sa voix brute.

- Ca dépend ce que tu as à proposer.

- Diabolique, ricane t il. Il est déjà 9 heures.

- Quoi?

Je me redresse brusquement ce qui l'amuse.

- Arrête de te marrer, on devrait déjà être au funérarium.

Je me sens nulle, l'espace de quelques heures j'ai oublié le drame qui menace de m'engloutir à chaque instant.

- Je suis sûr qu'il ne nous en voudra pas, se marre t il.

- Ton humour noire est vraiment de mauvais goût, je râle.

- C'est pour ça que tu m'aimes, rigole t il avant de se figer en prenant conscience des mots qu'il vient de prononcer.

- Ne prends pas tes rêves pour la réalité, je me moque. Quoi que, tu es plutôt mignon quand tu rougis.

Il grogne alors que je me lève pour prendre une douche hilare. Je rigole beaucoup moins lorsqu'il vient se plaquer contre moi sous l'eau bouillante. De toute évidence nous allons arriver tard au funérarium, après tout il a raison, Papa ne devrait pas nous en vouloir ... 

Nous arrivons devant la chambre funéraire en fin de matinée. Ava et Evan sont là. Mon amie vient me serrer dans ses bras réconfortant.

- Comment tu te sens? Nooooon.

- Chuuut, je l'intime en lui faisant les gros yeux.

Elle se tourne vers Marshall puis moi et ses yeux deviennent si grands que je pouffe. 

- Vous avez couché ensemble ou je rêve?

- C'est pas vraiment le moment Ava, je gronde.

- Ca veut dire oui? demande t elle tout sourire.

Marshall affiche un sourire triomphant, Evan vient lui taper l'épaule avec un hochement de tête entendu alors que je lève les yeux au ciel. Une fois nos esprits à nouveau concentré sur ce que nous avons à faire et non plus sur nos activités sportives, nous entrons auprès de Papa. Marshall entrelace ses doigts aux miens et je m'accroche à lui comme si ma vie en dépendait. Je mémorise son visage et lui dit combien je l'aime, une dernière fois.

En début d'après midi, nous nous rendons au cimetière où le prêtre prononce des mots que je n'écoute pas. Le cercueil est désormais scellé. Je ne le verrai plus, jamais. Une partie de mon cœur part avec lui, mais l'autre part bat plus fort pour enrailler ce mécanisme d'autodestruction. Mes yeux baignés de larmes ne voit plus cette bière mais l'homme dont je suis éperdument amoureuse. Il est à mes côtés et je me repose sur lui, parce qu'à l'instar de tout ceux qui ont croisé ma route jusque là, je sais qu'il sera toujours là pour moi, tout au fond de moi j'en suis persuadé. Et c'est cette certitude qui finit par tarir mes larmes. Mon père voulait que je sois heureuse et je le suis, dans les bras de l'homme qu'il a aidé il y a bien des années, dans les bras de celui en qui il avait toute confiance et qu'il aimait comme un fils.

Je regarde Marshall avec un léger sourire, son visage est neutre jusqu'à ce qu'il pose son regard dans le mien. Il examine chacun de mes traits et me sourit à son tour.

- Tout ira bien maintenant, non? je demande dans un murmure.

- Tout ira bien, me confirme t il en embrassant mon front. 

Nous nous retrouvons tous à la brasserie du centre ville. Tout le monde boit un verre en l'honneur de mon père. Ava court partout et Evan l'aide. Marshall ne veut pas s'éloigner de moi mais je le sens nerveux. L'alcool coule à flot et il y a beaucoup de monde. Je comprends son malaise. Je l'embrasse tendrement avant de lui dire :

- Tu peux rentrer si tu veux, je vais bien.

- Tu es sûre? 

- Oui, vas y. Je vois bien que tu es mal à l'aise. Je reste encore un peu, il y a certains de ses collègues avec qui je n'ai pas encore discuté mais je me dépêche.

- Merci, souffle t il soulagé en embrassant ma tempe. Prends ton temps, et tu m'appelles quand tu veux que je vienne te chercher, ok? 

- Oui, Monsieur, je dis en faisant un salut militaire.

Il secoue la tête, un sourire en coin, avant de partir. Je fais le tour des tables et discute avec des collègues ou des employés, certains m'ont connu bébé et nous nous remémorons des souvenirs tendres qui me font un bien fou. Au bout de quelques heures, les gens partent petit à petit, libérant un peu de temps à Ava et un peu d'espace dans le bar.

- Ca a l'air d'aller, toi? me demande t elle.

- Je crois que oui. Ca va aller, je réponds confiante.

- Tu veux que je te ramène? On va pas tarder à y aller.

- Non, je crois que je vais rentrer à pied. J'ai besoin de prendre un peu l'air après ces derniers jours.

- Ca marche. Tu m'appelles si tu as besoin.

Elle dépose un baiser sonore sur ma joue et retrouve son chéri un peu plus loin. Je sors et marche doucement vers l'extérieur de la ville pour retrouver la maison. La nuit commence doucement à tomber quand j'aperçois la bâtisse boisée. J'aime cette maison et j'ai un pincement au cœur en sachant qu'il faudra sans doute bientôt la vendre. J'entre sans faire de bruit, de peur de réveiller Marshall. 

Il y a ces moments hors du temps où malgré les épreuves et les obstacles, tout vous paraît possible. Ces moments où vous réussissez à être heureux malgré la douleur et la peine qui vous entourent. Et puis, il y a la chute. Cet instant précis où tout vole en éclat. Votre bonheur, vos certitudes, vos croyances. Plus rien n'a d'intérêt, plus rien n'a d'importance. 

Mon cœur se serre avec tellement de force que j'ai l'impression d'être poignardé à plusieurs reprises. Marshall est là et elle aussi. Ses mains sont posés sur son torse et son regard si semblable au mien le regarde de cette façon provocante qui lui est propre. Marshall a ses mains sur ses bras et penche la tête vers elle. Incapable d'en supporter d'avantage, je sors en courant. Je cours jusqu'à ce que mon souffle m'arrête. Je cours jusqu'à ce que la forêt qui m'entoure me fasse frissonner d'horreur. Je cours pour empêcher mes larmes et ma rage de se déverser. J'y ai cru, vraiment. Je pensais qu'avec lui tout serait différent, qu'on aurait un avenir. 

Et puis tout s'arrête.

A LA VIE A LA MORTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant