chapitre I

101 4 0
                                    

Je ne me rappelais plus du moment où j'avais commencé à perdre goût à la vie, peut-être le jour de mon mariage ou de mes fiançailles. Je savais simplement qu'au fil du temps, tout devenait fade. J'étais au sommet, mais je ne voyais que des nuages à l'horizon. La vie ne m'était pas agréable. J'étais reine, mais seulement sur la toile. Mariée, mais uniquement sur le papier. Belle, mais brisée. L'argent que je possédais n'embellissait que l'extérieur, et le semblant de pouvoir que je détenais ne me servait qu'à changer de valet à ma guise. Tout ce qui me restait était ma dignité... mais, comme par magie, on me l'avait aussi prise.

Je me sentais piégée dans une existence qui ne me ressemblait pas, emprisonnée dans un rôle que je n'avais pas choisi

Je regardai la pièce où je me trouvais un instant, les yeux dans le vide, le cœur lourd. Assise dans ma baignoire, je sentais la main de ma domestique, Irène, me frotter le dos avec des mouvements délicats, presque apaisants, tandis que le vent frais du soir me chatouillait la joue. Dans cette intimité silencieuse, une pensée me traversa : au final, il ne me restait rien, ou du moins, je n'avais rien.

Je me redressai et sortis de la baignoire, l'eau et l'huile parfumée glissant le long de ma peau blanche comme le lait. Mes cheveux roux laissaient s'écouler le surplus d'eau, créant des gouttes scintillantes qui se mêlaient à l'odeur douce des roses. Cette fragrance me rappelait souvent les quelques souvenirs qui restaient de mon enfance au palais, des moments éphémères et joyeux, désormais enveloppés dans un voile de nostalgie.

Des souvenirs heureux s'évanouissaient lentement avec le temps. Parfois, je revivais encore la voix douce de ma mère m'appelant depuis le jardin, ou le sourire chaleureux de mon père revenant des réunions avec la cour. Ces moments me manquaient profondément, mais désormais, ils appartenaient à une réalité révolue. Ils n'étaient plus là, et il fallait accepter que ces souvenirs finissent par s'éteindre.

— Votre Majesté ! Vos habits sont prêts !

— Ah !

— Vous vous sentez bien, votre Altesse ?!


Je regardai Irène un moment, mais ne répondis pas, laissant sa question errer dans le vide. Après tout, la réponse resterait, même avec le temps, inchangée : "Oui ! Je me porte bien, ne vous en souciez pas."

Une fois habillée, je la regardai s'atteler à la tâche de me coiffer. Ses gestes étaient délicats, presque artistiques, comme si chaque mouvement de sa brosse était une note d'une mélodie silencieuse. J'observais avec attention ses mains habiles, la manière dont elle s'appliquait à réaliser une coiffure élégante qui encadrerait mon visage.

Dans ce moment de tranquillité, je réalisai à quel point j'avais besoin de ce réconfort. Irène était l'une des rares personnes qui restaient à mes côtés, et sa présence me donnait un sentiment de sécurité. Je me laissai porter par sa douceur, appréciant la chaleur de notre complicité, même si un léger malaise persistait en moi.

Irène !

— Oui, votre Altesse ! Elle se pencha légèrement vers moi pour m'écouter.

— Que feriez-vous si quelqu'un abusait de vous ?!?

Mes mots firent apparaître de l'étonnement sur son visage, mais elle me répondit quand même.

— Eh bien... Si le bien est rendu par le mal, il vaut mieux s'éloigner de la source du mal. Mais si partir est impossible, je m'assurais de rendre le mal que l'on m'a fait au centuple... Mais ce n'est que mon point de vue.

Je pris un moment pour digérer sa réponse. Sa franchise était rafraîchissante, et elle révélait une force que je n'avais pas toujours remarquée chez elle.

SOUMISEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant