chapitre III

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Les jours s'écoulaient lentement et rien ne changeait. Le roi Hagnus me renvoyait à chaque demande d'audience, c'en était insupportable. Durant ces jours, je me posais la même question en boucle : tout cela en valait-il la peine ? J'avais un peu peur de l'inconnu. À chaque demande d'audience, je sentais ma détermination vaciller. J'allais m'engager dans une lutte à la victoire incertaine ; je ne pouvais compter sur personne à part ma propre volonté. Une partie de moi me disait de renoncer, que l'avenir n'en serait que pire si je continuais, tandis que l'autre me chuchotait qu'il n'y avait pas de réussite sans échec.

Ajoutant à mes doutes, ce jour approchait à grands pas : il ne restait plus que deux semaines avant ma rencontre avec le cardinal. Une fois par mois, je devais lui rendre visite en toute discrétion. Ces rencontres me laissaient un goût amer dans la bouche, un mélange de résignation et de mépris. 


En me préparant pour cette rencontre, je sentais une boule dans mon ventre. Je ne voulais pas devenir la marionnette d'un homme avide de désirs , mais en même temps, je savais que je n'avais pas beaucoup de choix. C'était à moi de naviguer dans cette marée d'obligations et de mensonges. Je me regardai dans le miroir, cherchant une lueur de détermination dans mes yeux.


La semaine passa comme un mauvais rêve, chaque jour pesant un peu plus sur mes épaules. Pourtant, au fond de moi, une petite voix me disait de tenir bon. Une fois devant le cardinal, je devrais être forte. Si je devais avancer dans ce monde complexe, il me fallait un plan.


Je quittais le palais sans informer personne, disant à Irène que j'étais dans ma bibliothèque et que je ne voulais pas être dérangée durant toute la journée. J'avais l'habitude de m'enfermer dans des endroits, que ce soit ma chambre ou la bibliothèque, alors personne ne se questionnait. Le cardinal envoyait quelqu'un m'attendre avec une calèche devant une petite entrée réservée aux domestiques à l'arrière de mon jardin. C'était toujours le même schéma, et rien ne changeait. Je priais toujours pour que les cieux s'effondrent lorsque ce jour approchait. C'en était à un point où je ne pouvais plus compter combien de fois il avait profité de moi, combien de fois je rentrais en pleurs et à quel point je me sentais salie. À chaque pensée, mes doutes se renforçaient, et je sentais la terreur m'envahir. Je n'avais aucune idée de comment éviter ma rencontre avec lui.


J'étais encore perdue dans mes pensées lorsqu'on toqua à ma porte.


— Entrez ! dis-je.Irène entra dans la chambre en prenant soin de refermer doucement la porte derrière elle.

— Votre Altesse ! Les rénovations dans votre chambre sont presque terminées. Il ne reste plus qu'à faire un peu de ménage, et vous pourrez vous y installer à nouveau. Aimeriez-vous voir ce qu'il en est ?


À force de passer mon temps à réfléchir, j'avais presque oublié ma chambre. Sans perdre de temps, je suivis Irène en direction de celle-ci. Je sortis de la pièce où j'étais, traversai le palier pour me rendre dans la pièce située juste en face.En entrant, l'odeur du tapis recouvrant les murs agressa mes narines. À peine franchis le seuil de la pièce, je fus submergée par un mélange d'étonnement et de ravissement.


Le tapis, jadis gris et lourd, avait pris une teinte d'un blanc éclatant, illuminé par des ornements dorés qui dansaient sous la lumière.  Mon ancien petit salon, étouffant et terne, avait cédé la place à un espace vaste et radieux, où l'air semblait vibrer d'une nouvelle énergie.

SOUMISEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant