Chapitre 11

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  Les paroles de Jaden tournent en boucle dans ma tête.
  Voilà quelques jours déjà, qui se sont écoulés, depuis mon altercation avec ce crétin.
Jaden m'énerve tellement. Mais il m'énerve aussi car certaines choses qu'il dit sont vraies. Cependant l'entendre me le dire, que ça vienne de lui, c'est qui me rend encore plus folle de rage.
Je tente malgré tout de reprendre le cours de ma vie, comme si rien ne s'était passé.

  Je m'apprête à sortir, quand je découvre Jaden, sur le pas de la porte.
Il est tout vêtu de noir, à croire que c'est la seule couleur qu'il possède dans les vêtements.
Je dois quand même avouer que ça lui va bien, malgré tout.

Jaden : Salut, dit-il froidement.

Moi : Salut, dis-je en employant le même ton.

  Je me demande ce qu'il fiche ici. Mais étant donné comment nous nous sommes quittés la fois dernière, je me doute que sa visite n'a rien à voir avec moi.
Je compte partir, quand il me retient par le bras.

Jaden : Tu n'es pas obligée de partir parce que je suis là.

Moi : Tu te crois le centre de mon monde pour dire des conneries pareilles ?

  Jaden me regarde de haut en bas, comme s'il évaluait ma tenue.
Bordel, pourquoi son regard me déstabilise autant ?
Que ça m'énerve !

Jaden : À toi de me le dire, Vomita !

  Encore ce satané surnom ! Un jour je vais lui vomir dessus, et il va pouvoir m'appeler ainsi pour une raison valable.
Mais je préfère l'ignorer, ce serait lui donner de l'importance inutilement.

Moi : Bouge de mon chemin !

  Je le pousse, et pars précipitamment, ne voulant plus le voir dans mon champ de vision.
Je le connais à peine, et pourtant ce type me fait passer par toutes les humeurs qui existent.
Il me rappelle sans cesse que j'ai des émotions, et je déteste ça. Elles ne font qu'exacerber et nourrir mes faiblesses, mes fragilités.
Elles me rendent stupide.
En somme, tout ce que je déteste.
C'est pour ça que je le déteste autant.
Toutefois, il m'arrive de le tolérer à certains moments.
Mais je doute que je puisse le tolérer de nouveau après les propos que nous nous sommes échangés.

*

  Quand j'ai besoin de prendre de l'air, je viens toujours au même endroit.
Je viens au bord d'un lac, où Josh m'emmenait fréquemment. C'était notre endroit à nous. Et quand la mort s'approchait de plus en plus de lui, il m'a dit que cet endroit serait bientôt qu'à moi. Enfin, si je puis dire ainsi.
Quand je suis ici, j'ai l'impression qu'il est encore avec moi comme au bon vieux temps.
Mais il n'est pas là.
Je suis seule, me rappelant d'une présence à laquelle je ne vais plus avoir le droit.
Je suis terrifiée à l'idée de vivre sans lui. Je n'arrive toujours pas à croire qu'il n'est plus là. C'est comme si j'étais dans un cauchemar et que j'allais le réveiller.
Bien que je ne me réveille jamais.
J'attends toujours son retour.
Mais en vain, puisqu'il ne reviendra jamais.
Et je dois m'habituer à son absence et à cette nouvelle souffrance.
Je le déteste dans un sens, il m'a habitué à sa présence, qui m'a été retirée trop tôt.
Bien que malgré tout, nous sommes jamais réellement prêts à perdre une personne à qui on tient.
  Je m'assois et mes pieds flottent au-dessus de l'eau. Je vois mon reflet à travers le lac, mais je détourne aussitôt les yeux.
Depuis mon enfance, je ressens comme si je n'avais pas de réelle identité. Même à travers un miroir, je n'arrive pas à me reconnaître telle que je suis.
C'est pour cela que je n'ai jamais aimé les photos non plus. J'en faisais uniquement pour faire plaisir à mon oncle. Il disait que c'était le moyen d'avoir des souvenirs, au cas où notre mémoire défaillait, ou pour nos proches, si l'un d'entre nous, venions à quitter ce monde.
Il avait raison. Maintenant je regrette de ne pas avoir fait plus de photos. Mais maintenant c'est trop tard. De plus, des photos ne peuvent pas combler le vide que l'on ressent à la perte de quelqu'un à qui l'on tenait.
Toutefois, les photos étaient aussi pour moi, que je puisse accepter qui j'étais. Malheureusement, bien qu'il ait fait de nombreux miracles avec moi, comme me rendre la vie plus belle, il y a certaines choses qui resteront encrées en moi jusqu'à mon dernier souffle.
Mais je ne cesse intérieurement de le remercier pour le bien qu'il a généré en moi. Je ne lui ai pas assez dit, mais j'ose espérer qu'il le savait.
Du moins, c'est ce que Jenna ne cesse de me dire.
Alors je préfère la croire, pour mon propre bien.

  Nostalgique, je pense à mon oncle, les yeux rivés sur l'eau.
Je me retourne rapidement, entendant des pas venir un peu trop dans ma direction à mon goût.
Il faut croire que j'ai bien fait, puisque je tombe sur ce satané Jaden.

Moi : Je vais vraiment finir par croire que tu me pistes ! Quoi ? C'était un lieu où tu venais avec mon oncle aussi ?

  Je n'espère pas. Mon oncle disait sans cesse que c'était notre repère secret. Et que je devais venir ici, pour me rappeler de nos merveilleux moments, tous les deux.
Ce serait donc pour moi une forme de trahison s'il venait avec Jaden ici aussi. C'est peut-être extrême, mais c'est ce que je ressens.

Jaden : Ta tante m'a dit où te trouver.

  Génial, merci Jenna ! Je me demande pourquoi elle a fait ça.

Moi : Tu es venu pour quelle raison au juste ? T'as pas fini de me cracher ton venin ?

Jaden : Attends t'es sérieuse ? Tu oses me dire ça après que ...

  Jaden me parle sur un ton dur mais il ne finit pas sa phrase, comme s'il s'interdisait de poursuivre, car il ne fallait pas que je sache la suite.

Moi : Mais je t'en prie, porte ce que tu es censé avoir dans le pantalon et dis-moi ce que tu veux me dire ! Aller que l'on en finisse une fois pour toute de ces querelles. Sors ce que tu as à sortir, et disparais !

Jaden : Bordel, mais t'as pas idée à quel point ta personnalité exécrable m'exaspère !. Je me demande ce que je fiche ici, à perdre mon temps pour rien.

Moi : Étrange, je me posais la même question ! Mais si tu ne sais pas, je ne peux pas répondre à ta place Einstein !

  Je me lève, puis m'essuie les parties qui ont été en contact avec le sol.

Moi : Bref ! Faut croire que tu viens toujours me déranger, alors moi je me tire !

  Évidemment, c'était trop beau pour que cela soit vrai. S'il est venu, ce n'est pas pour me laisser partir aussi facilement. Il compte vraiment me faire chier, c'est pour ça qu'il me barre la route quand je veux partir.

Moi : Tu veux quoi Jaden ?

Jaden : C'est bien la question que je me demande depuis tout ce temps. Qu'est-ce que je veux d'une petite peste aigrie dans ton genre ?

Moi : T'es venu de nouveau me provoquer ?

Jaden : Je ne suis pas venu pour ça !

Moi : Alors c'est quoi ta raison ?

Jaden : J'en sais rien, d'accord ? Tout ce que je sais, c'est que j'allais mieux avant de te connaître ! Grâce à ton oncle, j'osais avoir un futur stable. Savoir que ma vie ne serait plus un tel bordel. J'étais trop con pour y croire, faut penser, car maintenant ...

  Les paroles de Jaden sont rapides, qu'il ne respire pas.
Il semble énervé mais à la fois, on dirait qu'il parait presque ... désespéré.

Jaden : Maintenant ... je ne sais pas ce qu'il m'arrive avec toi. Je sais que tu m'énerves, tu m'agaces. Mais en même temps, ça m'agace encore plus de ne pas te parler, de ne pas me chamailler avec toi. Ça m'agace de ne pas savoir à quoi tu penses. Ça m'agace que tu me perturbes autant. Ça m'agace de penser à toi. Et ça m'agace encore plus car je n'arrive plus à me retenir de faire ça.

  Jaden s'avance vers moi, trop rapidement à vrai dire, car je n'ai pas le temps de réagir lorsque ses lèvres se collent sur les miennes.

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