Chapitre 8 - L'Ardente Kelna

3 1 0
                                    

— D'Or ? demanda Adriel.

— Tes yeux, Izara. Tu verras plus tard, répondit Hayden avec un sourire. La colère te va bien, tu sais.

Il ne masquait pas le fait qu'il était impressionné par la jeune femme.

— Tu m'as fait sortir de mes gonds pour déclencher je ne sais quoi ?

— Précisément. Tu as quelques talents primaires, en réalité. Celui-ci en fait partie. Je suppose que les émotions fortes, quelles qu'elles soient, permettent quelques fuites... 

— Je ne comprends pas... Le sceau n'est pas levé...

— Certes. Mais tu as à présent conscience des choses.

— Que faisons-nous maintenant ? demanda Adriel.

Elle se tenait debout, les rayons du soleil caressant son visage. Elle fut contrainte de placer une main devant ses yeux, formant protection contre l'éclat de l'astre du jour. Ses cheveux flottaient au vent, l'astre de feu embrasant les reflets cuivrés de sa chevelure. Elle observait Hayden, attendant qu'il tranche. Elle ne comprenait pas encore pourquoi il avait agi de la sorte, mais la douleur de sa blessure la poussait à remettre ses réflexions à plus tard.

— Nous avançons. L'Ardente n'est plus très loin.

Adriel inclina légèrement la tête sur le côté.

— L'Ardente ?

— La ville de Kelna. C'est une ville cosmopolite où nous allons pouvoir faire le point et préparer la suite. Accessoirement, c'est la ville au sein de laquelle résident nos monarques, Izara. C'est chez toi.

Adriel fit vite le rapprochement avec son impression de déjà-vu. Cette ville abritait une part d'elle-même, de son histoire. De tout ce qui était encore tu en elle. Elle était effrayée, mais au fond la curiosité l'emportait.

— Allons-y ! décida la jeune femme.

Si elle restait là, ses pensées allaient prendre le dessus, et l'inquiétude aussi, inévitablement.
Hayden portait le sac sur son dos et avançait en direction de la ville. Adriel le suivit de près, autant que possible avec sa blessure. Elle n'était pas si vilaine, une simple estafilade douloureuse. Ses pensées dérivaient vers ce qu'il s'était passé quelques minutes plus tôt. Ils étaient dans le bosquet puis en un clin d'œil ils avaient été transportés ici. Elle tenta de forcer sa mémoire à lui donner plus d'informations, sans succès. Aussi loin qu'elle s'en souvenait, jamais un tel événement ne s'était produit. En réalité, elle avait normalement une bonne maîtrise d'elle-même. Elle leva les yeux vers le ciel. Au vu de la course du soleil, il était midi passé. Le soleil cognait sur le chemin de terre. Il faisait bien plus chaud qu'à Azmar. Adriel suait à grosses gouttes. Une violente migraine faisait son chemin sous son crâne depuis qu'elle avait utilisé un talent, la poussant à faire une pause. Hayden se retourna. Sans lui poser la moindre question, il déposa le sac sur le sol et en extirpa une outre d'eau. Adriel but goulûment quelques gorgées.

— Merci.

— Faisons une pause et mangeons, déclara Hayden.

Un olivier faisait de l'ombre à deux rochers. Les deux jeunes gens s'y installèrent et avalèrent de la viande séchée et du pain. Adriel appréciait cette pause bienvenue même si le repas en lui-même était peu plaisant. Elle était bien trop habituée aux petits plats de ses parents.
Ses jambes commençaient à lui faire mal. Elle avait l'habitude de marcher, mais les récents événements avaient été éprouvants, autant pour son corps que pour son cœur. Elle se résolut à ne pas penser à ses parents. Elle n'était pas seulement peinée, elle était également en colère après eux, et Hayden. De concert, ils avaient décidé pour elle. Frustration et trahison se battaient pour avoir la première place. À cause de ce scellement, elle avait perdu un temps précieux, qu'elle ne retrouverait probablement jamais. Et aujourd'hui, elle se retrouvait avec des talents incompréhensibles ou profondément enfouis dans sa mémoire, alors que, peut-être, elle aurait pu éviter la catastrophe chez Gelpe. Elle se fit violence pour cesser d'y penser. Elle allait fondre en larmes, et dans l'immédiat ce n'était pas une bonne idée. Elle pourrait s'effondrer plus tard, quand elle serait seule.
Hayden remballa leur déjeuner sans un mot puis ils reprirent la route.

D'Or et d'AzurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant