J'avais mis à profit ce laps de temps pour faire des changements dans ma vie, j'avais décidé de quitter le dernier « homme » avec lequel je m'enfermais dans le même schéma du manipulateur narcissique qui traumatisait sa compagne.
Victime, je ne l'étais plus, je ne le serais jamais plus.
De cette relation, j'en ai retiré une grande force, même si elle s'ajoutait à tout ce que je vivais pendant cette période.
Elle m'a maintenue debout, car après tout il n'y avait rien de pire que d'être séparée de mes enfants. Mon raisonnement était le suivant : si je pouvais combattre et endurer cette relation, le reste me semblait plus facile.
Plus il me maltraitait (psychologiquement), plus je prenais de la force. Un brin masochiste ? C'est sans conteste. Mais je devais surtout comprendre le processus dans lequel je m'enfermais, je devais aller jusqu'au bout de cette histoire pour mettre un terme à ce tourbillon de mauvais choix.
Pour cela, j'avais dû faire souffrir une autre personne : il était gentil, attentionné et doux. Mais il était arrivé trop tôt dans ma vie, du moins je le croyais à ce moment-là. Avec du recul, je pense qu'un message m'était adressé : le meilleur restait à venir. J'avais donc choisi de terminer avec l'autre. Il était fort à parier que j'allais le regretter si au moment où j'allais me rendre disponible, cet ange gardien ne l'était plus.
Je me suis donc dégagée de ma relation toxique, c'était un soir comme les autres. Il y avait eu d'abord des échanges de messages qui n'avaient ni queue ni tête, Puis il est rentré, nous étions chez lui, il avait recommencé ses insultes, ses menaces, ses insinuations d'illuminé par la méchanceté.
Comme d'habitude, j'avais essayé de me défendre, de lui faire entendre raison et puis d'un coup je me suis tue. Je le regardais gesticuler comme un pantin désarticulé, il avait presque la bave aux lèvres comme un chien qui a la rage. Et enfin, la question fatidique m'est venue : « Qu'est-ce que je fous là ? ».
Dans un calme absolu, j'ai pris mon sac qui contenait ma brosse à dents. Depuis un moment, je ne laissais plus aucune de mes affaires chez lui, je me préparais au final. J'ai mis ma veste, nous étions le 26 juin et les soirées étaient fraîches. Je suis partie en lui disant : " Cette fois, je ne reviendrai pas". Il m'a répondu : "Demain matin, tu seras là, comme d'habitude. Amène les croissants et les pains au chocolat".
Je suis montée dans ma voiture, d'un calme incroyable, j'ai fait demi-tour. J'ai laissé sa maison. Je l'ai laissé lui aussi, derrière moi, sans même un regard en arrière sur ce que je quittais.
N'habitant pas très loin, je suis vite arrivée devant chez moi, j'ai laissé exploser ma colère en frappant sur le volant et en pleurant tout ce qui pouvait me rester à expulser de cette relation toxique et des autres passées.
Bien sûr, des messages d'insultes s'ensuivirent, de supplication, de chantage, mais je n'ai jamais plus craqué. Je me sentais légère, libre d'un certain côté, parce que je savais que j'avais encore un bon bout de chemin à parcourir.
Et puis le lundi suivant, c'était jour de marché. Je l'ai vu, l'ange gardien qui avait voulu entrer dans ma vie, peut-être encore un signe. Ça n'était clairement pas avec plaisir qu'il m'avait aperçue, je discutais avec une amie, il descendait la grande rue torse nu et j'avoue avoir eu un sacré coup de chaud. Je me suis vite refroidie quand il a tourné la tête vers moi, ses yeux luisaient comme deux billes noires. J'avais pu remarquer sa mâchoire se crisper. Il avait détourné le regard et continué sa marche.
Un frisson glacé m'avait parcourue des pieds à la tête, j'étais blessée comme je l'avais blessé. J'avais été envahie par une profonde tristesse, puis autre chose, que je n'avais pas réussi à définir à ce moment-là. Ça me faisait de plus en plus mal, je ne comprenais pas pourquoi. Il fallait que j'en aie le cœur net, je lui ai donc envoyé un message.
C'était triste qu'on en soit arrivés là, qu'avec ce que nous avions partagé nous ne pouvions pas devenir des étrangers, encore moins nous détester. Comme le hasard fait toujours bien les choses, il m'avait répondu qu'il travaillait sur le haut du village, que si je voulais le voir je n'avais qu'à monter. Je lui devais au moins ça.
Sur le trajet j'avais réfléchi aux excuses que je pouvais lui faire, que j'étais loin de pouvoir imaginer le mal que j'avais pu lui faire, et à quel point je m'en voulais. J'étais décidée à rester solide, droite et honnête.
Je suis arrivée à l'adresse de son chantier, il était presque midi. Il m'avait ouvert et son visage n'était pas aussi fermé que je m'y attendais. Les quelques secondes qui ont suivi, je m'en étais plutôt bien sortie. Et les larmes sont montées, la vérité est sortie de mes lèvres en même temps que la stupeur m'envahissait. Il écoutait, il entendait que j'avais besoin que l'on reste au moins amis. Que j'avais besoin de son aide parce que j'avais terriblement peur d'avoir un moment de faiblesse et de retourner avec l'autre, que j'avais besoin de sa force, que j'avais besoin de lui tout simplement !
Il a pris mon visage entre ses mains, ses lèvres ont approché les miennes et nous nous sommes embrassés tendrement et goulûment. Je me souviens de cette chaleur qui m'a envahie toute entière, je m'en souviens parce qu'elle m'envahit encore à chaque fois qu'il m'embrasse.
Nous sommes redescendus vers le centre du village ensemble, main dans la main. Je n'avais plus peur, je me sentais légère. J'avais cet homme qui tenait ma main et mes enfants qui rentraient enfin à la maison dans quinze jours.
Ma vie me paraissait si belle, j'avais tellement de mal à mesurer ma chance.
Sur le retour, il m'a demandé si je voulais que l'on garde nos mains l'une dans l'autre, ou si je voulais que l'on reste discrets. Je ne voulais plus de discrétion, plus de cachotteries, je voulais que tout le monde sache que c'était lui, que notre histoire soit officielle comme elle le méritait.
Je voulais montrer au monde entier que j'étais heureuse.
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N'oublie pas de sourire tome 2 - La descente aux enfers
Non-FictionAprès une rude bataille, Céline récupère ses enfants sous les visites de nouveaux travailleurs sociaux. De manipulations psychologique, en faux témoignages des services sociaux, elle garde espoir. Accablée, elle va puiser sa force dans l'amour de se...