L'Étranger (Chp 2 -1)

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Tandis que l'heure de la fermeture approchait à grand pas, elle fût tirée de ses sombres pensées par une petite voix soufflée qui la salua avec sérénité...

Phénix leva à peine les yeux de son livre, pour rendre son sourire à l'inconnu. Ce dernier traîna des pieds dans la petite allée, entre deux étagères vétustes, mais sans vraiment prêter attention aux diverses marchandises.

Les mains dans le dos, il jetait quelques coups d'œil discrets en direction de la jeune femme, à travers une ribambelle d'objets de décorations. Ses petits yeux plissés ne laissaient transparaître aucune émotion. Un frisson parcourut la colonne de Phénix, et elle retira enfin le casque qui trônait au-dessus de sa tête et l'on pouvait à présent entendre la musique à plusieurs mètres.

Elle était intriguée par ce client qu'elle n'avait jamais vu auparavant. Il était vêtu d'un costume très chic et plutôt sobre, ainsi que d'un nœud papillon et d'une Fedora, laissant apparaitre une longue tignasse grisonnante. Ses pieds étaient illustrement chaussés et ses mains étaient si couvertes de bijoux qu'on ne percevait presque plus son arthrose des doigts. Il ne venait manifestement pas d'ici.

Le cœur de Phénix s'emballa. Sa poitrine se contracta et, prudente, son premier réflexe fut de plonger discrètement la main à l'arrière de son dos, et de s'assurer que son arme était toujours en position. Elle n'osa — pour la première fois — pas s'approcher de son client. Quelque chose en elle lui hurlait de se méfier de lui. Elle se racla la gorge, avant de se pencher légèrement en avant, et de bafouiller de l'arrière de son comptoir :

— Bon... jour ?

Il resta là, d'un calme angoissant et apaisant à la fois. Il se dandinait d'une drôle de façon, de droite à gauche, laissant traîner ses yeux de part et d'autre de la pièce, sans réellement faire preuve d'un grand intérêt pour quoi que ce soit. Il finit par déposer sa canne au pommeau doré sous son aisselle, et s'avancer lentement vers Phénix. Cette dernière resserra sa poigne autour du manche de son Glock. À quelques centimètres à peine de Phénix, il souffla ces quelques mots :

— Vous êtes surprenante.

— Je vous demande pardon ?

— À ce que je vois... Vous savez lire ! Bien belle qualité. Rare par les temps qui courent. Surtout de ce côté du rempart.

— Oh et bien... Ce n'est pas grand-chose. L'homme qui travaillait ici était un adepte de la littérature. C'est grâce à lui que je sais lire et écrire. Mais j'ai... encore beaucoup de choses à apprendre.

— Intéressant... Et... J'imagine que vous avez de la famille ? Un entourage quelconque ?

Le cœur de Phénix se serra, et l'émotion faillit l'emporter à l'écoute de ces paroles. Un goût amer lui traversa le palais, la forçant à déglutir. Une boule lui compressait la poitrine, comme si l'on enfonçait une poutre en son intérieur, et elle grimaça, les yeux rouges. Elle finit par se ressaisir et répondit d'un ton sec :

— En quoi cela vous regarde ?

L'homme, pas le moins vexé du monde, fit mine de ne pas avoir entendu. Il continua dans sa lancée :

— Vous m'avez tout l'air d'avoir un caractère féroce, jeune fille !

— Il y a des questions qui se posent, et d'autres non. Notamment lorsque l'on fait face à une inconnue, répondit-elle du tac au tac, maintenant son menton en l'air et essayant de ne pas prêter attention à son rythme cardiaque élevé.

— Certes, je vous l'accorde. Mais, c'est ainsi. Parfois, il ne vaut mieux pas s'attarder sur certains détails, mais plutôt constater les éléments dans leur globalité. Je ne faisais pas preuve de curiosité, mais plutôt d'intérêt.

Phénix et le dernier Dragon - Tome 1, L'Éveil d'Yldren.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant