Chapitre 10 : Soirée 2/3

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Une coupe de champagne dans nos mains, nous sommes désormais dans une salle remplis de personnes provocantes, friquées et arrogantes. Ce ne sera pas difficile de se fondre dans la masse. Toujours proche de mon époux, ce dernier prend un petit four. Il me le présente mais je refuse de manger durant ma mission. Dans les couloirs du congrès, quelques parures et bibelots sont au milieux de la foule, sur des présentoirs et piliers blancs d'un style grec. En son centre, une salle de bal est entouré par des traiteurs aux mets savoureux, mais qui ne me donne pas l'eau à la bouche. Un verre de champagne suffira. Les serveurs défilent avec une main dans le dos, et la scène qui domine la grande salle accueille un groupe de jazz et bientôt, le discours du chef. Liam.

Je t'attends sale enfoiré.

Des guirlandes de lumières inondent cet endroit, avec un haut plafond blanc de presque cinq mètres. Tout est pensé pour passer une agréable soirée. Les dons doivent se réaliser au fond de la salle. Quand ils vont voir que notre couple n'a rien donné, ils ne vont pas rire.

— Un deux, un deux, vous m'entendez ?
— Toujours Dan, réponds-je entre deux gorgées de champagne. Tu en es où ?
— Toujours en train de contrôler les caméras extérieurs. Si je touche à ceux interne au congrès...
— ... Oui, ils vont savoir que c'est louche et Liam ne se montrera pas, confirmé-je.

Evan, dans son rôle, souris à quelques regards féminins.

— Tu veux déjà me tromper chéri ? Questionné-je en le fixant.

Je rencontre ses yeux sombres qui me détaille. Je n'ai absolument pas chaud aux joues.

Il m'en faut plus.

— Je t'ai pas dit mais tu es la plus magnifique créature que je vois ce soir.
— Dit-il en me comparant sûrement aux autres. Tu n'es pas au marché.
— Tu es jalouse mon cœur ?

Son sourire en coin m'agace. J'ai toujours autant envie de le tuer.

On s'avance vers le buffet mais ça ne me permet pas de balayer au mieux la salle à la recherche de ma victime.

Evan mange encore une verrine, je le fusille du regard en faisant attention à ce que personne ne nous voit.

— Je dois me mettre à un angle pour contrôler les allers et venus. Alors arrête de t'empiffrer.
— Grossière erreur, tout le monde remarquerait qu'on ferait office de "plante". C'est louche. J'ai mieux.
— Comme quoi très cher, grognai-je avec sarcasme.

Sans me donner son plan direct, il pose sa verrine vide et me prends la main. Il m'amène au centre de la piste et se penche vers moi.

— Le meilleur moyen de découvrir les personnes autour de toi, c'est de danser.

Il me tend sa main, que je saisis sans réfléchir. Il avait raison. Il marque un point mais je ne le lui dis pas.

Par contre, son corps se rapproche dangereusement du mien et ça devient étouffant. Ma respiration se bloque quelques secondes, alors que mes yeux se relèvent vers un Evan qui est très sérieux. Aucun trait ne définit une nouvelle plaisanterie.

C'est ça que je veux. Jouer son rôle et sa mission à la perfection.

Mon bras sur son épaule, il saisit mon autre main pour la serrer doucement alors qu'il a marqué un point d'ancrage entre ses yeux et les miens.

On a l'air d'un vrai couple non ? C'est le but de la manœuvre.

Je suis ses pas qui sont d'une extrême précision. Je relâche mes poumons, en détournant enfin son regard de braise. C'est pour le rôle. Il joue très bien.

— Alors tu sais danser..., soufflai-je avec dépit.
— Tu ne me connais pas, je t'avais dit que j'avais certaines capacités.
— Et tu sais aussi manger avec tes pieds ?

Il rit. Un petit rire qui me détend. Il reprends cependant son sérieux. Il me fait tournoyer avant de reprendre nos positions initiales.

— Tu as vu quelqu'un ?
— Tu me fais tourner trop vite.

Après réflexion...

— Ta question était sérieuse ?
— Non.
— Je m'en doutais.
— Le cousin de Liam est entré, déclare Dan dans nos oreillettes.

Je me tends et je manque de marcher sur le pied gauche d'Evan. Depuis quand son cousin doit venir ? Heureusement, nous savons à quoi il ressemble grâce aux photos des dossiers. Même Evan sait qui c'est, s'il a appris sa leçon par cœur.

Ce dernier a sûrement sentis mon stress alors il me rapatrie dans ses bras. Cette proximité m'empêche vraiment de réfléchir correctement. Concentre-toi bordel !

J'entoure mes bras trop naturellement autour de son cou. Près de son épaule, je peux enfin balayer la salle du regard. Calem, le cousin de Liam était présent à cette soirée... Je devais me rapprocher de la famille. C'était une main tendue du ciel.

— Pourquoi tu stresses autant, me questionne Evan.
— C'est toi qui me stresses.
— J'en conclus que je te fais tourner la tête.
— La tienne va atterrir au sol si tu n'arrêtes pas tes insinuations douteuses.

Sa main qui était au creux de mes reins remonte vers ma nuque. Ma peau brûle à son contact. Je dois y mettre fin, maintenant. Ça urge.

— N'en profites pas pour me toucher Evan...
— On est un couple, des danseurs nous regardent on doit montrer que l'on profites de la soirée. Et non pas qu'on se crispe à parler de notre mission. J'essaie de te faire relativiser.
— C'est perdu.
— Je vois ça.

Il se détache de moi et ses yeux s'imprègnent des miens.

J'ai envie d'une clope. Tout de suite !

— Tu ne sais pas faire deux choses à la fois, m'affirme t-il avec son rictus de merde.
— Lesquelles ?
— Être en mission et t'amuser.
— Il n'y a pas de place pour l'amusement. C'est pour les enfants.

Ses sourcils se froncent. Je ne vois pas la question arriver.

— Depuis quand tu as cessé d'être une enfant ?

Ma bouche entrouverte, mon cœur manque un battement. Je ne sais pas comment m'exprimer. Quoi dire ? Quoi rétorquer ?

"N'aie pas peur
Ne crie Pas
Ne pleure pas"

Mon enfance...

Mes mains tremblent légèrement. Mon souffle est court, Evan le remarque. Il pose une main sur ma joue mais sa chaleur ne me procure rien d'autres que du feu sur ma peau lorsqu'il me maltraitait... Il me dévisage et mon regard se perd sur sa chemise. Il caresse la commissure de mes lèvres. Je fond, j'ai envie de laisser la crise m'envahir mais je me rappelle que je suis en mission. J'ai l'impression qu'Evan prononce mon nom mais ce n'est qu'un fin chuchotement.

Ce n'est que le passé.

Ce n'est pas réel.

Je sens le bras d'Evan me maintenir un peu plus fermement à la taille, comme s'il savait que j'allais m'effondrer s'il me lâchait.

Il balaye la salle. Je vois soudain sa mâchoire se contracter.

— Cousin à six heures, grogne-t-il avec dédain.

Comme un coup d'adrénaline, shootée à cette hormone, je reprends contenance, délaissant l'ombre qui commençait à me prendre dans ses bras. J'ai les mains moites. Et comme si la survit de cette mission était une priorité absolue, je réussis à me détacher de mon cavalier pour me tourner et marcher d'un pas assuré vers la famille de ma victime.

The Angels of DeathOù les histoires vivent. Découvrez maintenant