Chapitre 6 : Des émotions

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MORANA

Les mains sur les hanches, je fais les cent pas dans ma chambre. Les murs sont blancs, dénués de toute trace d'une présence ici. Je devrais peut-être songer à décorer cette pièce, mais je ne sais pas quoi mettre. Ainsi, cette pièce ne me ressemble pas, mais je me dis que c'est peut-être mieux ainsi. Qui sait ce qui pourrait m'arriver ? Je ne sais pas combien de temps je vais rester, même si j'espère rester là longtemps.

Mes yeux se portent sur mon portable qui vibre. Je sais déjà qui c'est, et honnêtement je ne sais pas quoi faire. Je m'approche et regarde l'heure : il est déjà vingt-et-une heure. En soit, je n'ai rien prévu demain. Alors qu'est-ce qui m'empêche d'aller rejoindre Carden et d'accepter l'invitation ? Celui-ci m'inonde de messages, ne sachant pas trop si je vais le rejoindre cette nuit ou non. Et même moi, je ne sais pas ce que je dois faire. J'en ai envie, mais une partie de moi me dit que ce n'est pas le moment de coucher avec lui. Je veux dire : bien sûr que je le veux, mais Carden est blessé. Il faudrait bien aller voir s'il va mieux, je ne l'ai pas vu descendre dîner.

C'est sur ce prétexte bidon que j'attrape mon téléphone et sors dans le couloir. A cette heure-ci bizarrement personne n'est là. Les lumières s'allument sur mon passage. Avant d'aller retrouver Carden, je décide d'aller à la cuisine et de lui apporter de quoi manger – et pour moi aussi d'ailleurs, je crois que les évènements de cette après-midi m'ont coupé l'estomac. Lorsque j'arrive à la cuisine, je trouve celle-ci vide. Etonnée de ne pas voir la tête brune de Zaria, je décide de moi-même me faire à manger. Après tout, cela m'arrange, ça me gêne qu'elle nous fasse tout le temps à manger alors que je peux me débrouiller seule. Je manie le fusil comme personne, je suis bien capable de me faire cuire quelques pâtes !

J'ouvre le frigo en m'attachant les cheveux en une queue-de-cheval haute. Ensuite, je farfouille à l'intérieur pour en ressortir de la salade, des tomates, un peu d'emmental et de l'avocat. Je prends un peu de beurre et de vinaigrette et pose tout sur le comptoir. Lorsque je me demande où se trouve le pain, un bruit attire mon attention. Je souris à Zaria en sortant ce que je cherche. Celle-ci me regarde avec étonnement.

— Que faites-vous ? demande-t-elle. Lâchez ça, je vais le faire !

— Ne t'en fais pas, Zaria, je peux bien me faire quelques sandwiches. Et je t'ai déjà dit que tu pouvais me tutoyer.

— Je... Tu en es certaine ? C'est mon travail, après tout.

Je lui souris en coupant le pain et en commençant à tartiner le beurre de chaque côté. Zaria ne bouge pas et me regarde faire, visiblement perturbée. En même temps, il n'est pas très tôt, cette femme travaille tout le temps. Je me demande même si elle dort tellement je la vois ! Je la vois encore plus que Karter, alors que ce-dernier est censé diriger cet empire.

— Certaine, dis-je. Et installe-toi, tu mérites bien une pause.

Zaria me sourit et s'installe face à moi. Je l'observe gesticuler nerveusement et constate qu'elle semble vouloir dire quelque chose mais se retient.

— Pose-moi ta question.

Zaria ouvre grand la bouche. Visiblement, elle ne s'attendait pas à ça. Je lui adresse un sourire pour l'encourager, me demandant si mon ton un peu sec ne lui a pas fait peur. Je ne veux pas que cette femme ait peur de moi : elle en a bien assez avec Zaiden et Karter qui sont très exigeants, et encore c'est peu de le dire. J'ai remarqué que ces-deux-là ne font presque rien par eux-mêmes. Pour la nourriture, ils demandent à Zaria. Pour le ménage, ils demandent à quelqu'un d'autre. Même pour les missions, c'est nous qui nous y collons et jouons nos vies pour leurs petits culs privilégiés. Je ne m'attendais pas à ça en venant ici.

Dark pain of soulOù les histoires vivent. Découvrez maintenant