Partie 3

64 6 11
                                    

Je me mets en route, pressé d'être rendu dans mon appartement. Quand je passe devant le piano public, il n'y a personne. L'ambiance n'est plus du tout ce qu'elle était plus tôt dans la journée. Je continue mon chemin et j'arrive rapidement chez moi.

Une fois dans mon lit, je repense à la pianiste. Melody. Elle m'intrigue. J'ai envie de savoir ce qu'elle a traversé pour que la douleur soit aussi marquée dans ses beaux yeux. J'ai besoin de l'aider. À la fin de sa chanson, quand elle est sortie de sa bulle et qu'elle a remarqué la foule de gens qui l'observaient, pourquoi est-elle devenue tant craintive? Se pourrait-il que ça ne soit que de la timidité?

Non, je ne crois pas. C'est plus que ça. C'est plus profond. Un traumatisme dont elle essaie d'atténuer. Peut-être que je me trompe. Peut-être qu'elle va parfaitement bien et qu'elle est juste timide. Ou peut-être que j'ai raison. Peut-être qu'elle a souffert. Je n'en saurai jamais rien. Avec tous les habitants peuplant cette planète, il y a peu de chances que je la recroise.

Pourtant, ce soir, c'est ce dont je veux le plus. La revoir. La connaître. J'aurais dû lui donner mon numéro de téléphone au moins. Là, je n'ai plus aucune chance de la revoir. Va-t-elle continuer à hanter mes pensées et m'empêcher de dormir comme elle le fait en ce moment? J'espère que non. Depuis quand, moi, le studieux et intelligent Loan se laisse déconcentrer par une fille? Ce n'est pas le moment, surtout avec les examens qui arrivent. Je dois me concentrer. Si je n'ai pas au-dessus de 90% dans mes prochaines évaluations, je peux dire adieu à l'argent que mes parents me donnent tous les mois pour payer ma scolarité. C'est la condition chez moi. Des bonnes notes, de l'argent. J'ai besoin de cet argent. Je ne pourrais pas payer mon école sinon, ni mon appartement. Autant l'un que l'autre coûte très cher. Mon job à temps partiel au centre psychiatrique ne subvient pas à l'école et l'appart, juste l'un des deux.

Évidemment, mes parents seraient plus qu'heureux de m'accueillir chez eux jusqu'à la fin de ma scolarité, mais ce n'est certainement pas une option pour moi. J'ai déjà dû passer vingt années de ma vie avec eux, hors de question que j'en passe une de plus. Les quatre années de semi-paix sont les meilleures que j'ai eues jusqu'à présent et j'espère que ça va continuer ainsi. Et ce n'est assurément pas une fille qui va changer ça. Pourquoi m'empêches-tu de dormir Melody?

***

« Dring! Dring! »

Non! Ce n'est pas déjà l'heure de me lever ?! Je me retourne en grognant dans mon lit et frappe avec ma main ce cadran de malheurs. Puis je plonge ma tête dans l'oreiller en continuant de grogner. Ah comme je déteste les lundis matin! Il n'y a pas pire horreur que se lever pour aller à l'école à sept heures du matin. Surtout quand tu t'es couché tard la veille!

Je me lève en trainant les pieds et me dirige vers la petite cuisine où je mets deux tranches de pain dans le grille-pain. Je pars la machine à café, le seul moyen pour moi de rester éveillé toute la journée. Mes toasts sonnent ce qui me sort de ma somnolence et je les beurre avec le beurre d'amande de ma mère. Cette recette de ma mère est pas mal la seule chose qu'elle fait que j'aime, avec le versement mensuel pour ma scolarité on s'entend.

Après mon petit-déjeuner, je finis de me préparer et me mets en route pour l'école. Certains matins Amira vient me chercher, mais elle n'a pas de cours aujourd'hui contrairement à moi et Kevin.

Amira et Kevin sont mes meilleurs amis. Je connais Amira depuis le primaire. Quant à Kevin, je l'ai rencontré dans ma première année d'université et depuis nous ne nous sommes jamais quittés. Nous sommes en médecine tous les deux, mais après les cinq années d'étude, je vais probablement me diriger vers la psychiatrie, alors que Kevin, lui, aimerait bien être médecin généraliste.

Piano publicOù les histoires vivent. Découvrez maintenant