La tempête Xena approche des côtes et devrait toucher la ville de Castel dans la nuit de demain. Les habitants se préparent à subir d'énormes rafales de vent ainsi qu'une pluie diluvienne. La plupart des infrastructures sont d'ores et déjà fermées jusqu'à ce que tout revienne à la normale. Les supermarchés, quant à eux, resteront ouverts jusqu'à ce soir, dix-huit heures, afin de permettre à tout le monde de faire des réserves...
Je coupe la radio d'un geste de la main. Simon avait raison, plus personne ne parle d'orage d'été mais bien de tempête, maintenant. Je décide de ne pas m'alarmer : le moment venu, je réintégrerai la chambre de mon frère.
En attendant, je suis complètement à l'arrêt dans mon entraînement. La piscine, comme tous les lieux notables de la ville, est fermée et je ronge mon frein. Plonger me manque terriblement et je traîne complètement, ça n'est pas du tout dans mes habitudes.
Je me distrais comme je peux. Pour l'instant, il fait grand soleil alors je suis en train d'étendre mon linge devant l'entrée. J'ai profité de l'absence de Clément pour utiliser la machine et, même si la plupart de mes vêtements sont des survêtements de sport et des maillots de bain que je n'utilise pas depuis plusieurs jours déjà, j'ai l'impression de me rendre utile.
J'entends la voiture de Clément pénétrer dans l'allée et une décharge d'angoisse traverse mon corps. Reste naturelle Lila, me dis-je à moi-même. Tu parles...
Quelques secondes plus tard, sa voiture se gare à quelques mètres de moi et Clément en sort, les cheveux bruns complètement en bataille. Il porte un bermuda et un tee-shirt clair et, lorsqu'il ouvre son coffre pour prendre ses courses, j'entrouvre la bouche. Je ne me gêne même pas pour le regarder, c'est plus fort que moi. D'ailleurs, j'étends la même serviette depuis que j'ai entendu son moteur de voiture.
Je suis ridicule.
Tandis que Clément se saisit de ses sacs de courses et s'avance vers l'entrée, je fais soudainement mine d'être très concentrée sur mon activité. J'évite soigneusement de le regarder. Les bras surchargés de courses, Clément s'arrête devant la porte d'entrée et tandis qu'il cherche ses clefs, il me remarque enfin. J'aimerais pourvoir lui dire que la porte est ouverte puisque je suis là mais j'ouvre à peine la bouche qu'il me lance d'un ton sarcastique :
« C'est comme ça que tu prépares la tempête ?
- Tu vois une tempête arriver, toi ? Moi, tout ce que je vois, c'est un ciel très bleu et un soleil de plomb, arguai-je.
- Ne sois pas naïve, Lila. Les gens d'ici en ont vu et ils sont inquiets. Tu devrais faire attention.
- Quoi, en achetant du papier toilette par exemple ? Dis-je en désignant ses courses d'un signe de tête.
C'est un coup bas, je le sais, mais je ne peux pas m'empêcher d'être sur mes gardes avec lui. Clément soupire et me lance en se retournant :
- Fais comme tu veux. »
Je m'attendais à une joute verbale mais rien. Je suis presque déçue et, au fond, surprise que son indifférence me blesse. Peut-être qu'au fond, je préfère ses attaques à ses silences.
Je suis partie courir juste après que Clément soit rentré. Sa distance m'a fait mal et je n'arrive pas à l'admettre. Il faut que j'arrête de me voiler la face : je commence à ressentir quelque chose pour Clément. Je dois repousser ce flot d'émotion et je ne connais qu'une seule manière de le faire : courir.
Le ciel commence peu à peu à se couvrir si bien que, lorsque j'arrive sur la plage, il fait presque nuit alors qu'on est en milieu d'après-midi. D'ailleurs, la plage est déserte ce qui est complètement anormal : nous sommes en plein milieu de l'été.
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Cœur de sel
RomanceLila Quiver sera championne olympique. J'entends ça depuis que j'ai six ans. C'est ma raison de vivre, mon but ultime et je n'ai que ça. Pourtant, cet été va tout changer. Je vais revenir à Castel, là où tout a commencé. Là où tout s'est fini aussi...