Nous sommes tous en voiture, empilés dans le monospace. Tim y compris. J'ai essayé de protester : je ne vois pas l'intérêt de mettre mon petit frère en danger, quand c'est à moi de faire ce qu'il y a à faire. Serais-je la seule personne raisonnable dans le lot ? Mais ma mère préfère encore l'avoir sous les yeux plutôt que le laisser seul ou chez des amis. Ma grand-mère a, elle, argumenté en faveur de son courage : il nous a après tout sauvées du Lubris, Cynthia et moi. Oui, on a pu apprendre le nom de ce monstre dégoûtant. Les Lubris sont des démons magnifiques qui parviennent à séduire facilement leurs cibles, pour ensuite les dévorer. Ce qui a bien failli arriver à Cynthia.
— Tu sais que ça se passera très bien ? lâche Alex, d'un coup.
Assis comme possible entre les deux sièges arrière, dans le coffre de la voiture, il parle tout bas, comme s'il ne s'adressait qu'à moi.
— Très bien ? relevé-je. Tu n'as vraiment pas peur ? Si ça dérape, si je ne suis pas à la hauteur et que je gâche tout...
— Bien sûr que ça me fait peur, répond-il avec un petit sourire. Mais je suis prêt à essayer et faire de mon mieux. Ça vaut le coup de tenter.
Je ne sais même plus si on parle vraiment de notre devoir à accomplir très bientôt. Comme je tremble nerveusement, toute fébrile, il me saisit la main. Il observe avec un air un peu coupable mon poignet qui porte encore la trace de notre rixe, en passant son pouce dessus.
Le trajet me semble affreusement long, et à la fois bien trop court. Mon père se gare sur un parking, devant une vaste salle. Celle que le Cercle possède. Leur local de « théâtre ». Nous attendons un moment les autres, nos alliés. Nous entrons tous ensemble, mine de rien. Je ne suis jamais venue ici, à vrai dire, je suis donc ma famille, qui se dirige jusqu'à la grande pièce principale : un amphithéâtre. Je m'imagine facilement les réunions, avec les dix familles assises comme des étudiants devant un Hans Brückman vindicatif qui mène la danse. La pièce est vaste, et sombre à cette heure. Quelqu'un allume les lumières, qui clignotent avant de nous percer les rétines.
— J'aime pas venir ici, bougonne Tim. Je m'ennuie tout le temps.
— Qu'est-ce que vous faites ici ? crie soudain une voix, derrière nous.
Une voix qui me glace le sang. Que je connais trop bien. Reiner. On peut dire qu'il tombe mal, celui-là ! Entre ma trouille et sa sale tronche que je ne supporte plus, j'ai une subite envie de lui roussir le cuir ! Ça se ressent apparemment, car l'air semble crépiter autour de moi, mes parents se tournent vers moi immédiatement et ma mère essaye de me calmer avant que les choses ne dérapent vraiment.
— Et toi ? lance Alex avec agressivité. Tu n'as pas été radié ?
Reiner affiche une mine écarlate et furibonde.
— Suspendu, seulement, corrige Peter, arrivé à son tour. Mais la punition est levée. Les Dubois, eux, ont été radiés. Et toi, Alex, tu n'es qu'un civil. La Clé Pure, peut-être, mais pas un mage. Vous n'avez rien à faire là !
VOUS LISEZ
Les Clés
Paranormal« Ecris un journal, raconte ta vie, ça te fera du bien, nien nien nien ». D'accord, mais par où commencer ? Bon, je me lance, on verra bien ce que ça donne. Je m'appelle Mallory Dubois, j'ai dix-sept ans, et mon histoire n'a qu'un seul intérêt : ma...