Acte 1 - scène 2

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Cinq jours auparavant...

Il fait nuit noire. Tout le monde dort. Tout le monde, sauf moi. Je me retourne une énième fois. Je n'ai aucune idée de l'heure mais ce dont je suis sûr, c'est qu'il est tard. Je dois être éveillé depuis une petite heure. Et, je suis désespéré de ne pas dormir. Je décide enfin de me lever. Sans allumer la moindre lumière, je me dirige vers la cuisine. Soudain, des bruits de pas puis, au tournant, une lumière m'aveugle. Je parviens à distinguer les traits de Margot. Éblouis, j'attrape son bras gauche et le baisse vers le sol.

« On dirait que nous avons le même problème, je chuchote en désignant le verre qu'elle tient dans sa main droite.

— Bordel Mordred, tu m'as fait peur ! Un peu plus et j'allais crier ! Pourquoi n'utilises-tu pas de la lumière comme tout le monde ?

— Je connais cette maison comme ma poche. Pas besoin de lumière.

— J'ai oublié que tu es un chat sauvage...

— Eh oui. Je suppose que tu n'es pas prête à te rendormir ?

— Tu supposes bien.

— Suis-moi. Ah, et éteins cette lumière. »

Elle obéit et je lui tends ma main. Nous sortons de la maison silencieusement en priant les portes d'en faire autant. Nous ne parlons pas, elle sait où je l'amène. Nous dépassons les transats et nous avançons sur le ponton. La lune, magnifique, se reflète dans la rivière. Ici, nul besoin de lumière artificielle. Elle me lâche la main. Je m'assois sur le ponton et doucement, laisse mes jambes pendre dans l'eau.

« Comment tu peux y rentrer aussi facilement ? L'eau est gelée ! »

Tout en se plaignant, elle laisse, elle aussi, ses jambes glissaient lentement dans l'eau. Puis, elle pose sa tête contre mon épaule. Nous restons ainsi, écoutant le vent se faufilant entre les feuillages, observant les clapotis du lac et les reflets de la lune.

« C'est beau.

Elle l'a presque chuchoté. Et, j'eus l'impression de me retrouver avec Marin, sur la plage quelques jours plutôt, lorsqu'il a prononcé les mêmes paroles. Je ne peux m'empêcher de sourire.

— Ça l'est.

— Merci de m'avoir invité.

— Tu fais partie de la famille, rien de plus normal ! »

Un silence complice s'installe. J'attends, je ne veux pas briser la magie.

— J'ai besoin de toi, lui dis-je du bout des lèvres après quelques minutes.

— C'est évident. Si je n'étais pas là tu deviendrais un vieil ermite laissant le monde tourner sans lui !

— Et si je n'étais pas là, TU serais une pauvre adolescente typique en proie à des questions existentielles vivant dans un monde assombri par l'absence inconsciente du meilleur ami qu'elle n'a jamais eu.

— C'est sûr, ma vie sans toi n'aurait aucun sens. Franchement, qu'est-ce que je m'ennuierais sans tes conneries quotidiennes ! réplique-t-elle aussitôt.

— Qu'est-ce que ta vie serait fade sans moi !

— Les étoiles sont belles ce soir. Et si tu te taisais un peu pour me laisser les admirer ?

— Non, mais je te jure !

Faussement outré, je me laisse tomber. Allongé ainsi, sur le dos et les jambes pendantes, j'ai une vue imprenable sur le ciel ombragé. Les étoiles brillent tel des phares dans la nuit illuminant le ciel par leur présence radieuse. Margot, qui est tombée avec moi, se relève. Elle se positionne sur un coude et se tourne vers moi. Ses cheveux brillent sous la lune. Elle me regarde, un sourcil relevé d'un air « Sérieusement ? Tu es fier de ta connerie ? »

Au fil des saisonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant