8 - Aterrissage d'urgence

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Le jeune pilote conservait une parfaite maîtrise de lui-même et Jungkook, qui était resté dans le cockpit pour l'assister, était admiratif

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Le jeune pilote conservait une parfaite maîtrise de lui-même et Jungkook, qui était resté dans le cockpit pour l'assister, était admiratif. Chaïev était affalé, le dos appuyé au mur de la cabine, les jambes étendues.

La tour de Charm el-Cheikh avait réquisitionné une piste. Après avoir, sans difficulté, viré sur l'aile en plein ciel et parcouru une centaine de miles dans la tourmente, le pilote amorçait le processus de descente. En utilisant les trims - des commandes de vol associées au manche -, en contrant au palonnier les écarts de l'appareil, il parvint à maintenir le cap.

À l'intérieur de la cabine, les vibrations avaient cessé, mais les passagers percevaient que l'appareil volait sur une aile : un moteur manquant, sa puissance était moindre et il était davantage sujet aux secousses. L'hôtesse, sur ordre du copilote, avait annoncé en anglais puis en français :

_ Le commandant Park Jimin, suite à une avarie d'un des quatre moteurs, a décidé d'appliquer la procédure d'usage et de retourner à l'aéroport le plus proche, celui de Charm el-Cheikh, à cent dix-huit miles de distance. Le vol se poursuit sans incident, l'atterrissage devrait se faire normalement. Il vous est recommandé cependant de ne pas détacher vos ceintures.

Un silence impressionnant régnait maintenant. Tout le monde retenait son souffle. Deux femmes d'un certain âge qui voyageaient ensemble commencèrent à réciter, à voix haute, des prières. Le steward leur demanda, avec une autorité étonnante pour son jeune âge, de « cesser immédiatement de prier, ou alors à voix basse, pour leur propre compte ». Elles obéirent à l'injonction.

La dignité de tous impressionnait chacun et, si tout le monde avait peur, tout le monde gérait, comme il le pouvait, ce face-à-face possible avec la mort. Car les paroles rassurantes de l'hôtesse n'avaient pas convaincu : on savait ce que l'on pouvait craindre.

On dit qu'au seuil du grand saut, chacun voit défiler sa vie à la vitesse de l'éclair. On dit aussi que s'imposent à l'esprit les figures de ceux qu'on a aimés. Les passagers du vol GTI 705 de Blue Sky, entre ciel et mer, dans cette nuit opaque, allaient pouvoir témoigner que ces dires ne sont que des légendes.

Pour la plupart d'entre eux, ces quelques dizaines de minutes qui compteraient, leur vie durant, pour des heures, furent occupées par des souvenirs d'enfance. Des souvenirs heureux, de ceux qui confortent dans la certitude que la vie vaut d'être vécue.

Marie, serrée contre Emmanuel, évoquait ses jeux de petite fille, avec son amie d'enfance, Claire, quand elle passait ses vacances à la campagne, chez sa grand-mère. Elle avait encore en tête leurs secrets de fillettes délurées, dans la bouche le goût des madeleines et des cakes de la grand-mère, à fleur de peau les sensations toutes neuves que l'été apportait à profusion. Emmanuel, lui, se souvenait de la Vendée, de la lande où, avec ses cousins, il jouait à la guerre, il se rappelait le goût salé de la peau des filles qu'il embrassait dans les buissons.

Escale amoureuse - JIKOOKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant