Émo,
Ce, matin, je me lève avec difficulté. Mon père a encore eu la main lourde. J'ai tellement dû me retenir pour ne pas hurler mon désarroi, que j'en ai perdu conscience. Incapable de me souvenir du moment où je me suis endormi dans mon lit. Je ne cherche pas plus longtemps à comprendre. J' affronte une nouvelle journée d'école, en occultant les douleurs de mon corps. Dans la salle de bain, je remarque de nouvelles traces, mes poignets marquent la chaîne que mon père aime utiliser pour m'immobiliser lorsqu'il souhaite détruire mes ailes. Je ferme le verrou de la porte, pour éviter que mon père entre sans prévenir. Malgré la petite taille de la salle de bain, je déploie mes ailes pour les laisser respirer. Cela me procure un immense plaisir, avec mes ailes enfin libres, je suis entier, un secret que je tais pour éviter les foudres de mon paternel. Je rétracte mes ailes difficilement la mort dans l'âme. Mon rêve, voler librement et affirmer mon côté « ange ». Une utopie. Une fois mes ailes rangées, je file sous la douche. L'eau glacée réveille mon corps endolori. Je me refuse à utiliser l'eau pour éviter les coups de colère.
A la sortie de la douche, je m'essuie. Je sèche mes ailes avec le peu de plumes qu'il me reste. Vu que mon père me les retire une à une dès qu'elles apparaissent ce qui veut dire au moins deux fois par semaine. Une véritable torture que j'ai appris à endurer. Je récupère les bandages rangés dans le placards derrière moi, c'est le moment de bander mon corps pour plaquer au maximum mes ailes à mes omoplates, un exercice compliqué et surtout très dégradant. Je ne suis plus à ça près maintenant. Je vérifie que je suis bien serré, même si ma respiration est quelque peu entravée. Je grince des dents par une douleur atroce le long de ma colonne vertébrale. J'espère secrètement que je passerai la journée de cours sans grimace.
Je choisis soigneusement mes vêtements : un tee-shirt moule mon corps pour garder le bandage en place. J'enfile par-dessus une chemise bûcheron dans les tons bleu foncé et noir, bien large pour éviter d'apercevoir le profil disgracieux des proéminences de mes ailes. Un jean ample cache parfaitement le bas de mes ailes et une ceinture pour maintenir le tout. Je meurs de chaud, surtout fin mai, le temps se réchauffe de jour en jour mais je ne peux dévoiler davantage mon corps sans attirer l'attention sur mes malformations. Je supporte donc la chaleur, en attendant le retour de la fraîcheur d'ici six à sept mois. Une fois prêt je me faufile hors de la maison sans bruit. Aujourd'hui j'ai des difficultés à me mouvoir, les douleurs ne me laisseront pas tranquilles. La journée risque d'être très longue. Rapidement je quitte la terre des bannis, pour arriver dans le quartier huppé du royaume, je ne traîne jamais en chemin, je conserve la tête vers le sol pour passer le plus inaperçu possible. Mon sac à dos, sur l'épaule, je zigue zague parmi les nombreux passants. Enfin j'arrive devant le lycée. À l'entrée, j'aperçois celui qui illuminera une fois de plus ma journée « Lucas ». Mon cœur se réveille, surtout lorsqu'il tourne la tête vers moi, j'ai la sensation que ses yeux turquoises cherchent à capter mon âme, ce qui me met mal à l'aise. Habituellement Lucas ne pose jamais les yeux sur moi. Depuis hier quelque chose a changé entre nous. Lucas étire les lèvres dans un sourire enjôleur. Je baisse les yeux, j'accélère, passe devant lui sans oser le regarder et je file jusqu'à la classe où je me réfugie à ma place au fond près de la fenêtre et non loin de la sortie en cas de problème. J'ai toujours peur que mes ailes se déploient seules. Je sors mes affaires de mon sac à dos, prêt à commencer ma journée. Lorsque Lucas s'installe à mes côtés. Abasourdi je le fixe sans voix et il sourit.
- Adorable. Laisse t'il échapper.
Je détourne immédiatement le regard, mes joues sont en feu, la honte me submerge. Pourquoi tout est entrain de changer ? Hors de question que la popularité de Lucas me mette en lumière. Je ne peux pas me le permettre.
- Tu peux t'installer ailleurs s'il te plaît ?
Je ne sais pas comment j'ai réussi à aligner ces mots bout à bout sans bafouiller. De plus mon ton est sec presque condescendant. Le regard de Lucas se voile, ses yeux turquoises changent soudainement de couleurs en devenant quasiment bleu foncé. C'est la première fois que je constate un tel changement de couleur dans les iris d'une personne.
Lucas ne répond pas. Il recule, laisse la chaise crisser mettant à mal mes tympans. Sans me prêter plus d'attention, Lucas reprend sa place au centre de la classe, là où sa petite cour se rue autour de lui. Heureux de pouvoir à nouveau respirer, je prends mes aises comme à mon habitude. Un bruit terrifiant venant de l'extérieur m'interpelle. J'ai à peine le temps de tourner la tête, que je suis propulsé au sol, des craquements violents suivis d'éclatements assourdissant au dessus de nous, je me rends compte que les vitres de la classe sont toutes brisées. Effrayé, je ne réalise pas immédiatement que Lucas se trouve au dessus de moi. Mon dos déjà douloureux se réveille sous la douleur du placage au sol que je viens de subir. Le regard inquiet de Lucas me donne une multitude de frissons.
- Tu vas bien ? Me demande-t-il inquiet.
- Oui, tout va bien.
- Tu es certain ? Vu ta tête je dirai plutôt que tu es blessé.
- Ne t'inquiète pas je vais très bien, regarde.J'essaie de lui prouver que je n'ai aucune blessure, mais je réalise que ma chemise est déchirée. Paniqué je m'éloigne rapidement de Lucas. Hors de question que mes ailes soient découvertes. La seule solution, fuir. Impossible ! Des cris de douleur me ramènent à la raison. De nombreux élèves ont été fortement blessés. Je me rends soudainement compte de la chance que j'ai eue, Lucas m'a plaqué au sol avant que je sois touché. Miraculeusement il n'a rien. Nous venons en aide tous les deux à nos camarades blessés.
- Nous devons nous mettre à l'abri, s'exprime Lucas. Vite ! Le temps presse.
Surpris par un Lucas autoritaire que je ne reconnais pas. Il m'apparaît soudainement plus grand, plus âgé et bien plus charismatique. Suis-je entrain de rêver ? Je n'ai pas le temps de réfléchir davantage que je fais sortir un maximum d'élèves. Lucas s'occupe des blessés. Tout le monde est un peu perdu. Des enseignants sont venus nous prêter mains fortes. Nous descendons tous vers les sous sols de notre école.
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L'ange perdu
Siêu nhiênMage et ange, unis contre les ténèbres : La prophétie s'accomplit ! Deux âmes liées par une prophétie ancestrale, deux destins entremêlés pour sauver le monde des forces du mal. Lucas et Émo, unis malgré leurs différences, devront affronter des épre...