OSCAR [BxB]

♦ CHAPITRE 8 ♦

▬ De braise et de sang ▬

La porte s'ouvre sèchement. Pas le temps de respirer une énième bouffée que déjà le fusil se loge dans mes mains, sur l'épaule, doigts sur la gâchette. Je tiens malgré moi Johnny en joue qui lève automatiquement les mains, signe de paix instantané.

Derrière lui, bien vite, ma mère suivie de l'armoire à glace qu'est Solal.

_ Alors ?!

Hurle Lola, sautant de sa chaise pour courir vers la mère, se cacher dans ses bras. Je sens d'ici toute la force de l'étreinte qu'elle lui offre et qui lui est rendue. Rita embrasse le haut de sa tête, ses cheveux en bataille, la garde contre elle. Je n'aime pas ça, quelque chose cloche. Maman garde Lola comme ça trop longtemps, trop fort, comme si elle avait peur de la perdre d'un instant à l'autre en la relâchant.

_ C'est compliqué.

Répond Rita. On se croise, se dévisage. Quelque chose la traverse et ce n'est clairement pas du soulagement.

Je n'ai pas baissé le fusil, il se pointe encore à moitié sur Solal et Johnny, adossés au mur de la cuisine dans laquelle nous étions posés avec les filles, quelques secondes plus tôt. Je n'ai aucune confiance, jamais. Quiconque rentre ici se risque à ma colère et à la -presque- folie qui me gagne de jour en jour.

Je rêve de faire entièrement confiance à ma mère en termes de relation humaine, me dire qu'elle n'est pas capable de se tromper, de juger quelqu'un de travers. Je n'ai qu'à me rappeler mon père et les histoires sur celui de Lola pour que le doute m'assaille. Ma mère laisse souvent l'amour l'embrumer, qu'il soit amoureux, amical ou maternel. Elle aime à en perdre l'esprit et la raison, et avec nos géniteurs elle à eu le malheur de le faire à nos dépens. J'ai toute confiance en ma mère mais pas toujours en son cœur.

Désolé Johnny, désolé Solal. Si je dois tirer, même sur vous, alors qu'il en soit ainsi.

_ Compliqué comment ?

Lola insiste. Je sais déjà que la mère ne dira rien, pas devant elle, pas devant Aurore. Elles sont trop petites, trop précieuses. Elle n'à pas le cœur à ça, pas aujourd'hui.

_ Vas dans ta chambre avec Aurore.

L'ordre tombe sèchement. Trop pour que ma sœur l'assimile, elle à l'habitude du froid, du cru, du brut, chez les autres. Ma mère ne perd jamais sa voix de miel avec Lola, sauf la, quand elle panique, quand elle se souvient que jamais aucun enfant ne devrait avoir à entendre et voir tout ça.

_ Mais je ...

_ Je t'ai dit de monter.

_ Maman je peux ...

_ Tout de suite.

Ma sœur recule, s'arrache à l'étreinte avec une colère non dissimulée, poussant un peu ma mère en arrière qui ne semble pas lui en tenir rigueur.

_ Lola, viens c'est pas grave ! Ils doivent avoir besoin de parler de trucs qu'on ne peut pas entendre d'acc.

Aurore tend la main vers sa petite amie furie, prête à cracher l'entièreté de ses poumons d'une seconde à l'autre. La blonde l'attrape un peu d'un coup en la sentant prête à exploser. Lola se veut plus grande qu'elle ne l'est vraiment mais, je la comprend, je sais ce que c'est de grandir trop vite, de voir ce qu' aucun enfant ne devrait voir. On se croit plus fort, plus résistant et dans un sens, on l'est. Bien sûr que ma sœur est plus mature que d'autres filles du même âge mais, ça ne l'à rend pas pour autant adulte, aussi solide que l'est maman. Qu'elle le veuille ou non, elle n'à que quinze ans et aucun événement ne peut rien y changer.