Serre des Renards Parte 7

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J'appris ainsi qui était ce motard aux grosses lunettes jaunes que j'avais vu le matin passer et nous saluer sur la route de province.

Mais personne ne m'a révélé qui était ce gamin derrière lui sur la moto.

Donc, tantes, et grand-mère, savaient déjà où j'étais et ce que je faisais.

Mieux que ça, ça ne pouvait pas aller ; tout s'est bien terminé pour moi : avec la promesse, que je devais pourtant faire, ne plus aller avec les vaches.

Une promesse faite à contrecœur, la mienne, car j'aimais emmener les vaches au pâturage ; d'abord parce que c'était du temps passé à la campagne et en plein air, avec toutes ces senteurs de plantes et de fleurs ; deuxièmement parce que loin du bruit et dans le plus calme absolu, sauf pour les cloches de vache, les aboiements occasionnels des chiens et le chant des oiseaux.

J'ai alors observé, et essayé de comprendre, le comportement des animaux ; comme par exemple, la raison pour laquelle la vache noire, au pâturage, permettait à la vache tachetée noire et blanche de brouter près d'elle, sans laisser approcher la brune ni même la tachetée rouge ; et l'explication est que la vache noire est la mère de la vache tachetée noire et blanche.

J'ai aussi vu que, lorsqu'un insecte se repose sur eux, malgré leur peau dure et épaisse, le sentent immédiatement et le chassent avec un tremblement de la peau, juste dans le point sur lequel il s'est installé.

Signe d'une sensibilité élevée, m'a expliqué mon oncle, également dû aux nerfs sous-cutanés, que nous humains n'avons pas.

Il est encore tôt pour le dîner, mais j'ai un petit creux dans l'estomac ; je n'ai rien mangé à cause des vaches, et la focaccia me vient à l'esprit.

Dans la cuisine, je soulève le couvercle de la matrella, mais je ne vois aucune focaccia ; pas même un morceau, juste une assiette recouverte d'un autre.

Je tiens le couvercle ouvert avec ma main gauche et appelle ma grand-mère, pour demander de la focaccia : si par hasard, il en restait un morceau pour moi aussi.

De loin, en dialecte et d'une voix rageuse, elle me dit de découvrir l'assiette dans la matrella.

La focaccia est dans l'assiette.

Je soulève complètement le couvercle et enlève la plaque, et une belle pièce, grande et farcie de deux grosses tranches de jambon cru, apparaît à ma vue ; du revers de la main, je la touche : elle est froide, mais invitante.

À deux mains, je le prends et, veillant à ce que rien ne s'échappe, avec l'eau à la bouche, je prends la première bouchée.

Bien que froide, la focaccia est douce et savoureuse ; sa magnifique saveur rehausse également celle du jambon, mais chaude aurait été mieux.

Je mange calmement et je mâche lentement ; puis je m'approche de la fenêtre, et avec mon coude, je déplace le rideau de soie blanche fabriqué à partir du parachute américain.

Je regarde le soleil qui, maintenant, presque couvert par les toits des maisons d'en face, se couche déjà.

Je ne sais pas si je suis encore petit ou si le morceau de focaccia est grand pour moi ; le fait est qu'il m'a fallu beaucoup de temps pour le manger, mais à la fin, je l'ai fait et je l'ai tout fini.

À présent, tout ce que j'ai à faire est, après avoir prévenu ma grand-mère, de m'asseoir dehors à la porte de la maison et d'attendre que la famille se réunisse pour le dîner.

Cependant, je ne pense pas que ce soir, j'y participerai ; ce gros morceau de focaccia farcie, ça m'a juste rassasié : je pense que ça restera mon seul repas de la journée.

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