☆•7°Sadique•☆

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Punching Bag-Palaye Royale

Nous étions arrivés. J'arrêtai le moteur de notre véhicule, puis moi et Tomas sortions de la voiture. Au cours du trajet, le blond n'avait cessé de parler de tout et de rien, sauf que pour une rare fois, j'avais perdu le fil de ses histoires amusantes. D'une part, je savais que j'allais m'en vouloir pour un bon mois, de ne pas l’écouter, mais de l'autre : j'en avais été incapable.
À l’intérieur de mon cerveau, je revivais la discussion que j'avais eue avec Ela. Quelque minute auparavant.
J'étais apeurée par ses paroles crues.
Avais-je réellement perdu la confiance de la personne la plus importante dans ma vie, dans mon univers ?
Mes mouvements étaient devenus rapidement automatiques. Je ne me rendais pas vraiment compte d'où j'étais et des gestes que je faisais. Ce n'était que lorsque nous rentrâmes dans notre demeure que je repris conscience du monde qui m'entourait.
Déboussolé par mon énorme manque d'attention, je retirais mes chaussures puis suivais Tomas qui marchait jusqu'à la cuisine. Mon instinct de survie se fiait continuellement sur le blond. Quoi qu'il fasse, même si cela se montrait complètement dangereux. Dès que nous passâmes l’arche menant à la salle à repas, j'aperçus Maxime et ma tante. Ceux-ci étaient assis à la table et discutaient calmement, autour d'une tasse de thé. De vrais bourgeois. Tomas était enthousiaste à l'idée de les rejoindre, de mon côté, j'étais un peu réticent, mais finissait par faire comme Tomas et m'asseoir avec eux.
Le trio de moutons entamait une profonde discussion sur les cours alors que je m'enfonçais dans un grand mutisme. Malheureusement, mon oncle en décidait autrement pour moi et s'exclama haut et fort :
-Fiston, tu veux qu'on aille courir ensemble à la piste extérieure du centre sportif ? Il va bientôt neiger, c'est le temps d'en profiter !
Fiston, quel drôle de surnom à donner à ton souffre-douleur Maximilien…
Un sourire narquois fit sa naissance au coin de ma bouche. Il osait me proposer une activité père et fils après tous les malheurs qui s'étaient abattus sur ma vie à cause de lui. À aucun moment, je ne doutais des mauvaises intentions qui se cachaient derrière cette proposition, pourtant à l'apparence joyeuse. C'était un putain de sadique, ce type.
Je gardais ma rancœur et mon air fier, sauf que rapidement, une boule d'angoisse se forma dans mon ventre. Toutes sortes de scénarios horrifiants se nouèrent dans mon esprit. Dans chacun d'eux, aucune trace de fin heureuse ne survenait.
Je m'apprêtais à dire un non-rhétorique et tranchant quand Tomas plaqua un gigantesque sourire sur son visage puis s'écria avec enthousiasme :
-Avec plaisir, Maxime ! il prit mon bras en otage et continua sa phrase, laisse-nous vingt minutes pour qu'on se prépare et on y va.
C’est officiel, je détestais Tomas Bouvet.
~
Maxime nous avait gentiment accordé un délai de vingt minutes top chrono, comme l'avait demandé Tomas. Pas une seule seconde de plus, par contre. Nous aurions une sanction si nous arrivions en retard, et je le croyais sur parole quand mon oncle disait que nous allions le regretter. Je savais que si on ne suivait pas ses directives à la lettre lors de l'entraînement, c’était certainement moi qui allais payer. J'en étais sûr.
Jamais Maxime n'oserait toucher Tomas...
Après quelques mots de sur le programme, Tomas avait resserré sa prise autour de mon bras et m’avait affectueusement traîné jusqu'à sa chambre. Dès qu'il avait refermé la porte derrière notre passage. Celui-ci m’avait balancé sur son lit, où dormait paisiblement notre chien Toddy, en colère contre moi.
C'était Tomas qui est en colère pas Toddy…
-Toi, tu es idiot ! cria-t-il, debout, les mains sur ses hanches.
La force avec laquelle le blond parlait fit sursauter notre berger allemand qui releva vivement la tête mais se recoucha en moins de deux. Pour ma part, je ne calculais pas, je me replaçais correctement sur le pieu, m'assoyant au bord du lit. Je n'osais pas répondre à Tomas ou même croiser ses jolis iris bleutés.
Heureusement, en un soupir, il balayait toutes les ondes négatives qui l'étouffaient et il commençait à fouiller vigoureusement dans sa garde-robe. Espérant y trouver des vêtements de sport. Il lui fallut une simple minute pour réussir sa tâche. Il me tira en pleine tronche : un jogging couleur gris en plus d’un t-shirt à l'effigie du groupe Nirvana.
Je vis, par la suite, Tomas attraper un short qui s'apprêtait à tomber de l'étagère et un de mes pulls The Used. Par chance pour mon meilleur ami, je n'avais pas la force de me plaindre qu'il m'ait encore volé mes fringues. J'étais beaucoup trop anxieux et je traînais de la patte, sauf que le temps nous était affreusement compté et le boucler perdit vite patience :
-Habille-toi, il nous reste cinq minutes.
Je sursautai comme Toddy au son de sa voix. D'habitude, le blond m'aurait rassuré. Malheureusement, il fit tout le contraire ce soir. J'étais en pleine crise mentale. Je ne savais pas combien de secondes s'étaient écoulées, mais en relevant la tête vers Tomas. Celui-ci me fit perdre contenance dans le bon sens du terme.
Il était quasi nu devant moi.
Il ne portait qu'un caleçon.
Il ne me fallait pas plus pour que je fige sur place. Ma bouche s'entre-ouvrit, mon cœur battait à la chamade.
J'étais incapable de détourner le regard, maintenant.
Tomas était dos à moi, penché vers l’avant puisqu'il enlevait son jean, avec une certaine difficulté. Au travers de ses mouvements, je pouvais facilement discerner les os de sa colonne vertébrale. Mais cela ne lui enlevait aucunement sa beauté.
Depuis toujours, il était petit, frêle. Et, je n’y accordais aucune importance.
Il était putain de sexy à mes yeux…
-Combien de fois, il faut que je te le répète : habille-toi ! lançait-il en se tournant de nouveau dans ma direction, habillé à présent.
Je n'avais même pas remarqué qu'il s'était finalement changé, tellement j'étais plongée dans mes pensées tordues.
~
J'étais à bout de souffles. La sueur ruisselait sur ma peau bronzée. Je sentais que mon corps allait bientôt me lâcher, je me battais contre moi-même pour ne pas m'écrouler au sol. J'avais si peur des conséquences si cela devait arriver. Nous courions depuis une heure. Aucune pause n'avait été acceptée par mon oncle. Ma haine envers lui ne faisait qu'accroître à chaque tour de piste.
Néanmoins, une chose m'aida à garder le rythme : c'était mon meilleur ami et sa détermination inatteignable. Il était proche de l'évanouissement, mais tenait le coup. Comme toujours. En plus, Tomas n'était pas friand des sports. Il discutait paisiblement avec Maxime qui affichait son plus beau sourire de façade. Tandis qu'encore une fois, je m'enfonçais dans mon silence. Ce silence que j'adorais.
Maximilien avait bien évidemment tenté de me parler, pour bien paraître aux yeux de Tom, mais je n'avais pas entré dans son parfait petit jeu d’acteur. J'avais bien mieux à faire, comme mater le cul de Tomas quand les deux manchots prenaient de l'avance sur moi, par exemple.
Moi ? Pervers ?
Hum, c'était discutable. Personnellement, je me qualifiai plutôt d'observateur…
Après un ultime tour de piste interminable, nous nous arrêtâmes. Les mains sur les genoux, crachant nos poumons. Nous ressemblions à deux personnes qui n'avaient jamais respiré de leur vie. Heureusement, mon oncle nous délaissa assez rapidement. Il alla à l'intérieur du centre sportif pour faire un rapide tour aux toilettes. Soulagé de sa soudaine absence, je pris le risque de désobéir à mon agresseur. Je bus une gorgée d'eau dans ma gourde, et dévisageai Tom qui s'éloignait de moi. Visiblement en colère.
Perplexe et inquiet : je relâchai ma bouteille, regroupai le fond d'énergie qui me restait dans le corps pour accourir vers lui. Tom s'était assis dans les estrades. Je montai jusqu’à lui et posai ma paume sur son épaule pour attirer son attention, sauf qu'il la balaya du revers de la main, me transperçant de ses pupilles rouges de frustration.
-Tu vas te décider à me dire ce qui ne va pas avec ton oncle ou je dois faire l'autruche encore un mois ?! Il est gentil, essaie de te parler, mais toi, tu n'arrêtes pas de l'envoyer chier ! Tu penses que ta tante ça ne la blesse pas ? Que tu détestes son mari après tout ce qu'ils ont fait pour toi et moi ?
Bouleversé, je secouai instinctivement la tête de gauche à droite, négativement. Je n'étais nullement prêt à recevoir ces accusations à la gueule après notre entrainement, surtout de la part de Tomas et pas de celle de Maxime. Un sentiment horrible s'empara de moi. Le sentiment de ne pas être compris. Mais d'une part : comment lui en vouloir ? Je ne lui avais jamais donné les cartes pour qu'il ait sa chance de comprendre les règles de mon jeu...
La situation était inhabituelle. Tellement inhabituelle que j'étais complètement déréglé. Je faisais comme si tout allait bien, intérieurement et extérieurement, tout se dessinait sous les yeux de Tomas qui gardait son calme : des larmes menaçaient de couler, je serrai ma mâchoire et plantai mes ongles dans ma chair.
J'avais tellement mal…
-Je ne l'aime pas, c'est tout, Tomas, murmurais-je, la boule au ventre.
-Tu ne l'aimes pas ? C'est l'unique raison ?
-Oui...
Il était immobile, aucune émotion ne se traçait, pourtant, dans ses yeux, un déferlement de couleur, de multiples teintes bleutées, me fit deviner les horribles sentiments qui le suivaient...
J'adorais voir le spectacle de ses pupilles autant que je le détestais…
-Alors pourquoi tu as commencé à faire des cauchemars la nuit de son retour ? Pourquoi, dans tes cauchemars, tu as peur qu'il débarque en pleine nuit dans notre chambre pour te faire du mal ? 
Des cauchemars ?
-Tu n'as pas… Ce n'est pas…
-Quoi Gaèl ? Dis-moi ?
Je n'avais en aucun cas su que je faisais des cauchemars. Pourquoi ne m'avait-il jamais parlé de cela ? Je déglutissais, apeurée, et déclarai, la voix tremblante :
-Tu sais, Tomas, les gens cachent bien leurs jeux parfois.
-
-Parfois, ils jouent tellement bien la comédie que la personne qui a vu son vrai visage a l'air complètement fou.
-Quoi ?
-Les gens comme Maxime paraissent vraiment gentils, mais dès que la nuit tombe, ils montrent leur vraie nature, abusent de leur victime, les tabassent en lui disant à quel point elle est une merde, une putain de tapette… Parce que tu sais, Sunshine, moi aussi, au début, j'ai aimé ce type, je n’ai pas toujours détesté Maxime…
-Tu veux dire quoi par là ?
Heureusement, je n'avais pas le temps de répondre à cette énième question qui m'aurait achevée sur place, puisque mon oncle revenait en trottinant. L'air de rien.
C'était l'une des rares fois où j'ai été content de le voir...
~
Je sortais de la douche depuis quelques minutes. Aucun sang n'avait coulé le long de mon corps, pendant que je me lavais, signe que les blessures n'étaient qu'intérieures... En plus, tellement, j'étais con, je n'avais pas apporté de vêtement de rechange, j'avais la tête bien trop ailleurs.
Les cheveux humides, une serviette nouée autour de la taille. Je marchais sagement dans les couloirs de ma maison, jusqu'à atteindre la porte de ma chambre, je posais ma paume sur la poignée, ouvris le panneau, quand une main m'arrêta dans ma lancée. Celle-ci agrippait avec une violence indescriptible mon cuir chevelu.
La personne qui se cachait derrière ce geste ne perdit pas une seule seconde et me poussa à l'intérieur de ma grande chambre. Fermant délicatement la porte, après nous, de manière à ne pas attirer l'attention. J'entendis, par la suite, le son significatif du verrou, puis je me retrouvai plaqué contre le mur.
L'adrénaline se déversait dans mes veines, mais mon opposant était bien trop fort...
J'en tremblais de peur et de rage…
C'était seulement là qu'enfin, le visage de Maxime se déversa sous mes yeux. Une colère monstre déforma ses traits de visage.
-Tu as dit quoi, tout à l'heure, à ta petite princesse ?
-Je lui ai dit le strict minimum... Monsieur, murmurais-je en apportant une certaine insistance sur le mot ''monsieur''.
Je savais que le provoquer n'allait que me mener à ma plus grande perte, sauf que je n'en avais plus rien à faire des actes qu'il pouvait faire. Qu’il pouvait ME faire. Tout était contradictoire à mon état de pensée d'il y a une heure, puisque le diable était maintenant en mode attaque. Oui, j'en avais peur, j'anticipais, mais quand le moment de poser les coups était venu, mon propre démon se réveillait.
Pris d'une pulsion meurtrière, Maxime secoua mon corps paralysé. Ma tête cognait à de multiples reprises contre le mur. Étrangement, je ne tiquai pas. Je préférais crever plutôt qu'il me voit souffrir.
Un filet de sang se mit à couler de mes narines. Malheureusement, ce n'était que le début de ma descente en enfer. Ce n’était que le début putain
Et personne ne représentait le fabuleux paradis qu'on m'avait tant promis...
-Connard, tu ne vas pas t'en sortir comme la dernière fois… Sale PD.
-Si tu savais comme je m'en bats les noix des mecs aujourd'hui…
Un rire rempli de détresse sortit d'entre mes lèvres.
-Tout ce que je veux, c'est que tu crèves pendant tes fameuses visites à la base militaire, Maximilien...
Et le premier coup part, tout comme ma serviette qui glissa au sol…

Sunshine-Histoire gayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant