Bad Day-Charlotte Park
☆•Il y a un ans•☆
Tomas
J’allai enfin me lancer, c'était ce soir ou jamais. Je repoussais le moment, prenant la moindre petite chose comme une raison pour renoncer. Sauf que mes mensonges me pesaient trop, en plus, je n'avais plus aucune justification pour expliquer mon manque cruel de courage. Moi qui avais l'habitude de me confier à eux, c'était devenu compliqué avec le temps. Je me rappelais encore chaque fois où j'avais donné une excuse bidon pour ne pas présenter mon copain à mes parents, chaque fois où j'avais remplacé un garçon par une fille de mon entourage, et tous ces souvenirs me donnaient envie de gerber.
C'était avec les mains tremblantes, la gorge sèche et un stress monumental, que je montais les escaliers à reculons. J'avais l'impression d'exploser de l'intérieur. Comment une si petite annonce pouvait me faire autant paniquer ?
Peut-être parce que tes parents sont le parfait cliché des personnes aimentes mais fermées d'esprit !
Je montais les marches jusqu'à être dans le deuxième salon. J'avançai encore et j'arrivai à la cuisine dans laquelle je fis ma première courte pause pour apaiser mes angoisses. Grande inspiration et on repart. Finalement, j'étais devant la porte coulissante menant au salon principal. Quand une voix grave se fit entendre. Cela me fit sursauter, mais je gardais contenance. Cette voix, je la connaissais.
-Fils, entre, nous t'avons entendu !
C'était mon cher père et son ouïe fine.
Mes deux parents riaient et je fis ce que mon père m'avait demandé, c'est-à-dire : entrer. Dès que je posai le pied sur le carrelage froid du salon, les regards se rivèrent sur moi. Mon père et ma mère étaient assis sur le canapé, les deux aux extrémités. Ils ne se touchaient pas. Pas surprenant puisqu'ils n'ont jamais été des grands accros au contact physique. C'était peut-être la conséquence de leur mariage sans amour.
-Tu es blême, entamas ma mère, rapidement coupée par la télévision.
Le son de la télévision bourdonnait dans nos oreilles depuis, avant mon entrée dans la pièce, pourtant ce n'était que maintenant que je ne le remarquais. À cause d'un coup de feu venant d'un film et de la réaction de ma mère. En parlant d'elle, celle-ci était frustrée de s'être fait couper par un objet, alors elle toisa son mari du regard. Ça fonctionne puisqu'il comprit le message et éteignit la télévision non sans broncher.
-Que se passe-t-il, mon chou ?
Je jouai nerveusement avec le bracelet que m'avait offert ma grand-mère, puis j'avalais difficilement ma salive avant d'enfin avouer :
-Je suis... Gay...
Le visage de ma mère se paralysa d'horreur. Elle se tourna automatiquement vers mon père qui était sans émotion.
Il se leva du canapé, me dévisageant de sa hauteur. Sa joie habituelle avait quitté son corps. Il empoigna fermement mon bras, son simple touché me brûlait la peau. Mon instinct de survie me hurlait de se débattre, tandis que ma raison me disait de ne pas bouger, que je ne pouvais rien faire. Celui qui se qualifiait comme un père compréhensif me traîna sans pitié dans le sous-sol. Je volais au travers des couloirs de la maison. Derrière nous, ma mère suppliait mon géniteur de me lâcher, sauf que ce n’était qu'un bruit de fond aux yeux de son mari. Personne ne pouvait le calmer à ce moment-là.
J'étais fichu.
Une fois arrivé devant ma chambre, il me jeta violemment à l'intérieur et, avec tout l'écœurement du monde, il disait :
-Fais tes valises, tu ne vis plus ici, tu n'es plus mon fils.
Son ton me glaça le sang.
-... Mais...
-Tu me déçois énormément, Tomas Bouvet...
Les larmes me montèrent aux yeux, il claqua la porte, me laissant seul avec une honte et un dégoût de moi-même indescriptibles.
~
Je fermais honteusement ma valise, retenant mes larmes. J'avais fait mes bagages le plus rapidement que je ne le pouvais. Un tas de questions filaient dans ma tête ; où allais-je vivre ? Que devais-je faire ? Je n'avais plus aucun repère à ma disposition et nulle part où aller. Surtout que je n'avais pas encore prévenu Gaèl des événements. Je n'avais plus la force de refaire un coming out, j'allais sûrement lui mentir comme je savais si bien le faire. J’avais si honte de m'être fait jeter dehors de ma maison d'enfance tel un déchet. Ma grand-mère aurait probablement aussi honte que moi, si elle faisait encore partie de ce monde… Désolée Mamie…
Soudain, des faibles coups se firent entendre de l'autre côté de la porte. Une peur terrible m'assaillit. Mes sens étant à vif, mon cœur ratait des battements, heureusement, j’étais déjà prêt à partir…
-Ouvre-moi Tomas.
Maman…
J'ouvris et ma frayeur s'apaisa quelque peu lorsque je vis ma mère seule. Sans lui. Je devinai facilement que son mari n'était pas au courant de sa petite visite.
-J'ai des choses à te dire avant que tu ne partes...
Dans un silence absolu, on prit place sur le lit qui n'était déjà plus mien. Je redoutais ce qui allait suivre. J'évitais volontairement de croiser son regard rempli de pitié. Et sans que je m'y attende, ma bouche prit le relais :
-Pourquoi tu n'essaies pas de convaincre papa de...
Elle me coupa.
-Je ne peux rien faire contre lui... Il est... Lui.
J'acquiesçai, n’ayant pas la moindre rancœur et espoir à son égard. J’avais l'habitude de la voir se faire marcher sur les pieds par cet homme, mais cette fois, j'espérais naïvement qu'elle changerait...
-Je dois t'avouer quelque chose sur la mort de Sandrine et de Kyle... dit-elle au bout de quelques secondes.
☆•Plusieurs années plus tôt•☆
Kyle (père de Gaèl)
Un cri assourdissant me fit sursauter. Je jurais entre mes dents lorsque je vis l'énorme trait noir en plein milieu de mon œuvre, conséquence de ma surprise. Au moins, je pourrai dire que ma femme a contribué à la « beauté » du travail, même si le résultat était atrocement laid. Cependant, je n'en voulais pas à ma femme d'avoir crié. Je ne lui en voulais jamais de toute façon. Elle était trop belle pour la noirceur de la rancœur.
Enfermé dans mon atelier d'art, je me levai de ma chaise de bureau, même si je n'avais pas d'amertume à son égard, cela n'empêchait pas l'inquiétude de se pointer. Pourquoi l'avais-je autorisée à cuisiner déjà ?
Aucune idée. En plus, j'étais parfaitement conscient qu’elle n'était pas faite pour ce domaine…
Je traversai les couloirs de notre maison, d'un pas triomphant, jusqu'à être dans la même pièce qu'elle. Elle était si maladroite que tout pouvait être arrivé.
-Tu sais que ça va être dégoûtant ? disait-elle en m'apercevant.
Je lâchais un rictus lorsque je la vis agenouillée au sol, nettoyant de la sauce tombée sur le plancher. Heureusement, le contenant où se trouvait ladite sauce était en plastique, donc aucun bris de verre en vue.
-Je m'étais préparé à cette éventualité, ne t'inquiète pas princesse, argumentais-je en la narguant du regard.
Elle se releva finalement, une fois sa tâche accomplie, puis frappait mollement mon torse. Elle posait par la suite la serviette utilisée sur le comptoir avant d'entourer mon cou de ses petits bras.
-Il ne faut jamais me laisser seule en cuisine... murmura-t-elle avant de m'embrasser.
Je ris contre ses lèvres pulpeuses et elle ajouta :
-Gaèl est chez Sandra, on est tranquille...
Elle ajouta cette phrase pour confirmer ce fait. Notre fils n'était pas là. Il était chez sa tante. Il ne fallait pas être un génie pour comprendre le but de Sandrine. D'un geste habile, je la soulevai, la posai sur le plan de travail. Ses longues jambes encadraient mon bassin. Nous nous embrassions passionnellement, puis, dans un élan de moquerie, je chuchotai :
-Un jour, tu vas réussir à préparer des pâtes chérie...
Nous rions et reprenions notre activité. On s'embrassait jusqu'à perdre notre souffle, malheureusement, nous furent couper par le téléphone de ma femme qui se mit à sonner. Nous ne décrochions pas, mais la sonnerie repartait de plus belle. Agacé ; j'attrapais l'appareil sans mal. Dans un soupir lourd, je lui tendis son portable.
Elle répondit tout naturellement, fronçant des sourcils dès que la voix parvenait à son oreille, signe d'inquiétude chez elle.
-Respire Jessica...
-...
-Ok, on arrive...
•(Jessica est la mère de Tomas)•
Au bout de plusieurs minutes, ma femme raccrochait. Elle ne semblait pas comprendre beaucoup de choses.
-Jess ne va pas bien, je ne sais pas trop pourquoi en plus. Elle panique parce qu'elle pense que Tomas est supposément gay et elle a peur que son mari n'accepte pas le temps venu.
Je comprenais à moitié pourquoi c'était si paniquant. Tomas ne lui avait rien dit, ce n'était qu'un pressentiment... Une simple constatation, mais par bonne volonté, je répondis tout de même :
-Tu veux qu'on aille la voir ?
''-Le père de Gaèl-Julien avait accepté de venir me voir, sans savoir que son dernier souffle et celui de Sandrine approchaient...''
☆•Retour au présent•☆
Gaèl-Julien
Le récit de Tomas était terminé. Des tas de sentiments m'enveloppaient...
-Tu ne t'es jamais vraiment disputé avec tes parents... murmurais-je.
Celui-ci soupira et déposa un petit baiser sur ma clavicule. Du bout des doigts, il se mit à caresser mon torse. Avant d'enfin affirmer :
-C'était plus facile pour moi et Sandra de dire que c'était une simple dispute...
-Je comprends...
C’était tout ce qu'il voulait…
Se faire comprendre…
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Sunshine-Histoire gay
RomansaGaèl et Tom. Une amitié qui mélangeait amour, inquiétude et haine. Amis depuis l'enfance, ils avaient tous vu les difficultés de la jeunesse ensemble. Des fêtes, des coups d'un soir. Leur vie entière se basait sur l'autre depuis qu'ils avaient dix...