☆•9°Coupable•☆

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Mind Of Mine-Lo Spirit

☆•Présent•☆
Quatre jours.
C'était le nombre de jours qui s'était écoulé depuis l'incident au centre sportif, depuis que nous avions couru avec le diable en personne. C'était aussi le nombre exact de jours qui me séparait du souvenir de la colère de Tom et celle de Maxime. Celle-ci avait pris le dessous sur la raison de mon oncle. J’avais payé mon non-silence. J'avais encore une fois souffert, parce que je n'avais pas réussi à me fermer la gueule. Je n'apprenais donc jamais de mes erreurs ?
Les séquelles s'étaient négligemment gravées dans mon esprit au fil que les coups s'abattaient sur mon pauvre corps. Sans défense.
Et tout était de ma putain de faute…
J'étais marquée de partout.
Et je ne pouvais m'en vouloir qu'à moi-même, pour cette fois.
La tension s'était tranquillement installée, dans la maison, au fil des jours. Aucune personne ne se comportait normalement dans la demeure. La seule qui ne me rappelait pas mes erreurs était ma tante, Sandra, et sa douce naïveté. Celle-ci ne semblait pas se douter une seule seconde des fissures présentes au sein de sa propre famille. Je me demandais parfois si elle ne serait pas aveugle.
Épuisé de l'interminable semaine que je venais, étrangement, de vivre, je retirais mes chaussures et montais directement dans ma chambre. Sans adresser un seul regard à Tomas. Arrivé dans mon antre, je poussais un long soupir, fermais la porte puis enlevais mon pull et mon pantalon, changeant mon bas par un simple jogging qui laissait transparaître l'imposante bosse de mon intimité : glamour comme vision. Par la suite, je me jetai lourdement sur mon matelas. Je m'étirai et allumai mon enceinte Bluetooth.
-Gaèl ?
Avais-je bien entendu ?
Il me fallut un court instant de réflexion avant de bien assimiler l'information : la voix discrète n'était pas le fruit de mon imagination tordue. Je réalisai que Tomas était là. Sur le coup de cette constatation, je me redressai prestement et tentai de cacher les conséquences physiques se trouvant sur ma peau bronzée, à l'aide d'un de mes oreillers.
Mes gestes étaient plus que suspects. Effectivement.
J'avais profondément espéré que le blond soit parti, que cela ne soit qu'un rêve, mais par la suite, je vis avec horreur que Tomas était encore dans l'embrasure de la porte et qu'il observait les partis visibles de mon torse avec attention.
~
Un silence insupportable régnait entre nous. Le blond referma la porte et s'avança calmement, s'arrêtant au bout du lit ; ensuite, il prit l'étonnante décision de rester debout.
La pièce était faiblement éclairée. Seulement, la paisible lueur de l'extérieur passant au travers des rideaux était source de lumière. Par malchance, cela suffisait amplement au blond. Il pouvait facilement percevoir les monstruosités, sur mon corps, celles que je tentais de dissimuler.
-Qu'est-ce que c'est que toutes ces marques Gaèl ? osa-t-il demander.
Il n'était pas confiant dans ses gestes tout comme dans sa manière de me parler, il jouait nerveusement avec ses doigts et des trémolos se faisaient sentir dans ses paroles.
Il me faisait de la peine.
C'était ma faute s'il était dans cet état de panique...
Je ne laissais rien transparaître, mais je redoutais aussi la suite des événements ; la moindre de ses observations et de ses questionnements me terrifiait. Il analysait chaque petite trace bleue violacée se trouvant sur mes bras. Chaque marque jaunâtre marquant mes côtes. J'étais une toile marquée par la peinture d'un agresseur.
-C’est à cause de ses cicatrices que tu es devenu pudique avec moi, c'est ça ?
Tandis qu'il me fixait, j'évitais de poser mes yeux sur lui, je n'avais pas les couilles de le faire. J'avais trop honte de tout. Après quelques secondes qui me semblaient infinies, il ajouta :
-C'est Maxime ?
Je reniflai. Cette accusation véridique était un trop grand soulagement pour le moi d'il y a quelques années qui tentaient, en vain, de comprendre pourquoi un garçon lui plaisait. Je n'y croyais pas. Comme toujours, Tom changea vite de sujet :
-Tu viens dormir dans ma chambre ? Je n'ai pas envie d'être seule encore une nuit...
J'avais la nausée. Pourquoi n'étais-je pas capable d'encaisser sa présence ? Pourquoi avais-je honte de moi-même ? Pourquoi avais-je honte de m'être confiée à mon meilleur ami ?
-Tu vas encore dire, non, pas vrai ?
-
-Pourquoi tu es devenu si distant avec moi ? Avec tout le monde ?
Silence.
-Pourquoi tu ne m'as jamais rien dit ? Je commence à en avoir assez, Gaèl-Juliens, je n'ai pas que ça à faire !
Je n'ai pas que ça à faire...
Bien sûr que je savais qu'il avait une vie en dehors de moi, je n'étais pas le centre de son monde comme il était le mien...
Pourtant, entendre ces mots remplis de sous-entendus me heurta de plein fouet. Son soudain changement de ton, la rage qui bouillonnait en lui, se déversant sur moi tel un volcan en éruption. L'impuissance. C'était un sentiment que je ne connaissais que trop bien...
Les larmes me montaient aux yeux, j'étais en colère contre moi-même. Je relevai enfin la tête vers lui. Ses yeux croisèrent les miens. Toutes les émotions que je pouvais observer dans ses iris m’enrageaient. Je ne méritais pas qu'il soit là. À essayer de me comprendre. Je n'y avais pas le droit.
-Je n'ai pas que ça à faire, Gaèl, répéta-t-il dans un murmure quasi-inaudible.
C'était trop, j'explosai.
-Comme te faire prendre par ton putain d'Hugo !
Je n'en pouvais plus, des sanglots me tordaient la gorge, je sabotais ma propre vie. Je prenais tout avec colère. Je n'avais pas appris à réagir autrement. Je n'étais pas en mesure de faire face à mes angoisses de manière plus calme. Cependant, et avec soulagement, Tomas possédait de grandes connaissances sur moi. Il savait ce que je ne savais pas. Il encaissait mes réactions, disproportionnées, et les prenait avec humour. Un sourire narquois se traça sur ses fossettes enfantines. Il était si beau, purée...
-Sérieusement, c'est la seule chose que tu arrives à me dire ? Que je bouffe des queues ?
Je riais un instant, nous allions tous les deux sur un terrain que nous adorions. Même si ce n'était que pour quelques secondes...
-Je dirais plutôt que c'est ton postérieur qui les bouffe, mais bon...
-Ce n'est pas le moment de parler du repas que mangent mes fesses, Gaèl !
En un claquement de doigts, Tomas changeant de disque, le rire était désormais banni au cours de cette conversation. Il était visiblement en colère.
Mon attention divergeait un instant, les joues rougies par mes sautes d'humeur, je commençais tranquillement à détailler le corps du boucler. Le temps était figé. Aucun bruit ne m'entourait. Tomas était encore debout, habillé d'un pull de laine rouge vif, lui arrivant au niveau de ses genoux, il avait l'air d'un gamin, avec ses bouclettes en désordre.
-Pourquoi tu ne m'as rien dit pour Maxime ?
Je cachais mon sursaut, revenant sur terre. Je clignais rapidement des yeux tandis qu'au fond de moi, la question résonnait en écho. Intuitivement, je me demandais, chaque jour, pourquoi gardais-je le silence sur les agissements de mon oncle. Maintenant, c'était à mon meilleur ami de le faire, bizarrement, la seule réplique que j'avais en tête était : l'emprise que Maximilien a sur moi est immense...
-Pourquoi je serais honnête quand, toi-même, tu ne l'es pas avec moi, Sunshine ? demandais-je à la place, innocemment.
En prononçant ces quelques mots, je me levai du lit, toujours couvert de mon fabuleux jogging gris. Je voulais le faire fuir, le provoquer, j'avais besoin de le voir partir pour qu'enfin, j'aille enfin raison ; je ne le méritais pas. Je me plantai devant lui, confiant, imposant, effrayant. Nous étions si proches l'un de l’autre que je frémissais de son souffle sur ma nuque.
-Parce qu'il y a une grande différence entre tes révélations et les miennes...
Il tremblait…
-Quelle est cette fameuse différence, Tomas ? ajoutait d'un ton calme et d'une voix rauque.
-Si je te dis ce qui me mange de l'intérieur, tu vas me mettre dehors de cette maison et de ta vie, et jamais, j'aurais le courage de prendre ce risque...
Une énorme souffrance se cachait derrière cette phrase. Nous étions tous les deux dans le même bateau, depuis si longtemps, il pleurait en silence, tout comme moi. Une part de mon être voulait voir sa souffrance, la comparer à la mienne, la toucher, l'effleurer, savoir que je pouvais l'apaiser...
Dans une douceur extrême, je déposai délicatement mon index sous son menton pointu, appliquai une légère pression sur sa peau délicate, et plongeais son regard bleuté dans le mien.
-Pourquoi ferai-je une telle chose quand tu es la seule raison pour laquelle je reste sur cette terre ?
-...
-Tu es mon meilleur ami Tomas...
Un court silence s'ensuivit.
-C'est bien ça le problème…
Je le jaugeais, perplexe.
-Je suis ton meilleur ami, Juju...
J'humidifiai mes lèvres. Un doute restait dans le vent. Je le fixais comme si ma vie en dépendait, puis une larme coula le long de sa joue.
-Que veux-tu dire par là ?
Mon doigt relâcha son menton.
-De quelle manière dois-je t'avouer le vrai sens de mes phrases... souffla-t-il, pour lui-même.
Il était frustré contre lui-même, il essuya ses larmes à l'aide de la manche de son pull écarlate. Mon petit démon avait envie de rétorquer une chose qui ne ferait qu'accentuer la pression qui s'était installée entre nous, mais je n'avais rien à perdre. Je n'avais rien à perdre sauf mon espoir...
-Tu n'as qu'à me montrer, Sweetie...
Son regard passait de mes yeux à ma bouche. L'hésitation était flagrante. Je n'en pouvais plus. Et décida de me lancer. Enfin, sans une trace de doute, je comblais l'espace nous séparant.
Notre baiser était doux et explosif. Tel un fantasme enfui prenant enfin vie.
Une violente bouffée de chaleur irradiait la moindre parcelle de mon corps en ébullition. Mes mains se posèrent de part et d'autre sur ses joues puis descendirent lentement à sa nuque. Nos respirations étaient erratiques, mais, avant que les choses n'aillent plus loin, Tom nous sépara et murmura, la voix tremblante et les lèvres rouges :
-Tu es sûr de ce que tu fais, Gaèl ?
Je l'examinai, perdant tous mes mots.
Étais-je certain ?

Sunshine-Histoire gayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant