32 I Épouse-moi

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Sur le terrain d'entraînement, les nouvelles recrues en chiaient encore. Deux semaines qu'ils avaient les Caporaux-chefs Ackerman pour les former. Et deux semaines qu'ils souffraient. Ils en venaient à regretter Jean, qui gueulait plus qu'il n'agissait. Eux, c'était l'inverse. Ils ne criaient pas, ils se contentaient de menacer une fois. Après ça, la violence suivait.


"Bouge-toi le cul si tu tiens à être encore capable de marcher ce soir, Weber !", gronda Livaï. "J'ai dit vingt tours et tu en es à peine à sept en l'espace d'un quart d'heure !"


Le concerné força un peu l'allure, redoutant ce qui lui arriverait s'il contrariait le Caporal-chef. Il était blessé physiquement, sa condition ne lui permettait pas de mettre à application ses menaces. Mais il n'en avait pas besoin, il y avait le Caporal-chef Akira pour ça. Et elle avait beau être plus petite que Livaï, elle était redoutable. Personne n'avait encore fait le poids face à elle.


"Koch, Schulz !", tempêta soudain la jeune femme, debout aux côtés de son cousin. "Voyons si vos entraînements portent leurs fruits. Battez-vous".


Les deux recrues se firent face, se jaugeant, sous les regards attentifs des deux Caporaux-chefs. Ils ne tardèrent pas à engager le combat, mais ils hésitaient à se mettre de vrais coups. Tout le monde s'en rendit compte, mais nul n'osa rien dire. L'agacement qui gagna les deux Ackerman était clairement lisible sur leurs visages, ils serraient les dents en essayant de se contenir. Mais Akira craqua bien avant son cousin, avançant d'un pas décidé vers les deux soldats sous les regards flippés des autres. Livaï, lui, afficha un micro sourire amusé.


Elle prit chacun des deux garçons par un poignet, les écartant l'un de l'autre. Puis, là où l'un d'eux reçut un coup de pied dans le ventre, l'autre se fit balayer les jambes. En l'espace d'un battement de cils, ils étaient à terre, ébahis. Dans l'assemblée, tous murmuraient, s'étonnant de la rapidité qu'elle avait manifestée. Face à elle, nul n'avait la moindre chance.


"Vous frappez comme des fillettes en mal d'amour !", grogna la jeune femme avec colère. "Attaquez vraiment, bon sang ! Vous croyez que c'est comme ça que vos ennemis se battront ? Non ! Ils feront tout pour vous faire du mal, pour vous tuer. Si vous cognez aussi fort que des mioches à peine sevrés, c'est sur vos cadavres que vos mères viendront pleurer quand vous vous serez fait buter ! C'est ce que vous voulez ?"


"Non, Caporal-chef...", répondit Schulz d'une petite voix étranglée.


"J'ai dû mal entendre, ou alors je suis devenue sourde", siffla Akira avec agacement. "T'as entendu quelque chose toi, Livaï ?"


"Absolument rien", répondit-il en ne dissimulant même plus son amusement.


Non loin, Erwin, Hansi ainsi que tous leurs amis observaient la scène en se retenant de pouffer de rire. Akira était une vraie lionne quand il s'agissait de former les soldats, elle ne manquait ni de panache, ni de tranchant. Si les nouvelles recrues la maudissaient – ainsi que Livaï – durant leur formation, ceux qui intégraient les escouades lui étaient reconnaissants pour son inflexibilité. Parce qu'elle faisait d'eux de véritables soldats. Et ils s'amusaient de voir les nouveaux souffrir autant qu'eux avaient souffert.


"C'est bien ce qu'il me semblait", reprit-elle avec sérieux. "On va réessayer. Est-ce que tu veux que ta chère mère vienne chialer sur ton corps en décomposition, soldat Schulz ?!?"

Le Prix de la Liberté (Tome I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant