CHAPITRE TREIZE.

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— Tu sors ?

Taylor se tourna vers sa mère. Ils étaient dans la cuisine, il y avait fait un détour pour prendre un petit quelque chose à grignoter. Amelia était en pleine confection du dîner. Parfois, Taylor se demandait si sa mère aimait vraiment sa vie... Depuis qu'elle avait rencontré Richard et était tombée enceinte de Taylor, elle n'avait été que femme au foyer. Elle occupait son temps entre les enfants, le ménage et les préparations de repas – qu'il fallait toujours servir pile à l'heure. Ce n'était même pas vraiment une vie, aux yeux de Taylor. Sa mère était belle, vive, intelligente... Il était sûr qu'elle aussi avec des rêves et des envies, une volonté d'accomplir des choses.

Pourtant, elle ne se plaignait jamais. Elle restait dans l'ombre de Richard avec le sourire et bien souvent, Taylor pensait que c'était pour préserver le bonheur de tout le monde. Sur le papier, ils étaient la famille américaine parfaite : deux parents mariés depuis plus de vingt ans, quatre beaux enfants, une belle maison... La réalité était légèrement différente. Richard et Amelia n'étaient pas complices et ne semblaient même pas amoureux. Taylor et Danton se détestaient cordialement, Nolan n'était – de base – pas un enfant désiré.

Mais Taylor les aimait. Ils étaient sa famille et aussi dysfonctionnelle soit-elle en secret, il ne s'imaginait pas en être renié. Parfois, il avait envie de les envoyer péter. De s'en aller, loin, très loin et de ne jamais revenir. Puis la culpabilité le prenait. Ils étaient ses racines, il ne pouvait pas les laisser.

— Ouais. J'vais chez Cayden.

— Tu lui passeras le bonjour. Il sera là à Noël ?

Les fêtes de fin d'année approchaient, la semaine prochaine viendrait déjà le jour de Noël. Taylor avait l'impression d'avoir à peine cligné des yeux depuis la rentrée, en Septembre et pourtant presque quatre mois s'étaient écoulés.

— J'crois pas.

En vérité, il savait que non, ils en avaient discuté. Cayden n'aimait pas spécialement Noël tandis que les Moore étaient très attachés à la tradition, ce qui donnait lieu à une soirée assez éprouvante pour quelqu'un n'appréciant pas ça – entre repas interminable et ouverture d'une montage de cadeaux pendant des heures.

— J'lui redemanderai confirmation s'tu veux.

— Je veux bien. C'est pour prévoir le repas.

— D'accord. Je t'aiderai à le préparer !

— T'es gentil, mon chéri.

Amelia lui sourit. Il crut déceler un éclat de tristesse dans le fond de ses yeux et mue d'un soudain élan, il alla l'enlacer avec tendresse.

— J't'aime maman, tu l'sais hein ?

— Bien sûr, souffla-t-elle en lui rendant son étreinte, pourquoi cette déclaration soudaine ?

— J'sais pas. On se le dit pas assez.

— Moi aussi je t'aime, mon grand.

Elle lui passa la main dans les cheveux avec affection. Taylor embrassa le haut de son crâne, saisit une banane dans la corbeille à fruits et quitta la maison. Il enfourcha son vélo et roula en direction de chez Cayden. C'était quelque chose qu'il appréciait en vivant ici : peu de gens se déplaçaient en voiture. Ils préféraient bien souvent les scooters ou les vélos. Taylor trouvait ça agréable. Tahiti avait ses défauts, comme partout, mais il aimait vivre ici. Il se souvenait peu de l'Amérique : il lui préférait aisément l'île polynésienne.

Il ne mit pas longtemps à arriver devant la demeure des Tavae'ura. Laissant son vélo devant, il grimpa d'un pas les deux petites marches du perron et toqua à la porte. Il ne put s'empêcher de hausser les sourcils quand celle-ci s'ouvrit sur Temanao.

Les embruns sur nos joues [BXB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant