21. En désespoir de cause

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Cela faisait déjà six jours que ces mots étaient sortis de la bouche d'Alexandre. Six jours qu'ils avaient été suivis par un silence insoutenable que Charles avait brisé en déclarant : « Donne-moi une semaine. Je te prouverai que tu n'as pas besoin de démissionner et que je n'ai certainement pas besoin de chercher un autre écuyer. »

Alexandre n'avait aucune idée de ce qu'il avait en tête. Sans rien dire de plus, le chevalier avait simplement redirigé la conversation vers les pistes que Gaïa et Alexandre pourraient suivre à Paris. L'écuyer était au moins rassuré de voir que son maître acceptait de rester à Versailles pendant qu'il irait enquêter avec la jeune femme.

La tension entre Alexandre et Gaïa s'était vite dissipée face à l'urgence de la situation. Le prince devait rencontrer son ami dans la semaine pour effectuer des essais sur la bombe, et il leur fallait agir vite.

Ce qu'ils découvrirent leur fit froid dans le dos. L'ami du prince avait conçu un explosif très petit, mais dont la puissance était telle qu'il pourrait facilement détruire une aile entière du château. Gaïa avait passé ces deux derniers jours enfermée dans le pavillon isolé qui lui servait de laboratoire. Elle n'avait eu de cesse d'essayer d'y reproduire cette bombe pour en découvrir les secrets. Aujourd'hui, ils devaient s'y réunir tous les trois afin de mettre Charles au fait de leurs trouvailles.

Alexandre était en train de s'y diriger, l'excitation à l'idée de revoir le chevalier ajoutant un peu d'entrain à son pas et lui faisant oublier le mélange de pluie et de neige qui lui glaçait les os. Les mots de Charles ne l'avaient pas quitté. La semaine touchait à sa fin, et Alexandre ne retrouvait plus en lui l'assurance qu'il avait eue en suggérant sa démission à son maître. Il espérait que l'homme aurait trouvé une autre solution... Il n'était pas prêt à mettre son propre plan à exécution.

Il était en avance quand il arriva. Sachant que Gaïa aurait congédié tous ses domestiques aujourd'hui, Alexandre entra sans attendre. Il remonta un long couloir, ignorant les portes fermées qui donnaient sur des serres de plantes vénéneuses. Lorsqu'il arriva devant l'apothicairerie de Gaïa, il frappa, et la jeune femme lui ouvrit.

— Alexandre, bonjour ! Charles n'est pas encore arrivé.

Elle le fit pénétrer dans la pièce et Alexandre soupira d'aise en enlevant son manteau. Il y avait une cheminée dans un coin de la pièce. Gaïa avait dû l'allumer tôt dans la matinée, car la chaleur qui s'en dégageait vint s'envelopper en un instant autour de ses membres paralysés par le froid.

— Installez-vous, poursuivit Gaïa en finissant de ranger quelques herbes. Julie est passée ce matin. Elle m'a apporté du chocolat. J'ai pensé que nous pourrions essayer de faire du chocolat chaud, ça vous tente ?

L'écuyer écarquilla les yeux en prenant place dans le canapé.

— Avec plaisir, mais comment s'en est-elle procuré ?

— Oh, vous la connaissez, elle est de toutes les combines...

— C'est vrai..., dit-il en riant. Comment allait-elle ?

— Très bien... Nous avons parlé de vous.

— De moi ?

— Hmm...

Gaïa leva la tête pour lui lancer un regard réprobateur.

— Elle m'a parlé d'Agnès... Vous acceptez des rendez-vous avec des demoiselles, maintenant ?

Alexandre ne put s'empêcher de grogner, rejetant sa tête en arrière.

Tôt dans la semaine, Marielle l'avait abordé et, sans lui laisser le choix, lui avait présenté la jeune cuisinière. Il avait fini par promettre de passer un peu de temps avec elle à Noël. Cette promesse n'avait eu de cesse de le hanter depuis.

Les Amours du Chevalier d'ÉonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant