6. Transe

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TW : descriptions contenant des violences physiques

Les deux hommes saluèrent les soldats qui gardaient l'alcôve, et s'approchèrent des jeunes Mutticas récemment inhibées. Auguste sortit un glaive de son fourreau et le maintint en évidence devant les yeux des adolescentes pour dissuader toute tentative de rébellion. Comme si la garnison de soldats impériaux n'était pas déjà une démonstration de force suffisante, alors même qu'elles venaient d'être amputées de leurs pouvoirs, seules armes offensives qu'elles auraient pu utiliser contre eux. Un autre Mage médecin était déjà présent, et avait commencé à administrer l'atanevar aux Mutticas adossées au mur de gauche. Juste se dirigea vers celles qui se tenaient contre la paroi opposée.

Celle qui était la plus proche de lui pleurait, bercée par une autre adolescente qui lui frottait les épaules d'un geste réconfortant. À leur approche, elles eurent un mouvement de recul. Le jeune homme murmura d'une voix qui se voulait la plus neutre possible :

— Episuna. Je m'appelle Juste.

Il avait articulé lentement, pour être certain qu'elle comprenne ses paroles. Ces créatures barbares s'étaient toujours entêtées à communiquer dans leur langue maternelle, ce qui ne facilitait pas toujours la tâche à l'Empire, même si la majorité des Mutticas était bilingue.

La jeune fille releva la tête vers lui d'un geste rageur. Elle avait les paupières tirées, les yeux rougis et emplis de larmes, mais son regard le transperçait de part en part... comme s'il lui avait lui-même infligé le supplice de l'Inhibition. Si cette haine viscérale à son encontre l'avait surpris au début, lorsqu'il n'était qu'un Mage médecin débutant, cela faisait désormais plusieurs années qu'il ne s'en formalisait plus. Les Mutticas étaient gouvernées par leurs émotions, elles ne faisaient pas la différence entre un Citoyen ou un autre, et ne montraient aucune reconnaissance pour le temps investi à administrer l'antidote à chacune d'entre elles.

Il remarqua que, comme nombreuses de ses congénères, elle soutenait son poignet droit en osant à peine bouger les doigts de sa main. La Marque du Serpent était déjà bien visible : la chair noircie et flétrie par le fer rouge formait le corps ondulé d'un serpent. Le motif reptilien se détachait déjà parfaitement du reste de sa peau dorée, rougie par l'inflammation. L'adolescente fut parcourue d'un frisson de fièvre, mais serra les dents et ne laissa échapper aucun gémissement de douleur devant lui.

Le Mage versa quelques rasades du précieux liquide dans un petit récipient et le tendit à la jeune fille, expliquant ce qu'il contenait, même s'il était certain qu'elle en avait déjà conscience. Cela faisait plusieurs années que leurs deux peuples avaient négocié l'utilisation de cet antidote, et les Inhibées savaient qu'elles avaient tout intérêt à boire l'atanevar. En revanche, elles ignoraient les pouvoirs de Juste, et sa possibilité d'apaiser leurs maux.

Après qu'elle eut avalé d'un trait le contenu du gobelet, il désigna son poignet meurtri :

— Puis-je ?

Il avança la main vers sa blessure, et elle le regarda faire, méfiante, sans s'écarter pour autant. Lorsqu'il toucha sa peau, il sentit d'abord la différence de température : elle était déjà très fiévreuse. Mais le breuvage agirait suffisamment vite pour faire retomber la fièvre avant que cela ne devienne trop dommageable. Il ferma les yeux et se concentra sur le corps frêle de la Muttica. Il visualisa en une seule pensée, tous les vaisseaux, veines et artères qui l'alimentaient. Il se représentait l'inflammation diffuse dans tout son bras droit, culminant dans son poignet, contaminant ses nerfs, ses ligaments et ses muscles, du bout des doigts jusqu'à l'épaule. Il porta d'abord toute son attention sur ce symptôme, et s'efforça de faire diminuer la chaleur et la douleur, centimètre par centimètre, jusqu'à ce qu'elle ne soit réduite qu'à un mince espace autour de la blessure infligée par la morsure du serpent, puis du fer.

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