8. La criminologie est une femme

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"Wasting my Young Years".

Toi et moi, ça faisait longtemps.

On peut juger ses goûts musicaux peu développés, il est vrai.

Parce qu'elle réserve les vrais, les morceaux qui l'écorchent de plein fouet pour ce genre de situation.

Celle où elle s'écroule, son casque sur les oreilles, en criant de toutes ses forces.

Heureusement qu'elle est seule, sans voisin aux alentours.

On aurait pu appeler la police.


Ce jour-là, elle l'avait aussi écouté.

Après ce passage dans une ruelle, à l'abri des regards.

Elle ne sait plus très bien comment elle est rentrée, elle sait juste comment ça s'est fini.

Elle a tourné le dos, sans même se retourner.

Avant de remettre sa musique, comme si de rien était.

Cette chanson était apparue aléatoirement.

Ce n'est pas un hasard.


Elle a encore la sensation sur sa cuisse.

Ses lèvres plaquées contre sa bouche fébrile.

Toutes ces remarques.

Cette désinvolture.

Ce mépris.

Et surtout, ce petit connard de flic qui la prenait aussi pour un bout de viande.

Lui aussi de toute façon en serait arrivé à franchir les limites ?


Nier, c'est toujours mieux que d'accepter.

Elle ne peut pas.

Elle est née sous le signe du serpent; elle le restera.

Ivy est morte il y a bien longtemps.

Encore plus à l'heure actuelle.


Elle effleure de ses doigts le piano qui n'a pas servi depuis des lustres, des larmes se traînent dans le trémolo de sa voix.

Elle s'assoit sur le petit siège d'appoint, fermant de nouveau les yeux.

Se rappeler de toutes les notes, griffonnées dans un carnet, sous une douche glacée.

Elle est magnifique cette chanson.

Qu'importe ce que dit les paroles, c'est la sienne.

Celle qui s'est enclenchée automatiquement quand sa deuxième vie a commencé.

Ainsi, elle avait pris conscience que les hommes seraient tous les mêmes.

40 balais ou non, ce sont des incapables.


Alors, elle ne fait que ça, jouer et chanter cette chanson, chutant parfois tant elle est émue et chancelante.

Mais, ça personne ne le voit.

Jamais.

Ne me jugez pas.


Puis, elle se repose sur son siège, les larmes n'arrivant même plus à couler.

Son maquillage est sans doute salopé, comme elle, c'est toujours pareil.

Elle se pose dans une lente agonie, comme si elle venait d'atteindre l'orgasme.

Ivanova, je n'ai que toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant