La cage du petit oiseau

Chapitre 14

Pénélope se réveilla le lendemain, toujours pansée au niveau du front et du corps. En descendant les escaliers, elle découvrit une assiette de toasts et un verre de lait sur la table, accompagnés d'un mot.

" Bonjour Pénélope,

J'espère que tu te sens mieux aujourd'hui, et que tes blessures te font moins mal. Je préparé des toasts et du lait pour ton petit déjeuner. Je souhaite que tu te reposes aujourd'hui, ne sors pas. "

Ne pas sortir ? Qu'allait-elle faire alors ? La sorcière n'était même pas avec elle..

Pénélope s'assit, dégusta les toasts soigneusement préparés par la sorcière, puis termina en buvant le lait. Le temps passait lentement, elle ne savait pas quoi faire. Tout ce qu'elle fit de la journée était : dessiner, lire un livre, regarder par la fenêtre.

En s'allongeant sur son lit, elle attendait que la sorcière revienne.

Il faisait désormais nuit.

Le ciel était sombre, le souvenir du ciel étoilé lui revint alors à l'esprit. C'était la première et la dernière fois qu'elle avait vu un si joli paysage. Son monde semblait à présent fade à ses yeux, en contraste avec celui qui se cachait derrière les hautes herbes. La sorcière n'était toujours pas revenue, Pénélope se demandait ce qui pouvait bien lui prendre autant de temps pour rentrer. Elle se leva de son lit.

" Même si elle m'a dit de ne pas sortir, j'en ai assez d'attendre. Je vais aller la chercher. "

Elle sortit de la maison en fermant doucement la porte, et se mit à la recherche de la sorcière. Il y avait le son des criquets, et une légère brise balayait délicatement les feuilles des arbres tandis que leurs ombres se prolongeaient sur le sol, créant des silhouettes mouvantes dans l'obscurité. Elle trouva enfin la sorcière, éclairée par la lune au-dessus d'elle.

" Là voilà ! "

Sans y avoir prêté attention, une autre présence se tenait auprès d'elle. Pénélope ne pouvait pas distinguer à première vue cette personne, mais en s'approchant et en regardant de plus près, elle fut surprise de découvrir l'identité de cet individu. Un petit chien : Ricky.

" Quoi ?! C'est lui ?! Parmi tous les autres enfants, il a fallu qu'elle soit avec lui ! "

Son sang commençait à bouillir, une rage enveloppait tout son corps. Elle devenait brûlante. Les deux autres discutaient et ne semblaient pas la voir, leurs paroles étaient si inaudibles que Pénélope ne pouvait rien entendre. Cette dernière ne s'attendait pas à ce qu'elle allait voir ensuite : la sorcière caressa tendrement Ricky, et ce dernier lui rendit l'étreinte avec affection. Face à ce spectacle, une montée de jalousie l'envahissait, mais par-dessus tout, elle se sentait blessée. N'était-il pas naturel pour une enfant comme elle de se sentir de la sorte ? Folle de rage, elle sortit des bois et retourna à la maison. Étant montée dans sa chambre, elle attendait le retour de la sorcière. Elle la vit finalement arriver, apparaissant à travers la fenêtre. La sorcière était rentrée, et Pénélope descendit la voir.

" Bonsoir Pénélope, as-tu pu te reposer ? "

La fillette ne répondit pas, elle était toujours en colère.

" As-tu mangé ? Sinon, je peux te préparer quelque chose.

- Je n'ai pas faim, prononça-t-elle d'une voix tranchante.

- Je vais quand même te préparer quelque chose, tu pourras venir manger quand tu auras de l'appétit.

- Arrêtez votre mascarade, je vous en prie. Ne faites pas semblant de vous préoccuper de moi, lâcha-t-elle, pleine de désinvolture.

- Pourquoi dis-tu cela ?

- Arrêtez de me prendre pour une idiote ! Je vous ai vu avec lui ! Cet autre enfant ! "

Pénélope avait commencé à élever la voix.

" Ne suis-je pas assez pour vous ? Ne suis-je pas spéciale ?!

- Que me racontes-tu ? Voyons, Pénélope, ce n'est pas ça.

La sorcière s'approcha d'elle à petits pas.

- Ah ! Vous n'êtes presque jamais là. Vous ne me demandez jamais où est-ce que je vais. Vous ne me demandez jamais ce que je fais de mes journées pour éviter de m'ennuyer ! "

Sous le coup de la colère, elle prit l'assiette qui contenait autrefois les toasts, encore posée sur la table, et la jeta soudainement par terre. La sorcière se figea et ne dit rien.

" Pourquoi.. pourquoi ne réagissez-vous pas !? Faites quelque chose ! Grondez-moi !

- Ne bouge pas Pénélope, je vais ramasser ça.

Face à cette réaction, la jeune fille brailla en s'écroulant au sol, les morceaux de verre tout près d'elle.

- J'en ai assez !!

- Pénélope !

- Frappez moi, madame ! S'il vous plaît ! implora Pénélope, les larmes coulant sur ses joues. Elle sanglotait et était submergée par des émotions intenses, sa voix émue résonnait dans la pièce.

- Tu ne sais pas ce que tu es en train de dire !

- Madame, vous me détestez ? Si oui, je préfère mourir que de rester là ! Grondez-moi, je vous aimerai. Frappez-moi, je vous aimerai. Tuez-moi, je vous aimerai.. Je continuerai toujours à vous aimer ! C'en est tellement douloureux ! Je n'arrive plus à le supporter ! "

La sorcière ne cilla pas d'un pouce.

" Je sais que vous n'avez pas besoin de moi, mais moi j'ai besoin de vous !

Pénélope continuait de larmoyer, emplie de désespoir.

- ..Je vais aller chercher un balai pour ramasser les morceaux de verre, déclara la sorcière.

En s'éloignant pour trouver un balai, elle fut aussitôt rattrapée par Pénélope qui l'enlaça.

- Non..!! Ne me laissez pas !!

- Pénélope, je vais juste aller chercher..

Elle ne put terminer sa phrase, Pénélope l'interrompit.

- Restez avec moi, madame..!! Ne me détestez pas, s'il vous plaît ! Si vous ne m'aimez plus, qui va m'aimer alors ? "

Elle lança à la sorcière un regard empreint de pitié.

" Je vous en prie.. continuez à m'aimer comme moi je vous aime ! "

La sorcière demeurait silencieuse.

" Vous auriez dû me dire depuis le début que je n'étais qu'un fardeau pour vous, au lieu de me donner de faux espoirs..!

- Pénélope, s'il te plaît..

- Je ne comprends pas pourquoi je n'arrive pas à vous haïr.. Vous avez fait tellement de choses qui m'ont blessée.. Mais quand je crois vous détester, j'ai l'impression que c'est moi qui me déteste !! Ne me laissez pas, s'il vous plaît.. ne m'abandonnez pas.. Je ne veux pas être seule.. J'ai besoin de vous. Je vous aime.. je vous aime tellement, madame.. "

Pénélope pleurait à chaude larme, tenant la sorcière dans son étreinte.

Quelques temps après cela, elle s'était endormie. La fatigue avait fini par l'emporter, après tant de sanglots. Elle dormait là, paisiblement dans son lit. La sorcière ouvrit doucement la porte de sa chambre, sans faire aucun bruit. Elle s'approcha de Pénélope et l'observa avec tant de compassion, malgré le voile qui cachait son visage. Sa douce main lui caressait lentement les cheveux.

" C'est à cause de ce genre d'évènement que je ne veux plus que tu restes ici..

Adieu, Pénélope. "