14| Alice sème le malheur parce qu'elle est malheureuse.

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« Combien de temps dure une éternité?
Parfois, juste une seconde. »






Eros


Monaco.

Dans quelques jours.

Le départ est imminent et j'ignore les appels de Cameron depuis presque une semaine. Je néglige mes problèmes et tout ce qui en découlera parce que je ne peux pas louper ça. Cette chance est l'unique avant le Monza pour gagner, réellement.

Contre la vie.

Parce que Daemon peut aller se faire voir. Lui et son taré de mec – parce que ce qui les lie est bien plus profond qu'une simple amitié – peuvent crever en enfer. S'ils pensaient que me torturer me ferait renoncer à un Grand Prix, qui plus est l'avant-dernier de la saison, alors ils se fourrent le doigt dans l'œil.

Je suis toujours débout, et en ce moment même je prends un virage à plus de deux cents kilomètres par heure. Tandis que je suis installé dans le cockpit de ma McLaren, mon corps tangue de droite à gauche à mesure que j'accélère. Je n'ai plus rien à perdre, si ce n'est la vie, mais que vaut-elle face aux menaces de Cameron ?

Je l'aimais comme un putain de frère.

Maintenant, elle est fade, sans goût, bien qu'elle laisse toujours une traînée âcre sur le bout de ma langue.

Elle ne vaut plus rien, je l'ai perdu.

J'ai perdu celui qui me poussait à me dépasser. Même si je n'étais pas à la hauteur, Cameron m'a pris sous son aile. Il était mon pilier. Aussi, je le regardais comme un mentor, comme le grand frère que je n'ai jamais eu.

« Eros... Dépêche-toi, bon sang ! »

« Montre folle, montre folle, montre folle ! »

« Lâche ta montre et viens là ! Ils arrivent, cache-toi. »

Le grand frère que... Il ne me reste plus rien.

Je tourne à gauche et les pneus crissent pendant que j'accélère pour dépasser plusieurs voitures. Étonnement, c'est toujours à l'entraînement que je réussis le mieux les parcours. Quand les enjeux sont plus sérieux, je perds mes moyens.

Les ailerons arrière se déploient tandis que j'avance près du but, de la ligne d'arrivée.

Cameron veut me voir.

Tout est sur le point d'exploser. L'échéance approche et elle porte un nom.

Elle.

Cette fille que j'ai rencontrée sur le toit d'un entrepôt abandonné. Alors que ses jambes étaient ballantes dans le vide, son regard abritait un trou noir sans fond.

Et depuis lors, mon esprit ne veut plus se débarrasser d'elle.

Je me rappelle de la sensation de ses mains sur mon torse...

Putain, cette saleté de peste souhaite me pousser à bout et je tombe à genoux devant ses yeux aux couleurs d'une vague scélérate comme un imbécile. J'accepte ma défaite, je l'ai laissé me toucher. Moi qui abhorre le contact humain, là, je voulais la sentir plus près. Je voulais explorer sa peau. Je désirais la comprendre.

Fall est une garce.

Mais derrière chaque masque de méchanceté se cache une âme meurtrie, déguisée de confiance et de quelques paillettes. Dois-je avouer que l'envie de sonder chaque recoin de ce qui la compose, aussi infâmes soient-ils, me démange ?

The Pilot UnionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant