XII - Soirée électorale

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Adrien n'oublia pas la conversation qu'il avait eue avec son cousin. Elle lui avait fait réaliser que, même s'il partageait depuis plusieurs semaines sa demeure, il le connaissait peu.

S'interroger sur Félix lui fit comprendre qu'il ne s'était jamais posé la question la plus importante : quel était son objectif quand il portait le masque d'Argos ? Pourquoi effacer le monde ? Félix n'était pas un sociopathe. Il avait cherché à épargner Marinette, conscient qu'Adrien ne serait pas heureux sans elle. Et il avait abandonné son projet quand Adrien et Kagami le lui avait demandé. Il avait été touché par leur détresse.

Il avait dû subir une blessure profonde, une trahison qui lui avait fait perdre toute confiance en l'humanité, supposa Adrien. Il ne manquait pas d'amour, cependant. Amélie était une mère aimante. Elle avait laissé à son fils énormément de liberté au vu de son âge, mais ce n'était pas par indifférence. Adrien était persuadé qu'elle savait tout ce qu'il avait fait. Elle avait considéré Félix assez mature pour gérer un grand pouvoir. Elle avait sciemment menti à Ladybug et Chat Noir, songea-t-il soudain. Était-ce pour que son fils n'ait pas de problème ou considérait-elle, elle aussi, que Félix avait une bonne raison d'avoir mis Paris en danger ? Son cousin avait-il agi sous la contrainte ?

Aujourd'hui, son cousin prétendait conserver le Miraculous du paon. Pourquoi y tenait-il tant ? Que pouvait-on faire d'une amulette qui sert à créer des monstres ?

Adrien aurait bien aimé savoir ce qui liait Félix à ce Miraculous. Mais il comprenait aussi qu'on veuille garder pour soi ses blessures intimes. Lui, qui devait se grimer pour sortir de chez lui, qui savait que chaque faux pas en public serait rapporté par la presse, comprenait le besoin d'intimité.

Il était conscient qu'il n'y avait aucune raison pour que son cousin partage ses secrets avec lui. Peut-être qu'il devrait tenter d'être plus amical avec lui, se surprit-il à penser. Prendre en compte que Félix avait souffert, et qu'il était difficile pour lui de s'ouvrir aux autres.

Il manquait de tact, était souvent sur la défensive, mais Adrien devait reconnaître qu'il avait fait des progrès depuis son arrivée à Paris. Il avait de moins en moins l'air hautain en compagnie des copains, acceptait parfois de se mêler à leurs jeux. Il les avait même suivis dans leur campagne politique, même s'il était évident qu'il se fichait bien de qui allait remporter la mairie de Paris. Il avait adapté son style vestimentaire pour ne pas trop se démarquer. Il restait toujours très élégant, cependant (mais cela, Adrien ne pouvait le critiquer, car son éducation lui avait appris qu'on peut être trop habillé, mais jamais trop élégant). Félix avait troqué sa chemise et sa cravate contre des polos blancs et T-shirts anthracite. Il avait laissé tomber la veste, ne gardant que le gilet sans manches. La casquette Gavroche prêtée par Nathaniel lui donnait un air décontracté qui lui allait très bien. Il faisait des efforts, c'était évident. Peut-être même qu'il serait fréquentable, d'ici à quelques mois.

Et Adrien ne pouvait pas non plus occulter que Ladybug était au courant du secret de Félix et qu'elle lui avait laissé le Miraculous. Il n'imaginait pas avoir une autre opinion que sa Lady. Elle avait pu pardonner un acte qui l'avait plongée dans les affres de la culpabilité et la peur d'échouer, qui avait sans doute prolongé les attaques sur Paris. Qui était-il pour remettre en cause son jugement ?

Adrien devait également prendre en compte que Marinette s'entendait très bien avec Félix. Il suffisait qu'elle intervienne pour qu'il se montre plus accommodant. Il était évident qu'il la respectait et qu'il souhaitait recevoir son approbation. Quelques semaines plus tôt, cela avait inquiété Adrien. Mais à présent, il ne pensait plus que son cousin puisse vouloir du mal à son amie, pas plus qu'il ne voulait la séduire. Félix cherchait simplement à être ami avec Marinette. Sa petite amie avait ce genre d'effet sur les gens, songea Adrien, sans pouvoir s'empêcher de sourire avec fierté. Si quelqu'un pouvait avoir une bonne influence sur son cousin, c'était bien elle.

Lis dans mon cœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant