Le passé

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Chapitre 10: Le passé


J'étais figée, dévisageant Angela, qui ne comprenait pas ce qui était en train de se produire. Je cherchais mes mots, ouvrais la bouche, la refermais, comme si mon état intérieur se répercutait sur mon état physique. Je pris enfin la parole après de longues secondes qui ont dû paraître des heures pour elle comme pour moi. "Vous avez eu des jumelles ?" Je répétais comme pour m'assurer d'avoir entendu correctement. "Vous n'en avez jamais parlé auparavant." Je me suis mise à réfléchir après avoir réalisé quelque chose. "Mais vous n'en avez jamais parlé à personne. Alors même Jane n'est pas au courant, comment est-ce possible ? Angela, je ne comprends plus." Elle me regardait avec un air désolé devant l'état dans lequel je me trouvais actuellement. Elle avait toujours des larmes qui descendaient le long de ses joues rougies par l'émotion. Elle finit par prononcer les premiers mots de son long discours.

"Quand je suis tombée enceinte pour la toute première fois, j'étais à la fois la femme la plus heureuse du monde, mais aussi la plus effrayée. J'étais mariée à Frank et nous étions heureux, mais là n'était pas le problème. Mon père était un homme dangereux, il me rappelle même Paddy. Quand je lui ai annoncé ma grossesse, il n'a pas réagi de la façon dont on devrait réagir en apprenant que l'on s'apprête à devenir grand-père. Il ne me pensait pas assez forte pour ça, pas assez mature ou je ne sais quoi d'autre, pour devenir mère. Alors le jour où j'ai appris que j'attendais des jumelles, j'ai vu mon monde autour de moi s'écrouler. Un enfant, c'était déjà trop pour mon père, mais alors deux en même temps, c'était beaucoup trop dangereux pour mes filles et pour moi. Alors on en a discuté avec Frank. La meilleure solution que l'on a trouvé, ça a été l'adoption d'une des deux filles. On s'était promis de ne jamais en parler à personne. C'était une question de sécurité, tu comprends ? J'ai dû faire le choix le plus dur de toute mon existence, à savoir choisir laquelle de mes filles je ne reverrais sûrement jamais." Elle sortit une photographie cachée dans son portefeuille et me la donna. La petite photo représentait Angela sur un lit d'hôpital, deux bébés dans les bras. Jane et Lena. "Tu les aurais vues en vrai, elles étaient magnifiques Maura, si tu savais. Elles étaient parfaites." Un sourire faible se dessina sur son visage au souvenir de ce jour à la fois merveilleux et terrible. Puis son regard s'assombrit de nouveau. "Le jour où j'ai vu la sage-femme prendre Lena, une partie de moi est morte. C'est comme si depuis ce jour, j'avais ce gouffre dans mon cœur que rien, non rien, ne pouvait combler, à l'exception de Lena. Mais ce gouffre ne pourra plus jamais être comblé maintenant. Plus jamais. Elle est partie." Alors à cet instant, elle se fit noyer dans une vague évidente de culpabilité et de désespoir. Sa voix se mit à trembler, étouffée par les pleurs qui devenaient de plus en plus envahissants. "Je n'ai jamais eu l'occasion de la rencontrer en personne, à partir du jour où je l'ai vu quitter cette chambre d'hôpital. Je n'ai pas eu l'occasion de la voir faire ses premiers pas, de la voir grandir, de la voir échouer et réussir. Je n'ai jamais pu savoir comment elle était, son caractère, sa personnalité, ses goûts et ses dégoûts. Je suppose que ce sont des questions qui resteront en suspens jusqu'à ce que j'aille la rejoindre."

"Angela ne dîtes pas ça." J'ai protesté en réponse de la tournure que la conversation avait prise. Je me suis avancée vers elle et lui ai pris ses mains dans les miennes, tout en la regardant dans les yeux. Je me suis mise à lui parler calmement pour essayer de calmer cette crise qu'elle était en train de traverser. "Écoutez Angela. Il est vrai que vous ne pouvez pas rattraper le temps perdu, mais d'une certaine façon elle n'est pas entièrement morte." Elle me regarda avec confusion alors je repris "Elle est dans les cœurs de ses proches. Sa famille pourrait sûrement répondre à vos questions. Tout n'est pas perdu."

"Maura, je ne peux pas faire ça." J'étais un peu surprise par sa réaction, elle continua. "Enfin Maura, tu m'imagines retrouver la trace de ses parents et de me présenter à leur porte en disant : "Bonjour, je m'appelle Angela Rizzoli, je viens vous dire que votre fille est décédée et que je suis sa mère biologique. Pourriez-vous me parler d'elle ?" C'est ridicule, je ne peux pas faire ça, je n'ai pas le droit." Je me mis à la regarder avec d'autant plus de compassion. Elle devait très certainement vivre un enfer inimaginable.

"Vous avez raison. Mais vous savez quoi ? Je pense qu'il faut mettre ça de côté pour le moment. Parce que vous venez de perdre un enfant, mais Jane est toujours dans la nature et on ne sait pas ce qu'elle peut être en train de traverser. Nous devons mettre les bouchées doubles pour la retrouver absolument, cela fait bien trop longtemps que l'on n'a pas eu de nouvelles et c'est à la fois bon et mauvais." Elle essuya ses larmes et se leva, un regard déterminé.

"Tu as raison, il faut la retrouver." Angela était réellement une femme forte, sûrement la femme la plus forte que je connaissais. Elle s'avança et me prit dans ses bras en me murmurant à l'oreille : "Merci d'être là, Maura. Ça signifie beaucoup pour nous tous." Elle me relâcha et je lui ai adressé un léger sourire qui parlait de lui-même. Ainsi, nous nous sommes mises en route vers le poste de police pour annoncer à tous que Jane était peut-être toujours en vie, et ainsi, qu'il fallait relancer les recherches.

Cette histoire était loin d'être terminée.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 29 ⏰

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