L'âge d'or

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Driving this road down to paradise
Letting the sunlight into my eyes
Our only plan is to improvise
And it's crystal clear that I don't ever want it to end
If I had my way, I would never leave
Keep building these random memories
Turning our days into melodies
But since I can't stay


J'arrête subitement de respirer quelques instants. Je pourrai parier que mon coeur s'est également arrêté de battre. La nuit est moite et tiède, et je me sens pourtant fébrile. Quasiment frissonnante. 

Je réfléchis rapidement. Je me sens heureuse ; mon corps tout entier semble être dans une plenitude rarement atteinte. Comme-ci, tout simplement, après toutes ces années, j'avais trouvé quelque chose qui me manquait. Comme si j'avais trouvé ma place, enfin. Un rôle que je n'avais pas encore endossé jusqu'à maintenant.

Je me rend compte que je souris. Mais depuis combien de temps ? Quelques minutes, quelques heures, quelques jours, quelques mois peut-être ? Tout est un petit peu confus. Et pourtant, je me sens si complète, si vivante.

Tout est si facile, les discussions s'enchaîent, les confidences s'alignent. Un monde de fous rires et de références connues de seulement nous semble s'étendre jusqu'à perte de vue. On est insouciants, on se rend compte qu'on ne veux pas que ça s'arrête, on pense que ça sera toujours comme ça. On continue à s'apprendre, jour après jour, et notre soif de connaissances l'un sur l'autre n'est jamais satisfaite. La vie est semblable à du velours. 

 Et soudain, ça me frappe. Mon coeur semble faire une descente de rappel au fond de ma poitrine. J'ai compris : 

On est dans l'âge d'or. Tout brille autour de nous. Et on brille au milieu.

Et pourtant. Je sais très bien qu'un jour, quand la lassitude nous aura enveloppé en entier, quand on prendra chacun l'autre pour acquis, que notre attention baissera, je sais très bien quand je me retournerais, je ne verrais plus que la pâle empreinte de nos pas. Effacés par les vagues de passion, d'émotion, par les grains de sables qui s'immisceront entre nous. Parce que les gens finissent toujours par s'effacer, n'est-ce pas ? C'est si facile de faire demi-tour et de laisser notre histoire s'effacer. Alors, je sais. Je sais qu'un jour, quand je voudrai regardèrent arrière, je me rendrai compte que tu n'es plus là. Que tu n'assures plus mes arrières.

Et que je devrais continuer sans toi. Parce que c'est comme ça que ça fonctionne, pas vrai ? 

Parce que rien ne dure éternellement. Tout a une obsolescence. Quand on se rend compte qu'on est dans un âge d'or, c'est qu'il est en fait déjà terminé. C'est une volupté très dissipée et très éphémère.

A nous de décider maintenant : est-ce qu'on continue d'avancer sans rien construire, est ce qu'on s'expose au temps, au vent, aux vagues, à tous les éléments ? Est-ce qu'on se laisse atteindre par tout ça, ou alors ?

Est-ce qu'on pourrait décider de créer quelque chose entre nous, une sorte de rempart, pour faire perdurer cette époque de grâce ? Il ne tient qu'à nous de faire mieux que ça, de s'impliquer à bâtir une relation solide, un phare qui nous rappellera à l'ordre si on se rapproche trop de la zone de danger. Un phare pour rester en vie. Alors prends ma main, regarde-moi, et posons les premières pierres. 


I'll just keep playing back
These fragments of time
Everywhere I go
These moments will shine
I'll just keep playing back
These fragments of time
Everywhere I go
These moments will shine
Familiar faces I've never seen
Living the gold and the silver dream
Making me feel like I'm 17


(Fragments of Time - Daft Punk)

Recueil de nouvellesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant