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Désormais face à elle, une silhouette obscure leva légèrement les mains dans la pénombre. Une à une des gouttelettes d’humidité bleues s’échappèrent de l’air et du sol pour voltiger et former un bouclier devant la nouvelle personne. La branche qui tournait dans l’air s’écrasa sur l’eau et rebondit mollement, pour retomber sur le sol avec le bouclier aqueux. Julie sortit la lampe du sac accroché en bandoulière à son épaule et  éblouit la personne en face d’elle grâce à celle-ci, pour avoir un peu de temps en plus et réfléchir à la suite. Un jean foncé, une paire de basket recouverte de terre ainsi que le bas d’un gilet gris étaient les seules choses qu’elle voyait de l’inconnu.

– Nom, prénom ! s’écria la jeune fille.

Elle jugerait plus tard si elle lui balançait en plus la lampe métallique ou si elle lui brisait une des bouteilles en verre sur la tête.

– Baisse la lumière, demanda la voix. 

Il n’y avait rien d’obligatoire dans sa proposition et c'en fut déconcertant. Le ton qu’il y mettait était blasé.

– Euh… non. Tu réponds à ma question ! ordonna-t-elle à son tour, déterminée.

– Tu crois vraiment que je vais répondre honnêtement à ta question ? interrogea-t-il avec rhétorique.

Elle poussa un long soupir d'exaspération, baissa légèrement la lumière de façon à ce qu’il ne soit plus ébloui et le toisa du regard. Son regard avait quelque chose de pur, cristallin. Il avait les yeux bleus clairs, des cheveux courts noirs et possédait une peau beige claire.

– Qu’est-ce que tu fais là en pleine nuit ? questionna-t-il simplement.

– Je te retourne la question. 

Seconde fois qu’elle sortait cette réplique… La première fois, Julie n’avait rien confié de vrai à son frère. Cette fois-ci, elle ferait sûrement de me face à un inconnu qui n’avait pas l’air beaucoup plus âgé qu’elle. Devant son silence, elle ajouta :

– Sinon, tu m'expliques le bouclier d’eau ou tu rentres chez toi.

– Non… et non, mais je t’invite à faire de même.

Ce garçon n’allait vraiment pas lui plaire… Mais elle n’avait pas peur de lui et elle était toujours pressée d’ailleurs.

– Où vas-tu ? Je peux t’accompagner ? interrogea-t-il en la voyant faire deux pas en arrière pour continuer son chemin.

– Ce ne sont pas tes affaires ! s’exclama-t-elle. 

Elle se retourna et reprit son chemin désormais mieux éclairé par sa lampe. 

Apparemment, elle n’avait pas été assez douée pour ne croiser personne et commença à se demander s’il ne l’avait pas suivi depuis le début de la forêt… Deux craquements plus tard, elle fit volte-face.

– Mais tu le fais exprès ! 

Elle avança de deux pas sur les cinq qui séparait l’inconnu et elle, et lui lança un regard noir. Le garçon avança, à son tour, d’un pas lui et proposa d’une voix assurée : 

– J’ai ma petite idée d’où tu veux aller et si tu ne veux pas te faire tuer au passage… Tu devrais me laisser t’aider.

S’il avait raison… Mais ce ne serait pas le cas. Il mentait pour l’intimider et la faire rebrousser chemin. Elle ne voulait pas non plus d’un coup de main. “Concentration !”, s’intima-t-elle. 

– Non. 

Elle serait prudente et ce n’était pas ses affaires de toute façon.

– Laisse-moi te suivre, insista-t-il. Je t’aurais à l’usure si tu n’acceptes pas…

Normale Où les histoires vivent. Découvrez maintenant