Au centre de Death Thing se tenait une gigantesque usine qui, malgré son apparence délabrée, avait fait la fierté de la ville. Si Death Thing était une si grande métropole c'était en partie grâce à l'usine Platik-co. Matériaux jetables, recyclables et réutilisables avaient fait le renom de l'entreprise.
Chaque année, pendant sa période de gloire, l'usine gagnait en hauteur ou voyait un nouveau bâtiment prendre naissance à ses côtés, affichant les bons résultats économiques et proposant ainsi de nouveaux postes. Mais ça, c'était il y a plusieurs années déjà, au grand dam d'Hank Schuchen. (a prononcer avec l'accent Allemand, Schuren)
Hank avait toujours imaginé sa fin de carrière en compagnie de sa femme et de ses enfants. Avec une retraite plus que suffisante ainsi qu'un fils désireux de reprendre l'entreprise familiale, pouvant ainsi s'installer dans leur belle maison secondaire située en basse campagne où il pourrait finalement se reposer et profiter des siens.
Mais il fallait savoir que Schuchen ne venait pas d'une famille aisée où il suffisait simplement de donner son nom pour que toutes les portes ne s'ouvrent. Bien au contraire. Ayant pour parents des agriculteurs qui n'arrivaient que très rarement à joindre les deux bouts, Hank avait passé le plus clair de sa jeunesse à les aider. Il avait donc décidé très vite qu'il ne suivrait pas cette voie professionnelle.
La ferme familiale était située non loin d'une grande périphérie où la première structure de Platik-co avait vu le jour. Alors, un matin des plus ordinaires où monsieur Schuchen labourait ses trois hectares de champs et que madame Schuchen s'occupait des deux derniers enfants, Hank avait enfilé son plus beau costume trois pièces marron passé et monotone puis s'en était allé postuler.
Hank avait débuté sa carrière en chargeant des cartons de matériaux sur des tapis roulants. Toujours dynamique et motivé, il était à chaque fois le premier à prendre son poste et surtout le dernier à le quitter en fin de journée. A peine âgé de dix-neuf ans, Hank avait su se démarquer des autres, c'était donc tout naturellement qu'on lui avait proposé un meilleur poste. Chargé ensuite de la maintenance de petite machine de triage, sans aucune formation bien entendu, Hank restait le plus tard possible chaque soir pour les étudier et ainsi mieux comprendre leur fonctionnement.
Trois années étaient passé et grâce à sa curiosité et sa compétence à tout mémoriser, il fut muté à plusieurs kilomètres de sa petite ville natale, laissant le soin à sa grande fratrie de s'occuper de la ferme familiale des Schuchen. La construction de cette nouvelle usine avait accordé de vraies responsabilités à Hank. En premier lieu, Hank avait pour mission de former les nouvelles recrues sur chaque machine aussi différentes que nombreuses. Son savoir sur chaque recoin, chaque détail était plus que minutieux.
De temps en temps il était convié aux réunions, tout d'abord pour donner son point de vue de simple employé et par la suite pour partager ses idées, essayant d'améliorer chaque poste et même d'en proposer de nouveaux. Puis enfin, Hank participa au grand projet et ainsi de nouvelles usines voyaient le jour partout dans le monde.
Ce n'est qu'après plus de trente-sept ans de bons et loyaux services qu'Hank se fit relayer au poste de secrétaire et chef remplaçant, si quelqu'un manquait à l'appel. On ne l'invitait plus aux réunions, les grands pontes n'avaient plus besoin de lui, et pour cause. A l'instar de Hank, tous avaient appris autant de lui, que lui en avait appris par lui-même tout au long de sa vie. Et de par son grand âge ainsi que tous les sacrifices accumulés durant toutes ses années, le PDG en personne lui offrit une place de choix. Nommant Hank Schuchen sous directeur de l'usine implantée à Death Thing.
Il n'avait concrétisé qu'une infime partie de son rêve, bien qu'il n'imaginait jamais parvenir jusque-là. Alors quand on lui avait proposé de seconder le directeur, il se sentit quelque peu réconforter. Enfin, c'était le cas au début.
Le directeur avait pour habitude de tout gérer, à tel point qu'Hank ne faisait qu'une partielle vérification de la paperasse. Il aurait pu profiter de tout ce temps libre avec sa famille, ses amis, mais ses sacrifices avaient englouti sa vie sociale. Habitué à être enfermé entre quatre murs, le vieil homme ressentait maintenant une certaine gêne à se mêler aux autres.
Plus d'un an s'était écoulé depuis sa promotion, Grugger, le directeur et supérieur hiérarchique d'Hank, ne prenait plus la peine de se présenter à l'usine. Et ce depuis plus de six mois, laissant Hank livré à lui-même, avec des employés qui ne nécessitaient aucunement son aide. Oeuvrant à la chaîne dans l'unique entrepot encore en service.
Mais Hank y passait quand même toutes ses journées et partait très tard à la tombée de la nuit, restant fidèle à ses habitudes. Routine qui, un soir pluvieux, allait changer pour toujours. Les derniers employés venaient de quitter l'usine pendant qu'Hank vérifiait pour la troisième fois que tout était fonctionnel pour la soirée. Dans un fracas assourdissant, surtout dû à la tempête qui se levait, la porte de l'accueil s'ouvrit violemment. Un homme, grand, très grand, aux épaules larges dans son trench coat beaucoup trop long, s'invita dans le bâtiment.
Ses long cheveux sombres se noyaient sur son imperméable en cuir usé. Une capuche sur la tête qui laissait tout de même entrevoir son visage anguleux aux joues creusées sur un teint grisâtre. Comme si sa peau était poussiéreuse. Il était pourvu d'un costume trois pièces aussi sombre que les ténèbres, c'était comme si les enfers s'étaient invités devant Hank.
Immobile au centre de l'entrée, son immense carrure en imposait face au chétif sous-directeur. Hank aurait voulu lui intimer de partir, mais son manque de courage en avait décidé autrement.
- Je suis désolé mais nous sommes fermé... Avait-il quand même soufflé d'une voix mal assurée.
L'étranger s'avança, en un battement, il se retrouva au plus proche du vieil homme. Beaucoup trop proche selon Hank. L'homme se pencha ensuite au-dessus de son oreille.
- Et si je te disais que je peux rendre ta vie encore meilleure. Son sourire n'inspirait rien de bon et pourtant Hank en fut directement subjugué.
En une phrase, une simple proposition, la vie de Hank Schuchen bascula pour toujours. Offrant une planque de choix au seul démon que l'on pouvait encore pardonner et qui finalement était tout aussi pervers que machiavélique.
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Dead
Science FictionDans un monde où les âmes sont précieuses, deux femmes se croisent dans un destin tragique. L'une avait décidé de donner son âme à une entité mysterieuse, perdant ainsi son humanité. Tandis que l'autre se trouvait simplement au mauvais endroit au...