XIV: L'héritage

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Byeol

Merde.

Et encore merde.

J'étais foutue. Piégée par ma propre décision de rester. Quelle idiote j'avais été de penser que je pouvais me fondre dans un groupe, à pouvoir agir comme si je n'avais rien à cacher. Et puis, depuis quand est-ce que je faisais dans la charité ? Par les Dragons ! Pourquoi m'étais-je embarquée dans cette mission suicidaire avec des étrangers que je connaissais à peine depuis quatre jours ? Leurs problèmes, la quête qu'ils avaient choisis de suivre, les villageois... Tout ça ne me concernait pas. Alors pourquoi je me retrouvais à nettoyer la merde qu'ils semaient avec leur soi-disant bonne grâce, comme si j'avais quelque chose à prouver ?

"Attends... quoi ?"

Le forgeron m'observait avec des yeux ronds. Et maintenant ? S'en était fini. Terminé les faux semblants, cette mascarade ambulante.

Partir. Immédiatement. La fenêtre était encore ouverte, j'avais une chance de fuir.

Mais je ne parvenais pas à bouger.

"Alors..." débuta lentement Dereek. "Tu veux donc dire que nous avons partagé notre couche avec une femme capable de faire voler notre tête à tout moment ? J'ai bien sommeillé parmi des hommes et des femmes couverts de mystères, mais là... c'est complètement risible..."

Mon cœur battait à tout rompre. J'avais perdu leur confiance.

"Je vous ait sauvé !"

La lame meurtrière jaillit de son fourreau, pointant désormais ceux qui ne voyaient en moi que l'ombre du mal.

"J'ai tenu mes engagements envers notre quête commune, jusqu'à présent. Je n'ai jamais été en votre encontre. Et même par cet aveu, c'est ce que je fais encore !"

Le forgeron et l'érudite eurent un mouvement de recul. Je pouvais voir la peur, la surprise qui se lisait dans leurs yeux. Je savais que ce moment finirait par arriver. Fatalement.

Néanmoins, Dereek... Ce faux imbécile, lui, ne répondit que par un étrange sourire. Un calme effrayant se drapait autour de lui tandis qu'il approchait lentement la main de sa besace.

"J'aurais préféré que tu sortes une autre épée que celle-ci... Pas de cela avec moi, ma belle..."

Je n'étais pas la seule à cacher mon jeu, ici.

Sélène prit la parole, doucement. Sa voix tremblait, à peine. Mais je l'entendais. Serait-ce de la peur ? Non. La façade qu'elle affichait était trop calme. Est-ce qu'elle contrôlait sa respiration pour ne pas laisser transparaître son angoisse ? Pourtant, je ne connaissais que trop bien le son de sa voix. Celui de l'incertitude, quand les mots ne sont qu'un voile pour cacher une vérité plus sombre.

"Nous nous ne doutons pas de ta foi, Byeol... "

Elle mentait.

"Ce serait mal placé de notre part, nous qui avons sûrement tous nos secrets..."

"C'est vrai, ça. On a tous un vécu. Certains sont plus lourds que d'autres..." renchérit Gunnar, lançant un bref regard suspicieux à l'alchimiste avant de revenir vers moi. "C'est normal de ne pas tout se dire par méfiance, on ne se connaît pas encore très bien. Mais t'en fais pas, j'ai pas oublié ma dette de vie envers toi. Bon bah c'est chouette alors, on pourra encore mieux se défendre !"

Son enthousiasme... qui était assez naïf pour se réjouir de la sorte ? Une dette de vie, tu parles... Qui la tiendrait pour une tueuse ? Ce n'était pas comme ça que les gens réagissaient lorsqu'ils savaient que la mort rôdait près d'eux. Etaient-ils tous fous ? Pourquoi ne m'attaquaient-ils pas ? Et Julia... Julia !

A l'encre de notre sang - [Aria JDR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant