Chapitre 2

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Marine marchait d’un pas rapide dans les ruelles sinueuses du Vieux-Port, le dossier pressé contre sa poitrine. Chaque bruit de pas résonnant derrière elle la faisait sursauter. Elle avait l’impression d’être suivie, mais à chaque fois qu’elle se retournait, il n’y avait personne. Son cœur battait encore la chamade, une montée d’adrénaline qu’elle n’avait jamais ressentie aussi intensément dans toute sa carrière.

Arrivée devant l’entrée discrète de son immeuble, elle monta les escaliers quatre à quatre, ignora l’ascenseur en panne depuis des mois, et se précipita dans son appartement. Elle ferma la porte à double tour et s’effondra sur sa petite table de cuisine, haletante.

Elle ouvrit le dossier qu’elle avait réussi à subtiliser et commença à examiner les documents. Ce qu’elle y trouva dépassa de loin ce qu’elle avait imaginé. Des noms de politiciens, de chefs d’entreprise, et même de membres des forces de l’ordre étaient mentionnés, tous liés par une toile d’intérêts communs et d’activités criminelles orchestrées par une entité mystérieuse : "Les Ombres du Port". Ce nom revenait sans cesse dans les rapports, sans jamais être pleinement expliqué. Mais il était clair qu’il s’agissait de bien plus qu’un simple groupe criminel. C’était une organisation souterraine, avec des ramifications dans toute la ville.

Parmi les noms, certains lui étaient familiers : des figures respectées de la société marseillaise, intouchables à première vue. Comment cette organisation avait-elle pu prospérer dans l’ombre, protégée par ceux qui étaient censés faire respecter la loi ?

Marine n’avait aucune réponse, mais elle savait qu’elle tenait là une histoire explosive. Cependant, révéler ces informations au public nécessitait plus que des intuitions. Il lui fallait des preuves solides, quelque chose qui tiendrait devant un tribunal ou qui pourrait faire tomber ces figures influentes sans qu’elle ne soit réduite au silence avant d’avoir pu parler.

Elle continua de fouiller le dossier. Il contenait des photos prises de loin, montrant des réunions secrètes sur les quais déserts du port, des transferts de mallettes entre des hommes en costume, des cargaisons suspectes déchargées en pleine nuit. Mais une photo en particulier attira son attention. Elle montrait un homme, de dos, avec une cicatrice distinctive sur la nuque. Cette image était entourée de notes griffonnées en marge, indiquant que cet homme était un acteur clé des "Ombres". Mais son identité restait un mystère.

Marine mémorisa les détails de l’image. Cet homme pourrait être sa première piste concrète. Elle avait besoin de quelqu’un qui connaissait le terrain, quelqu’un qui pourrait l’aider à identifier ce genre de personnes sans attirer l’attention. Son réseau de contacts était solide, mais dans cette affaire, elle devait être extrêmement prudente. Elle décida de contacter Samir, un ancien flic devenu détective privé, qui connaissait bien les bas-fonds de Marseille.

Elle sortit son téléphone et lui envoya un message crypté, demandant à le rencontrer le soir-même dans un café assez discret. En attendant sa réponse, elle commença à prendre des notes sur ce qu’elle avait découvert, organisant les informations pour comprendre l’étendue de ce réseau.

Quelques heures plus tard, son téléphone vibra. C’était un message de Samir : "OK pour ce soir. 21h, au Café de la Mer. Sois discrète."

Marine soupira de soulagement. Samir avait une réputation d’homme fiable, mais cette fois, elle savait qu’il prenait un risque en l’aidant. Elle jeta un coup d’œil par la fenêtre. Le soleil déclinait déjà, teintant les toits de la ville de nuances dorées. L’heure du rendez-vous approchait, et avec elle, la promesse de réponses… ou de nouveaux dangers.

À 21 heures précises, Marine franchit la porte du Café de la Mer, un petit établissement sombre où le bruit des conversations masquait toute tentative d’écoute indiscrète. Samir l’attendait à une table au fond, son visage partiellement caché par l’ombre.

— Marine, murmura-t-il en lui serrant la main. Qu’est-ce que t’as encore déniché ?

Elle s’assit et lui glissa la photo de l’homme à la cicatrice.

— Cet homme, dit-elle doucement. Il est lié à quelque chose de gros, Samir. Très gros. Je dois savoir qui il est.

Samir examina la photo avec attention, plissant les yeux pour distinguer les détails.

— Je le reconnais, dit-il enfin, la voix grave. On l’appelle "Le Spectre". Personne ne connaît son vrai nom, mais tout le monde sait qu’il est dangereux. Il n’est jamais resté en prison plus de quelques heures, et les rares fois où il a été arrêté, les charges ont mystérieusement disparu.

Marine sentit un frisson lui parcourir l’échine. Ce qu’elle avait entre les mains était peut-être plus dangereux qu’elle ne l’avait anticipé. Mais il n’était plus question de reculer. Samir lui donna quelques indications pour en apprendre plus sur "Le Spectre" et lui conseilla de rester sur ses gardes.

— Si tu t’attaques à lui, Marine, tu t’attaques à tout un système. Fais gaffe. Tu vas avoir besoin d’alliés.

Marine acquiesça en silence. Elle le savait. Et elle savait aussi qu’elle venait de plonger tête la première dans un labyrinthe d’ombres dont il serait difficile de sortir indemne. Mais pour la première fois depuis longtemps, elle avait l’impression de toucher à quelque chose d’essentiel. Et elle était prête à tout pour dévoiler la vérité.

Les ombres du portOù les histoires vivent. Découvrez maintenant