Chapitre 6

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Marine se réveilla tôt, l’esprit encore alourdi par les événements de la veille. L’appel anonyme hantait ses pensées. Elle savait que cette menace n’était pas à prendre à la légère. Les "Ombres" la surveillaient, et chaque pas en avant la rapprochait du danger. Pourtant, au fond d’elle, une détermination farouche la poussait à continuer. Elle ne pouvait pas abandonner maintenant.

Elle passa la matinée à sécuriser ses documents, à sauvegarder ses fichiers sur plusieurs supports, à préparer une copie de tout ce qu’elle avait découvert. Elle savait que si quelque chose lui arrivait, ces informations devaient survivre. Elle envoya une partie des documents à une collègue de confiance, Amélie, une journaliste d’investigation chevronnée. Marine lui expliqua brièvement qu’il s’agissait d’une enquête en cours et qu’elle aurait besoin de son aide si elle ne donnait plus signe de vie d’ici quelques jours.

Une fois ces précautions prises, Marine décida de retourner sur le terrain. Le dossier du "Spectre" mentionnait un entrepôt abandonné à la périphérie de la ville, utilisé pour des transactions douteuses. Cet endroit semblait être un point névralgique des activités des "Ombres", et elle devait s’y rendre pour en savoir plus.

Avant de partir, elle envoya un message à Samir : "Je vais enquêter sur l’entrepôt de Saint-Henri. Si tu n’as pas de nouvelles de moi d’ici ce soir, alerte Amélie." Samir lui répondit immédiatement, inquiet : "Tu es sûre que c’est une bonne idée d’y aller seule ? Fais gaffe, Marine."

Elle répondit simplement : "Je n’ai pas le choix."

En milieu d’après-midi, elle quitta son appartement et prit la direction de Saint-Henri. La circulation était dense, mais elle se fraya un chemin jusqu’à la périphérie de la ville. Le quartier était désert, une zone industrielle désaffectée où l’ombre des usines en ruine s’étirait sous le soleil déclinant. L’entrepôt se dressait devant elle, une structure massive, ses murs écaillés par le temps.

Elle se gara à distance et s’approcha à pied, prenant soin de ne pas être vue. L’endroit semblait désert, mais elle savait que les apparences pouvaient être trompeuses. Elle s’arrêta un instant, à l’abri derrière une pile de vieux conteneurs, pour observer les lieux. Il n’y avait aucun signe d’activité, mais une étrange tension flottait dans l’air.

Marine prit une profonde inspiration et s’avança vers l’entrée de l’entrepôt. La porte en métal était entrouverte, grinçant sous la brise. Elle hésita un instant, puis se faufila à l’intérieur. La pénombre régnait, les fenêtres obstruées par des années de crasse. Elle se fraya un chemin à travers le labyrinthe de caisses et de palettes, ses pas résonnant sur le sol de béton.

Tout était silencieux, trop silencieux. Marine sentit son cœur battre plus fort, ses sens en alerte. Elle savait qu’elle prenait un risque énorme, mais elle devait savoir ce qui se passait ici.

Au fond de l’entrepôt, elle aperçut une lumière vacillante, une faible lueur provenant d’un bureau vitré. Elle s’approcha prudemment, évitant de faire trop de bruit. Quand elle arriva devant la porte, elle regarda à travers la vitre crasseuse. À l’intérieur, il y avait un homme, de dos, penché sur un bureau encombré de papiers et de dossiers.

Marine sentit son estomac se nouer. Elle devait être prudente. Elle poussa doucement la porte, qui s’ouvrit sans bruit. L’homme ne sembla pas remarquer sa présence. Elle s’approcha lentement, essayant de lire les documents éparpillés sur le bureau. À sa grande surprise, elle reconnut certaines des informations qui figuraient dans le dossier du "Spectre".

Elle sortit discrètement son téléphone et commença à prendre des photos. Mais au moment où elle prenait la dernière, le bruit du déclencheur retentit dans le silence. L’homme se redressa d’un coup et se retourna. Marine reconnut immédiatement son visage : c’était un des hommes dont elle avait vu la photo dans le dossier, un des membres clés des "Ombres".

— Qu’est-ce que vous faites ici ?! s’écria-t-il, la voix chargée de colère.

Marine recula instinctivement, cherchant une issue. Mais avant qu’elle ne puisse réagir, deux autres hommes surgirent de l’ombre, bloquant la porte derrière elle. Elle était piégée.

— Vous auriez dû rester chez vous, mademoiselle, lança l’un d’eux avec un sourire narquois. Maintenant, vous allez devoir payer pour votre curiosité.

Marine sentit une vague de panique l’envahir, mais elle se força à rester calme. Elle savait qu’elle devait gagner du temps, trouver une solution pour s’en sortir.

— Écoutez, je ne suis qu’une journaliste, commença-t-elle, essayant de paraître plus confiante qu’elle ne l’était vraiment. Vous n’avez rien à gagner en me faisant du mal. Si je disparais, d’autres viendront poser des questions.

— Oh, mais nous avons tout à gagner, rétorqua l’homme au bureau en s’approchant. Vous avez fouiné là où il ne fallait pas, et maintenant, vous allez en subir les conséquences. Mais avant, nous voulons savoir ce que vous avez découvert. Qui vous envoie ?

Marine serra les dents, sachant que toute information qu’elle donnait pourrait être utilisée contre elle. Elle chercha désespérément une échappatoire, mais les hommes se rapprochaient, la pressant contre le mur.

Alors qu’ils s’approchaient dangereusement, elle sentit quelque chose de dur sous sa veste : la vieille caméra cachée qu’elle avait apportée. Elle se rappela alors que cette caméra avait un dispositif de signal d’urgence, un gadget qu’elle n’avait jamais eu l’occasion d’utiliser auparavant.

D’une main tremblante, elle activa discrètement le signal. C’était un pari risqué, car elle ne savait pas si quelqu’un le capterait à temps. Mais elle n’avait plus d’autres options.

— Parlez ! ordonna l’homme en la saisissant par le bras. Qui vous envoie ? Qui vous a donné ces informations ?

Marine lui lança un regard défiant.

— Vous croyez que je vais vous dire quoi que ce soit ? Vous n’obtiendrez rien de moi, et vous le savez.

L’homme serra son poing, prêt à la frapper, mais avant qu’il ne puisse agir, un bruit sourd retentit à l’extérieur. Les hommes se figèrent, surpris. Puis, sans crier gare, la porte de l’entrepôt vola en éclats. Des hommes armés surgirent, criant des ordres et pointant leurs armes sur les agresseurs de Marine.

Elle se retrouva soudain libérée, les hommes des "Ombres" étant maîtrisés par cette nouvelle équipe d’intervention. Marine, encore sous le choc, reconnut l’un des hommes qui s’avança vers elle : Samir.

— Marine, ça va ? demanda-t-il en se précipitant vers elle, visiblement inquiet.

Elle hocha la tête, encore secouée.

— Comment… comment m’as-tu trouvée ? balbutia-t-elle.

— Ton signal d’urgence, répondit-il en lui montrant un petit récepteur qu’il avait dans la poche. Heureusement que j’étais dans le coin.

Marine lâcha un soupir de soulagement. Elle avait réussi à s’en sortir, mais de justesse. Le danger était loin d’être écarté, mais pour l’instant, elle était en sécurité.

— On doit partir, dit Samir. Ce n’est plus sûr ici.

Elle acquiesça, suivant Samir et les hommes de son équipe hors de l’entrepôt. En montant dans la voiture, Marine jeta un dernier regard en arrière. Elle savait que cette bataille était loin d’être terminée. Les "Ombres" ne renonceraient pas aussi facilement, et elle devait se préparer à affronter ce qui allait venir.

Mais en dépit de la peur qui la rongeait, une nouvelle détermination s’empara d’elle. Elle ne se laisserait pas intimider. Elle irait jusqu’au bout, quoi qu’il en coûte.

Les ombres du portOù les histoires vivent. Découvrez maintenant