Chapitre 11 : les ombres du passé

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Le voyage avait conduit Phoebe et Owen à travers des paysages variés et pittoresques, de petits villages endormis à des villes animées. Mais malgré la liberté qui accompagnait chaque nouveau lieu, une part de Phoebe restait liée à Ravencroft. Des semaines étaient passées depuis leur départ, mais l'ombre du manoir hantait encore ses rêves.

Ils s'étaient installés temporairement dans une petite maison de campagne, entourée de collines verdoyantes. La tranquillité des lieux contrastait avec l'aura sinistre de Ravencroft, et pourtant, Phoebe ne pouvait secouer l'étrange sensation d'inachevé qui la poursuivait. Owen remarqua son trouble, bien qu'elle tente de le cacher.

Un soir, alors que le crépuscule jetait des ombres longues sur les collines, Owen approcha Phoebe, qui était assise sur le petit balcon, regardant le soleil se coucher.

— Tu penses encore à Ravencroft, n'est-ce pas ? demanda-t-il doucement.

Phoebe hocha la tête, incapable de mentir.

— Oui... je sais que nous avons libéré les âmes, mais j'ai l'impression qu'il reste quelque chose d'inachevé. Comme si le manoir gardait encore un dernier secret, une dernière énigme à résoudre.

Owen s'assit à côté d'elle, posant une main réconfortante sur la sienne.

— Le manoir était un lieu de tant de douleur et de mystères... Il n'est pas surprenant que tu ressentes cela. Mais tu as accompli ce que personne n'a pu faire depuis des siècles. Peut-être que ce que tu ressens maintenant n'est que le contrecoup de tout ce que tu as traversé.

Phoebe réfléchit à ses paroles, mais une intuition tenace lui disait que ce n'était pas aussi simple. Il y avait quelque chose qu'elle avait manqué, un détail important, et cette pensée l'obsédait.

— Je ne peux pas l'ignorer, Owen, murmura-t-elle. Je dois savoir ce qui me trouble tant. Peut-être que... retourner à Ravencroft pourrait m'apporter des réponses.

Owen la regarda, ses yeux remplis d'inquiétude, mais aussi de compréhension. Il connaissait l'importance des réponses pour elle, et il savait que si elle ne retournait pas, cette sensation d'inachevé la poursuivrait pour toujours.

— Si c'est ce que tu ressens, alors nous devons y retourner, dit-il fermement. Nous avons fait face aux ténèbres ensemble une fois, nous pouvons le faire à nouveau.

Quelques jours plus tard, Phoebe et Owen étaient de retour sur la route, se dirigeant vers Ravencroft. Le voyage, bien qu'agréable, était teinté d'un sentiment de gravité. Phoebe se demandait ce qu'elle trouverait en revenant au manoir, et si cette décision les plongerait à nouveau dans le monde des esprits et des mystères occultes.

Lorsque le manoir apparut à l'horizon, enveloppé dans une légère brume matinale, Phoebe sentit son cœur se serrer. Ravencroft semblait différent, plus calme, mais toujours chargé d'une atmosphère lourde. Pourtant, quelque chose la poussait en avant, une force irrésistible.

Ils franchirent les grilles du manoir et s'arrêtèrent devant l'entrée principale. Phoebe ressentit une vague d'émotions en entrant à nouveau dans le hall. Les souvenirs de leur bataille contre l'esprit vengeur lui revinrent en mémoire, mais elle sentit aussi quelque chose de nouveau, une énergie plus douce, comme une présence qui l'appelait.

— Où allons-nous ? demanda Owen, prêt à suivre son instinct.

Phoebe ferma les yeux un instant, laissant son intuition la guider.

— La bibliothèque, répondit-elle finalement. Il y a quelque chose que nous avons manqué là-bas.

Ils se dirigèrent vers la grande bibliothèque, où les murs étaient tapissés de livres anciens et poussiéreux. Phoebe sentit une vague de nostalgie en franchissant le seuil de la pièce. Les étagères semblaient la regarder, comme si elles abritaient des secrets qui n'attendaient que d'être révélés.

Elle parcourut les rangées de livres du regard, ses doigts effleurant les reliures. Puis, sans vraiment savoir pourquoi, elle s'arrêta devant une étagère particulière, un peu plus ancienne et usée que les autres. Elle se pencha pour mieux voir, et son regard tomba sur un livre en cuir noirci par le temps, à peine visible parmi les autres.

Elle tendit la main et le tira doucement. Le livre semblait étonnamment lourd pour sa taille, et alors qu'elle le sortait de l'étagère, un faible bruit mécanique retentit. Une partie du mur à côté de l'étagère s'écarta lentement, révélant une porte secrète. Owen, qui observait la scène en silence, échangea un regard surpris avec Phoebe.

— Il semble que tu avais raison, murmura-t-il.

Phoebe prit une profonde inspiration avant de s'avancer vers la porte secrète. Derrière elle, un passage sombre s'ouvrait, menant à un escalier en pierre qui descendait dans les profondeurs du manoir. Une odeur de renfermé et de vieux parchemin flottait dans l'air.

— Allons-y, dit-elle, sa voix tremblante d'excitation et de crainte.

Ils descendirent lentement les marches, leurs pas résonnant faiblement dans le silence lourd. Le passage les conduisit à une pièce cachée, petite mais remplie d'une énergie palpable. Au centre de la pièce, un autel de pierre était dressé, et dessus, un coffre en bois orné de symboles occultes.

Phoebe s'approcha de l'autel, sentant une étrange familiarité en présence du coffre. Elle posa une main hésitante sur le bois ancien, et à cet instant, une vague de souvenirs et de visions la submergea. Elle se vit dans une autre époque, dans le manoir tel qu'il était autrefois, vibrant de vie et de secrets. Elle ressentit la peur, la douleur, mais aussi l'amour et la dévotion des âmes qui avaient habité ces lieux.

Owen l'observa, inquiet, mais respecta le silence. Il savait que quelque chose de profond se passait, quelque chose qui allait au-delà de la simple curiosité.

Phoebe ouvrit doucement le coffre, révélant un ensemble de lettres soigneusement rangées, écrites sur un papier jauni par le temps. Les premières lignes qu'elle lut confirmèrent ses soupçons : ces lettres appartenaient aux anciens maîtres du manoir, les Corbin. Elles racontaient l'histoire tragique de leur famille, de leur ascension à leur chute, et enfin, de leur malédiction.

Mais parmi les lettres, une se distinguait des autres, portant une adresse personnelle : « À celle qui viendra après nous. »

Phoebe sentit un frisson en lisant ces mots. Cette lettre lui était destinée, elle en était certaine. Avec une émotion croissante, elle ouvrit l'enveloppe et lut :

« Si tu lis ceci, alors tu es celle que nous avons attendue. Tu es celle qui doit mettre fin à ce que nous avons commencé. Nous avons emprisonné une force qui nous a condamnés, mais notre espoir réside en toi. Pardonne-nous pour ce que nous avons fait, et achève ce que nous n'avons pu terminer. Libère Ravencroft, non seulement des esprits, mais de la douleur qui l'habite. Tu es la clé, la voix qui apportera la paix. »

Phoebe relut la lettre plusieurs fois, le cœur battant. Elle comprenait maintenant que le rituel qu'elle avait accompli était seulement une partie de la solution. La véritable libération de Ravencroft nécessitait de faire la paix avec le passé, de réconcilier les erreurs commises avec les âmes qui avaient souffert.

— C'est plus qu'une malédiction, dit-elle finalement à Owen, les larmes aux yeux. C'est un appel au pardon. Ils n'étaient pas seulement des bourreaux, mais aussi des victimes de leur propre ambition. Pour vraiment libérer ce lieu, je dois leur accorder ce pardon.

Owen hocha la tête, comprenant l'importance du moment.

— Alors fais-le, Phoebe. Offre-leur la paix qu'ils recherchent depuis si longtemps.

Phoebe ferma les yeux, tenant la lettre contre son cœur. Elle récita doucement une prière de pardon, une chanson douce s'élevant de ses lèvres, comme une berceuse pour apaiser les âmes tourmentées. La pièce sembla vibrer, l'air se remplissant d'une énergie apaisante.

Peu à peu, l'atmosphère changea, la lourdeur qui pesait sur le manoir se dissipant. Les murs, autrefois chargés de souffrance, semblaient s'alléger, comme si les esprits eux-mêmes avaient accepté le pardon offert.

Lorsqu'elle ouvrit les yeux, Phoebe sentit que tout était enfin terminé. La paix était venue à Ravencroft, non seulement pour les âmes du passé, mais aussi pour elle-même.

Owen lui prit la main, un sourire rassurant sur les lèvres.

Les ombres de la mélodieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant